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 [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]

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Kyoran Gweria
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MessageSujet: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyMar 8 Mar - 17:05

[TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] Giphy

Sac à main : check. Lunettes de soleil : check. Dossier : check. Portable : check. Clefs de voiture : ch… Bordel.
Pas dans les poches, pas dans le sac, pas sur la table de la cuisine ni sur la console près de la porte d’entrée. Elles n’étaient pourtant pas difficiles à repérer normalement, avec leur énorme porte-clefs vert fluo, courtoisie du garage qui lui avait prêté le véhicule. Les coussins du canapé volèrent, puis les jeans du panier à linge sale furent passés au crible à leur tour. Rien sur la table basse. Dans le hall, la porte coulissante de la penderie glissa sans ménagement. Elle eut l’intelligence de ne pas grincer face à la hâte de Kyoran. Victoire ! Le trousseau récalcitrant était dans un autre manteau. Check.
La jeune femme jeta un dernier regard à la pendule avant de fermer la porte derrière elle. Techniquement, elle n’était pas encore en retard.

Elle dévala les escaliers jusqu’au garage et une fois arrivée, tâcha de ne pas afficher son découragement face au “bolide” qui l’attendait. Elle n’avait jamais été passionnée de voiture ni quoi que ce soit. Mais elle aimait bien avoir SON véhicule. Pas une caisse qu’on lui prête après un énième vol. Elle essayait de relativiser. Certes, ce n’était pas sa voiture, mais ce n’était pas une épave non plus, loin de là. De toute manière, il ne valait mieux pas s’afficher avec une berline trop luxueuse dans cette ville, sous peine de ne pas en profiter longtemps.
Elle prit place derrière le volant tandis que la porte du garage s’ouvrait sans hâte. L’horloge digitale la narguait un peu plus à chaque minute.

Elle laissa derrière elle Palos Verdes pour rejoindre le Civic Center. Il n’y avait pas beaucoup de route, et puis c’était un des rares itinéraires qu’elle connaissait bien. Après un an à Downfall, elle devait bien admettre qu’elle peinait encore à se repérer dès qu’on sortait de ces deux zones. Entre les panneaux de direction arrachés, les noms des rues manquantes, ce n’était déjà pas simple. Mais ajoutez à cela des travaux non signalés, des bâtiments en ruine qui décidaient à leur gré de s’écrouler et de barrer une route, ou encore des passages gardés par divers gangs, prêts à tendre un traquenard à quiconque ferait l’erreur de s’aventurer dans telle ou telle rue… On n’est jamais certain d’arriver à destination ici.

Heureusement, elle ne rencontrait guère ce genre de désagréments pour se rendre dans les bureaux locaux de Gweria Enterprise. Aujourd’hui, elle devait rencontrer plusieurs candidats pour le recrutement d’un logisticien. Et c’était officiel : elle avait rendez-vous il y a 7 minutes. Elle détestait être en retard. Meilleur moyen de mal démarrer une relation professionnelle, et peu importe si elle était en position dominante dans cette situation. Elle détestait le manque de respect, elle détestait les patrons qui usaient de ce genre de power move.
Elle accéléra un peu, passa une vitesse de plus. Tenta de passer une vitesse de plus, du moins. Fichue boite manuelle. Cette voiture, passée entre les mains de propriétaires temporaires peu soigneux, se faisait récalcitrante. L’embrayage adhérait quand ça lui chantait, et les rapports accrochaient à chaque passage. Kyoran pesta, baissa le regard sur sa main droite, s’attendant presque à voir le levier lui rester dans la main.

Le choc fut léger, mais suivi d’un couinement qu’elle entendit malgré le crissement des freins. Merde. Pendant une seconde, elle regarda alentour pour s’assurer qu’il ne s’agissait pas d’un énième piège. Mais merde, on pouvait bien lui voler cette vieille casserole. Elle ne prit même pas la peine de se garer sur le bas-côté, elle descendit rapidement pour voir ce qu’elle avait percuté. Une fois le capot contourné, elle découvrit une bête qui essayait de rejoindre le trottoir. Pas une bête, un chien. Elle l’observa avant de tenter de l’approcher. Il n’y avait pas de sang visible, mais il traînait son arrière-train en geignant. Il devait se trouver juste au bord de la route quand elle était passée, et elle l’avait accroché. Le cœur de la jeune femme se serra. Elle n’avait aucun mal à nuire à un être humain, si besoin. Mais voir un animal en souffrance, c’était autre chose. Sa mâchoire se serra.

“Merde. Merde merde merde merde merde!”

Son premier réflexe était de vouloir le rassurer, le caresser pour qu’il reste tranquille. Mais ce n’était pas le plus urgent, le plus efficace. Si elle tentait de le porter directement, elle craignait d'aggraver ses blessures. Déjà, son cerveau se mettait en mode résolution de problème. Elle fila vers le coffre. Un grand sac Ikea, une bouteille d’eau à moitié vide et une vieille couverture qui lui avait servi à protéger certains objets lors de son emménagement. Elle prit le couvre-lit et rejoignit sa pauvre victime, qui avait visiblement abandonné l’idée de rallier l’accotement. Elle redoutait qu’il se montre craintif en la voyant se rapprocher, mais il n’en fit rien. Il la surveillait d’un œil attentif, mais n’eut pas de mouvement de recul. Il ne gémissait plus non plus, et Kyoran ne savait pas si c’était un bon ou un mauvais signe. Le plus difficile fut de le placer sur la couverture, mais une fois fait, il fut plus facile de le transporter sur le siège passager de la voiture.

“Courage mon vieux, on va s’occuper de toi.”

Kyoran lui adressa un regard désolé avant d’enclencher le contact et redémarrer. Elle roula un moment sans trop savoir où aller. Il lui semblait vaguement être passé devant un vétérinaire dans le coin, mais où exactement ? Elle fouillait dans ses souvenirs pour une direction à suivre. Après quelques minutes, l’enseigne en forme de croix bleue apparut comme un vrai soulagement. Elle se gara à la va-vite sur le trottoir juste devant le cabinet. L’instant d’après, elle poussait d’un coup de fesse la porte du bâtiment, portant dans ses bras l’animal blessé.

“Vous avez ren… Oh, là, venez, pose-le ici. Voila, doucement... Qu’est-ce qu’il s’est passé ?”

Après un récit rapide de leur malheureuse rencontre, la secrétaire fila chercher le véto, laissant Kyoran seule avec sa culpabilité et “mon vieux”. Elle lui caressait doucement la tête et le cou, tout en lui disant quelques mots encourageants et rassurants. Mais dans sa tête continuaient les “merde merdemerde merde meeerde”.

“C’est grave ? Il va s’en sortir ?
- Difficile à dire pour l’instant. On en saura plus pendant l’opération.”

Elle n’eut pas plus d’informations et elle ne put que regarder le docteur entraîner son patient vers l’arrière du cabinet. Kyo se laissa tomber dans un siège en plastique, non sans un soupir. La petite pendule au dessus du comptoir la ramena au planning initial de sa journée. Yep, définitivement en retard. Elle tira avec lassitude son téléphone de son sac. Elle laissait à sa secrétaire le soin de reprogrammer les entretiens d’embauche.


___________
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Dernière édition par Kyoran Gweria le Mar 7 Mar - 8:57, édité 1 fois
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Mickaëla Andersonn
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyDim 13 Mar - 20:37

Affalée dans le lit, j’observe le plafond sans vraiment le voir. Sans plus le voir. Combien de fois je ne l’ai pas déjà vu, revu, looké et reluqué pour le plaisir de … Compter les moutons, ça n’a jamais été mon fort. Faire les cent pas dans l’appart, ça finit rapidement par lasser. Alors j’ai commencé à me concentrer sur les imperfections du plafond. Sauf qu’à force de me ramasser le nez dessus non-stop, j’en ai eu marre et j’ai harcelé le proprio pour qu’il règle ça. Après le quatrième coup de fil en autant de nuits, je peux vous assurer que ça fait bouger les choses. Bon, j’ai bien senti que je n’avais pas intérêt à le solliciter pour autre chose dans les semaines (voire mois) à venir, mais au moins mon plafond est lisse. Et du coup … je n’ai plus aucune crevasse à contempler, ni aucune moulure à insulter. Et ça dure, et ça dure, et ça dure.
J’ai cessé de compter le nombre de nuits que j’enchaine ainsi à la suite. J’ai même proposé de faire toutes les gardes nocturnes, histoire de vérifier que la journée n’avait pas une quelconque préférence de la part de ma psyché. Inutile de préciser que ce ne fut pas très concluant. Ou, au contraire.

Je tourne la tête et regarde les lettres rouges de l’autoradio changer. Le un qui se tortille en deux. Le deux qui se redessine en trois. Et ainsi de suite. Inlassablement. Sans jamais me demander mon avis. C’est une vieillerie qui date d’une autre vie. J’aurais probablement dû m’en séparer. Mais j’ai testé Alexa et elle ne me convenait pas. Ou inversement. Bref, elle et moi on n’est pas compatibles. Pas plus que le nouveau – qui est en fait un vieux – et moi ; mais lui au moins il ne me bassine pas les oreilles avec des exercices de pleine conscience et d’autres saloperies du genre.

Quand j’en ai finalement marre que les chiffres bougent sans pour que pour autant le sommeil ne vienne, je finis par terminer ma nuit (si l’on puit dire) comme toutes les précédents, à savoir : en me levant. Je me traine jusqu’à la salle de bain où le miroir me fait voir ce que je savais déjà. J’ai des cernes de trois kilomètres sous les yeux, un teint un peu chelou et trop peu de chair sous la peau. Il faudrait que je mange plus. Et plus souvent. Et, si possible, à heures fixes. Ma foi, cela fait beaucoup de contraintes pour un résultat pas forcément garanti.
Alors au lieu de me laisser faire la leçon par mon reflet, je me débarrasse de mes sous-vêtements et plonge sous une douche chaude. Comme j’ai été de garde cette nuit (garde qui s’est terminée il y a quelques heures à peine, pour votre bonne information), j’ai toute la journée devant moi avant de remettre ça. Ah non c’est vrai, j’ai ma journée ET ma nuit aujourd’hui, vu que je viens de m’en taper six d’affilé. Ce qui semble être le maximum syndical autorisé. Je suis la première étonnée qu’on ait des syndicats dans une ville pareille. Je pense plutôt que c’est une contrainte imposée par la direction pour empêcher les éléments viables de se détériorer trop rapidement. Après tout, ce n’est pas comme si on touchait une prime supplémentaire pour le shift de nuit. Mais ça n’étonnera personne.
Comme précité, le résultat en reste sensiblement pareil : il est six heures et des cacahuètes du mat’ et je suis réveillée, à défaut de réussir à dormir.

Je ne m’éternise pas sous l’eau qui coule. Been there, done that, not worth the bill. Je me sèche et enfile une tenue décontractée. Pas vraiment par choix, c’est juste ce qui traînait à proximité. Et à cette heure-ci, le public n’est pas vraiment regardant. Bon, accessoirement si je me sape trop en ligne avec mon salaire, je risque de me retrouver nue dans le parc à un moment donné de l’histoire. Et ça non plus, ça ne me tente pas trop. Un legging et un sweat un peu ample (il ne l’était pas il y a quelques mois d’ici, mais comme je vous l’ai dit, qui ne mange rien ne … eh bien se retrouve vêtu d’un sac à patates en moins de deux). Je rafle quelques bricoles dans mon sac, comprenez : une grande bouteille d’eau, deux barres protéinées (on ne sait jamais), quelques biscuits pour chiens, mon téléphone et mes clés (on ne m’y reprendra pas à deux fois). Je siffle après Bob qui joue à la pantoufle géante dans le canapé et qui pèse, pendant de longues et interminables secondes le pour et le contre de se lever à une heure si matinale. J’en viens à me demander si ce n’est pas lui qui me vole mes heures de sommeil. Il peut sans problème en enchaîner vingt d’affilé sans même se retourner. Dans une autre vie, ce chien devait être un chat …

~.~

J’ai réussi à trouver un banc sans junkie, sans junkfood, sans –j ni –je ni whatsoever. Je m’y suis installée, histoire de profiter un peu du paysage. Pil entre l’heure où la petite frappe de nuit se barre et où les suicidaires du matin (j’ai nommé les joggeurs) s’évertuent à me faire culpabiliser de ne pas les imiter. Et … je me suis endormie. Enfin, assoupie serait plus correct comme terme.
Fait est qu’en rouvrant les yeux (j’ai dû comater quoi, six minutes max. montre en main) j’étais toujours sur le banc (vous voyez, il faut positiver dans la vie) mais je n’avais plus la laisse dans ma main. Et pas de Bob dans le viseur, ni de près ni de loin.
Alors il faut rester calme.
Il faut rester zen.
Il n’a pas pu aller bien loin avec la bedaine qu’il se paie.
Sauf qu’à force de le chercher, de l’appeler et de ne PAS le trouver ; on commence quand même un peu à paniquer.
Et quand tout à coup dans les gens que tu interroges de manière de plus en plus pressante, il y en a une qui te balance d’un air nonchalant qu’une grosse bagnole a percuté un chien il y a quelques minutes de cela avant de partir avec le corps … eh bien, mon cœur s’est glacé. Et quelques instants après, de mes mains crispés je secouais le pauvre témoin de cette scène atroce. Entre mes propres cris et ma voix à peine reconnaissable, je ne sais ni où ni quand ni comment, mais quelqu’un a réussi à me communiquer l’itinéraire jusqu’au véto le plus proche.

Je n’ai jamais couru aussi vite de ma vie. Heureusement en legging, on ne porte pas de talons. J’aurais dû les abandonner dans une poubelle de ville. C’est le moindre de mes soucis tandis que j’arrive au bout de ma life au bâtiment concerné. Je sens ma cage thoracique sur le point de céder sous la pression de mon palpitant. Ma bouche est sèche. Ma respiration reste comme collée dans mon œsophage. Pourtant je pousse un dernier sprint en reconnaissant la croix bleue. La même qui surplombait l’endroit où nous nous sommes rencontrés.
Les bras tendus vers l’avant, je passe la porte battante (j’ai visé juste, ouf) sur le point de tourner de l’œil. Mais je ne peux pas lui faire ça ! Pas avant de m’assurer qu’il est bien vivant ! Pas avant qu’il ait pu assister personnellement à mon déclin !

Je m’apprête à faire un attentat au comptoir, lorsque mon regard est attiré par une présence affalée dans un fauteuil. Un téléphone portable collé à l’oreille. Celle-là, je la reconnaitrais entre mille. Même dans le noir. Même dans le brouillard. J’aurais dû mettre ma main à couper qu’elle y était pour quelque chose. Même de ce côté-ci du mur.
Au cas où vous en doutiez : yes, karma is a bitch !

- « QU’EST-CE QUE TU AS FAIT À MON CHIEN ?!! »

Que je lui balance tout en arrachant son cellulaire qui se retrouve à traverser la moitié de la pièce avant d’atterrir quelque part à travers un bruit mat.
Le mot pétasse je l’ai ravalé à la dernière minute, mais elle a dû le deviner.
Je vois rouge.
Je vois noir.
Mais tout ce que j’arrive à faire c’est plaquer mes deux mains fermement sur les accoudoirs afin de ne pas m’évanouir.


Dernière édition par Mickaëla Andersonn le Lun 28 Mar - 21:00, édité 2 fois
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Kyoran Gweria
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyMar 15 Mar - 10:41

Vous connaissez sans doute la loi de Murphy. Le principe d'emmerdement maximum, la tartine qui retombe toujours du côté de la confiture, la mouche qui s'entête à se cogner contre le battant non ouvert de la fenêtre, le sac poubelle qui lâche le jour où vous êtes déjà en retard... Mais à moins de vous appeler Mickaëla Andersonn, vous n'avez sans doute pas entendu parler de l'un de ses dérivés les plus obscurs : l'effet Gweria. Beaucoup plus ciblé, mais beaucoup plus néfaste aussi. La formule est simple : lorsqu'une Mickaëla et une Kyoran se retrouvent dans un même périmètre, le malheur frappe, et il frappe toujours la première d'entre elles.

Ce qui n'était qu'une blague entre elles lorsqu'elles étaient gamines avait fini par se vérifier si souvent qu'elles avaient toutes deux inscrit celà parmi les lois de l'univers, au même titre que la gravité ou le principe d'inertie. La malédiction avait commencé doucement, lorsque Kyo n'était encore qu'une adolescente. Turbulente, fêtarde, elle gravitait autour de toutes les fêtes, et son jeune âge ne l'empêchait pas de rejoindre les beuveries qui avaient lieu sur les campus aux environs de New York. À Yale, notamment. C'était ainsi qu'elle avait commencé à percuter le destin de Mickaëla, tel un chat noir.
Rien de grave au début. Un téléphone perdu, un passage chez le coiffeur peu flatteur, une marche loupée dans un escalier. À cette époque, elles auraient encore pu devenir amies, s'il n'y avait pas eu une escalade dans la malchance. Suite à un abus d'alcool encouragé par une Kyo festive, Micka avait loupé un de ses partiels. Peu après, elle avait découvert les goujateries d'un petit ami de l'époque, au détour d'une anecdote anodine de l'adolescente. Cerise véreuse sur le gâteau avarié, Kyoran avait sympathisé avec un certain Wilfried. L'étudiant était drôle, malin, beau gosse. Elle avait cru bien faire en jouant les entremetteuses entre lui et la future psy. En voyant le couple parfait, respirant la joie de vivre, elle était fière d'elle. Grâce à elle, ils s'étaient trouvés. Ils étaient heureux. Elle avait rompu la malédiction.

Des années plus tard, bien après la cavale, bien après le retour à New-York, Kyoran avait fini par apprendre la sordide vérité sur Wilfried, et la fin toute aussi tragique de Wilfraela (Mickaed ?). Comment avait-elle su les détails intimes de la relation de Mickaëla, vous demandez ? Une confidence entre les deux femmes ? Certainement pas, non, ce serait trop simple.

Ça devait être en 2018 ou 2019, à New York. Kyoran traquait à l'époque un sale mec qui trainait dans les groupes de soutien pour repérer des proies vulnérables, en vue d'abuser de leur faiblesse pour mieux les plumer. C'était une des premières vraies missions que la jeune femme avait décidé de suivre jusqu'au bout, en solo. Naturellement, pour trouver sa trace, le prendre en flag', elle avait entrepris de chasser sur le même territoire que lui. Discrète, elle avait commencé à se rendre à 4 ou 5 meetings par semaine. Alcooliques, addicts, cancéreux, veufs éplorés, il y en avait pour tout le monde. Et puis un soir, alors qu'elle était occupée à scanner du regard, en douce, les visages des participants, elle avait été interpellée par la voix qui venait de prendre la parole. Elle reconnut d'abord le timbre, puis le visage, puis l'histoire. Du moins ce qu'elle en connaissait, elle avait près de 15 ans de retard à rattraper. Au fur et à mesure que Mickaëla s'était confiée devant l'assemblée sur le naufrage de son mariage, sur les coups, sur les nuits à boire, puis les journées, Kyoran s'était enfoncée de plus en plus dans son siège. Tout ça était de sa faute. Elle avait essayé d'être aussi immobile que possible, de se rendre aussi petite que possible, invisible presque. Dès qu'elle entrevit une possibilité, elle essaya même de prendre la tangente. Mais vous savez ce que c'est, la loi de Murphy. Tout ce qui peut mal tourner tournera forcément mal. Alors forcément, Mickaëla l'avait vue. Après des invectives que le modérateur n'avait pas réussi à tempérer, elles avaient été toutes les deux bannies du meeting. Encore un exploit à attribuer au porte-malheur Gweria.

Les retrouvailles n'avaient donc pas été chaleureuses. Mais ce n'était rien à côté d'aujourd'hui. Kyoran ne savait même pas qu'Andersonn avait quitté the Big Apple pour trouver refuge à Downfall. De toutes les villes américaines, quelle était la probabilité pour qu'elles se retrouvent toutes les deux ici, sincèrement ? Mais plus c'était improbable, plus il était inévitable que cela arrive. À l'instant où Kyoran avait percuté ce chien, elle aurait dû le savoir. Forcément que c'était SON chien. Et maintenant, elle en était certaine : l'animal allait mourir, et ce serait son tour immédiatement après, car vue la furie qui lui faisait face, aucune chance qu'elle ressorte vivante de ce cabinet vétérinaire, compétences de mercenaire ou pas.

Kyoran l'avait reconnue instantanément, à la seconde où elle avait poussé la porte. C'était comme un instinct, une alerte qui se déclenchait automatiquement dans son cerveau dès qu'elle était en présence de Micka. Elle avait si bien intégré la guigne qu'elle lui portait immanquablement, qu'à chaque fois qu'elle la croisait, elle avait l'impression d'être soumise à une injonction d'éloignement impérieuse. Vite, s'éloigner, ne plus être dans la même pièce, le même quartier, avant que la tragédie frappe. Elle serait sortie du véto dans la seconde, si Mickaëla n'avait pas été entre elle et la porte. Kyoran était habituée à causer de la souffrance, volontairement. Mais elle se trouvait complètement dépourvue face à sa victime malgré elle. Quoi qu'elle fasse, ça tournait toujours mal.

"QU’EST-CE QUE TU AS FAIT À MON CHIEN ?!!"

Elle ne moufta pas en voyant son téléphone voler à travers la pièce. Elle ne cherchait pas à se défendre contre la fureur de Mickaëla. Elle restait immobile, soucieuse de ne pas empirer la situation. Mais elle était certaine que pour chaque seconde qui passait avec ces deux femmes à moins d'un mètre, la probabilité de voir le toubib revenir pour annoncer la mort du chien augmentait de façon exponentielle. Kyoran regardait son adversaire sans bouger. Elle se comportait comme face à un ours. Ne pas bouger, ne pas s'affoler.

"Ils sont en train de l'opérer. Sa hanche a pris un coup, mais le véto est optimiste."

Mensonge. Le vétérinaire ne lui avait rien laissé entendre, ni en bien ni en mal. Mais la jeune femme décidait de croire à la chance et aux fins heureuses aujourd'hui. Et puis le visage furibond et mort de trouille de Micka était à 5 cm du sien, alors elle préférait éviter de la voir sortir les crocs encore davantage. Sous sa colère, elle pouvait voir toute l'inquiétude de la propriétaire du chien. Elle n'avait vraiment pas bonne mine, on aurait dit qu'elle était sur le point de s'évanouir. Mais ce n'était sans doute pas le meilleur moment pour en faire la remarque et s'inquiéter de sa santé. Et puis Kyoran se méfiait que la moindre de ses paroles puisse devenir prophétie. Il suffisait qu'elle lui propose de s'asseoir pour qu'elle tombe raide, c'était certain.
Elle aurait voulu s'excuser, dire qu'elle ne l'avait pas fait exprès, qu'elle ne l'avait pas vu, qu'elle l'avait amené aussi vite que possible ici, qu'elle espérait que tout irait bien. Mais à quoi bon ? Elle était le diable. Sa stratégie était d'être la plus neutre possible, en dire le moins possible, ne pas bouger. Ni parole ni action pour provoquer de nouveaux remous. Elle était à deux doigts de se retenir de respirer. L'effet papillon n'aurait rien à tirer d'elle.

Par dessus l'épaule de Micka, elle aperçut l'assistante du vétérinaire qui venait de faire un passage derrière le comptoir. Elle semblait avoir quelque chose à leur dire mais n'osait pas interrompre leur face à face. En une seconde, Kyo remarqua son air défait, ses épaules basses, son regard qui revenait à ses pieds. Tout dans son attitude tendait vers le sol, et elle en fit de même, se ratatinant encore un peu plus sur le fauteuil. Avant même qu'elle parle, elle savait.

Evidemment qu'il était mort.

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Mickaëla Andersonn
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyLun 28 Mar - 22:01

Bordel de merde, je sens que je vais dégueuler.
Pas sur elle. Pas sur elle.
Même si, soyons honnête, elle le mérite bien !

Je me retiens pourtant. J’ai même fermé les yeux. Autant pour reprendre ma respiration que pour ne pas la voir. Si je les garde fermé assez longtemps, peut-être bien qu’en les rouvrant elle a aura disparu. Poof, dans un écran de fumée. Ni vu, ni connu. T’as rien vu, t’as rien entendu. Et le pingouin se barre dans la pelouse du terrain de golf ! Ah les grands classiques de l’animation !
Le truc c’est que j’y crois moyennement. D’ailleurs, en inspirant profondément par le nez (toujours dans le but, seul et unique, de garantir un maximum d’oxygène dans mes poumons tous crêpis et desséchés), c’est son parfum de pétasse qui s’incruste et s’agrippe. Toujours le même. Lui aussi je pourrais le reconnaître partout, même dans un métro bourré, les yeux fermés. Preuve en est.
Sauf que là, c’est tant le présent que le passé qui me donnent envie de gerber. Je vais vraiment finir par tourner de l’œil. Et ce ne sera pas uniquement dû à l’adrénaline qui retombe. Après avoir couru un marathon pareil, tout en connaissant la relation conflictuelle que j’entretiens avec l’exercice physique … si seulement une assistante avait le bon sens de se présenter à moi avec une perfusion sous la main. Juste un fructueux hasard des choses. Pour équilibrer un peu la poisse monumentale que je me tape à me farcir ma Némésis dans un coin aussi paumé que la seule clinique véto de Downfall.

Et c’est finalement cette dernière pensée qui me gifle suffisamment fort que pour me sortir de mon état de semi-transe-slash-évanouissement-précoce. Je ne PEUX tout simplement pas me permettre de vaciller maintenant. Il faut que je me reprenne. Il faut que je revienne. Pour Bob !
Allez on y va Micka !
Une grande inspiration.
Pour Bob !
Sans tousser ou cracher un poumon.
Pour Bob !
Et j’ouvre les yeux à trois … deux …



Fichtre, elle est toujours là. Sa face à moins de dix centimètres de la mienne. C’est le moment que choisit mon psyché pour se remettre dans le bain et analyser le décor. Ou plutôt, la position dans laquelle j’ai réussi à me mettre dans l’euphorie (hum) du moment. Une longue asperge brune penchée vers l’avant, les deux mains sur les accoudoirs (à lire : les griffes acérées plantées dans le tissu plutôt que dans la chair ; y’a pas à dire, j’ai raté mon coup là), faisant face à l’origine de tous ces maux. Il suffirait à peine d’un petit générique de dessin animé pour imaginer la fumée sortir de mes narines à l’image d’un taureau devant le lequel on aurait secoué un petit drapeau rouge. Ce bout de tissu a plus l’air et le look d’un string bordeaux quand on l’associe à Kyoran Gweria ; mais ça, tout le monde s’en balance … non ?

Je n’ai même pas la force de répliquer. Ses mots m’agressent comme autant d’enclumes que Dieu (ou quiconque s’amuse à jouer au loto avec nos numéros de sécurité sociale) jugerait utile de me balancer depuis son perchoir divin. Il est clair qu’il vise mieux que moi. Opérer. BAM. Hanche. BAM. Coup. BAM. Je sais, je devrais plutôt me concentrer sur des mots tels que veto et optimiste, plus encore quand ils sont utilisés dans la même phrase … mais c’est plus fort que moi. Et plus fort qu’elle aussi. Il n’y a rien de bon qui peut sortir de la bouche de cette fille. Si j’avais eu la force de le faire, j’aurais callé ma main devant pour l’empêcher d’émettre la sentence universelle qui va suivre. Mais si j’avais fait ça, j’aurais d’office basculé vers l’avant et j’aurais atterri sur elle. Au mieux, entre ses seins. Au pire … bon, connaissant notre relation à toute épreuve, cette deuxième option aurait eu tous les votes de sympathie du public. De là à savoir si ça impliquait ses genoux ou les miens … Laissons le mec qui joue aux échecs avec les nuages seul avec ses hypothèses à la one again.

Ma bouche est sèche. Les mots peinent à sortir. Je suis sauvée par le gong, qui n’est autre qu’une petite clochette qui pendouille quelque part dans le décor lointain auquel je fais dos. Mais quand je perçois le mouvement du visage de Kyo, mon sang se glace. Je déglutis tout en me redressant. Lentement. Très. Lentement. Mon regard se détache du sien. Je fixe le mur derrière elle. Je sens mes dents se serrer. Je sens les larmes monter. Je les retiens. Je les ravale.

Je me retourne tandis qu’elle se relève à mes côtés. Je sens plutôt que je le vois. Mes yeux fixés sur l’infirmière restée en retrait. C’est peut-être mieux. Sans quoi j’aurais été capable de lui sauter à la gorge pour lui arracher les yeux. Lorsqu’elle avance d’un pas vers moi, ma main droite attrape dans un élan de réflexe le poignet de ma voisine. Moi qui m’était promise silencieusement de ne JAMAIS la toucher (rien qu’en étant à proximité c’est foireux, alors imaginez si je portais son odeur en plus ! Non pas que je suis superstitieuse, mais cette femme est une poupée vaudou rendue chaire).
Alors lorsque les mots tombent, je ne les entends même pas. Je vois une paire de lèvres qui bougent. Je sens le peu de couleur qu’il me restait, céder à l’appel de la gravité. Je sens mes jambes trembler. Je sens mon cœur exploser. Et dans quelque chose que je n’explique pas moi-même, je fais un demi-tour sur moi-même et m’effondre sur l’épaule de mon ennemie jurée. Mes bras autour de son cou, et pour m’empêcher de tomber, et pour me raccrocher. À quelque chose de tangible. À quelque chose de réel.
Je la sers tellement fort qu’elle n’a aucune chance de s’en dépêtrer. Peu importe si cela me porte la poisse-de-la-poisse jusqu’à la fin des temps. Ça ne changera pas grand-chose à ma vie actuelle.

Kyo dit quelque chose.
À moins que ce ne soit l’infirmière. Ou l’assistante. Bref, la meuf annonciatrice des mauvaises nouvelles.
Perso je capte que dalle. J’ai tellement de larmes dans les yeux et de morve dans le nez. Morve qui a commencé à couler sur mon avant-bras. Ah non, ce n’est pas ma manche ça, c’est son survêt. Nouvelle gifle. Qu’est-ce que je fous dans ses bras moi ? Et je la relâche comme si de rien n’était. Gardons un semblant de tenue. Ne serait-ce que pour la forme. Même si ça ne doit pas être la première fois qu’on chiale dans cette pièce. Mais que c’est déprimant une salle d’attente de véto …

Je renifle et me secoue un peu la crinière, histoire de reprendre un semblant de contenance (même si le sol me semble toujours aussi accueillant vu d’aussi haut) avant de faire face à notre interlocutrice.

- « Vous pouvez répéter ? »

La question votre honneur ?
Non pas que je n’écoutais pas, mais vous ne parliez pas assez fort. Les chutes du Niagara ont fait écho contre mes tympans.

- « Elle n’a pas souffert. »

Euh. Quoi ? Pardon ?

- « Plait-il? »

Le truc à la mord-moi-l’nœud pour ne pas sortir un vulgaire hein devant un public abasourdi. Ce qui est mon rôle, et mon adjectif, prestement.

- « J’ai dit qu’elle n’avait pas souffert. »

Qu’elle répète avec quelques aigues de plus. Comme si j’étais malentendante. Ce qui me fait plisser les yeux. Et un peu le nez aussi. Inutile de crier madame, on se trouve dans la même pièce. Même si je dois saluer votre instinct de survie de ne pas vous approcher trop vite, ni de trop près.

- « Elle? »

Et je retourne, à nouveau, mon attention vers le parasite de mon enfance et lui repose la même question. Comme si des deux autres protagonistes de ce très mauvais roman à l’eau de rose, c’est elle qui avait la science infuse.

- « Elle ? »

Et sans même attendre qu’elle me réponde (ou sans vraiment lui en laisser l’occasion, as you wish) je lui saute une nouvelle fois au cou et me surprend à sauter sur place, manquant de peu de l’étouffer. Ce qui, in fine, aurait pu être mon but premier. Si ce n’est pour ma répétition du elle, elle, elle à tout va. Avant de me surprendre de cette horrible réaction.
Je reprends mon sang froid (pour autant qu’il m’en reste, du sang dans les veines je parle), je lâche Kyo (again), me retourne (again aussi) et dépoussière un peu mon combo legging-sweat-sac-à-patates.

- « Veuillez bien excuser cet engouement totalement déplacé. C’est une perte terrible, mais elle ne concerne pas mon petit Bob. »

Et je lui sers quand même la main pour la remercier de tout ce qu’ils ont mis en œuvre pour sauver ce chien inconnu. Fauchée de surcroit par la plus infâmes des Gweria qu’ait pu connaître cette ville. Je n’aurais pas manqué de lui en faire la réflexion si ce n’est que tout à coup la réalité me rattrape (again une troisième fois).

- « Mais où est Bob alors ? »

Je ne sais pas vraiment à qui je pose cette question.
À qui veux l’entendre je présume.


Dernière édition par Mickaëla Andersonn le Mer 30 Mar - 11:10, édité 1 fois
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Kyoran Gweria
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyMar 29 Mar - 16:11

Immanquablement, l’inévitable sentence tomba. Le chien était mort.

Forcément.

Kyoran n’eut pas le temps de se réconforter à l’idée qu’il n’y avait pas eu de souffrance. Elle était déjà dans l’après. Elle se crispa, attendant le coup à venir. Simultanément, elle sentait les griffes de Micka sur son avant-bras, elle percevait tout son corps qui se tassait sous le poids de la mauvaise nouvelle. L’air venait tout à coup de changer de masse et accablait les épaules, faisait ployer la tête, compressait les poumons. Malgré tout ce qui les opposait, Kyo eut un pincement au cœur pour sa voisine. Elle aurait voulu dire quelque chose, ou avoir un geste vers elle, mais elle n’osait pas s’immiscer dans ce moment. Aussi, dire qu’elle fut surprise quand Mickaëla se laissa tomber contre elle était un euphémisme. Elle se pétrifia un instant, se demandant si elle était sur le point d’être réduite en lambeaux. Mais non. Il n’y avait que du désespoir dans ce geste, assez de tristesse chez la maîtresse en deuil pour qu’elle oublie qui se tenait à ses côtés.
Kyoran l’entoura du mieux qu’elle put. Elle se trouvait maladroite, ne sachant comment soutenir quelqu’un qui la détestait. Bon. Ce n’était pas comme si elle avait beaucoup d’expérience à réconforter des amies non plus, de toute façon. Ses mains pressaient son dos, elle n’osait le frotter de peur que ce mouvement soit de trop et suffise à faire éclater cette étrange trêve. Micka se laissait presque pendre contre elle, elle sentait tout son poids qui ne demandait qu’à s’écrouler. De son côté, elle n’était que tension, pour tenir pour elles deux, et pour réagir quand inévitablement, toute cette situation se retournerait contre elle.

Elle adressa un regard désolé à l’assistante et la remercia d’avoir fait ce qu’ils pouvaient pour l’animal. Une façon polie de s’excuser et d’indiquer qu’elle allait s’occuper de sa compagne.
Mais aussi brutalement qu’elle s’était retrouvée enserrée dans l’étau de chagrin de Mickaëla, elle en fut libérée. Et impossible de dire si c’était une bonne ou une mauvaise chose.


« Vous pouvez répéter ?
-  Elle n’a pas souffert.
-  Plait-il? »


The shit was about to hit the fan. Kyoran enfonça légèrement la tête entre les épaules, par instinct de préservation. Elle était certaine qu’un breakdown était sur le point d’éclater. L’accablement se dissipait pour laisser éclater la colère, la foudre, la vengeance. Et à choisir, elle préférait que sa comparse passe ses nerfs sur la pauvre auxiliaire plutôt que sur elle.

« Elle ? »

Oh non. Son attention était revenue vers elle. C’était donc maintenant qu’elle mourrait dans d’atroces souffrances. Elle eut un mouvement de recul en voyant M la maudite bondir vers elle. Elle s’était raidie en préparation de l’impact, ce qui ne fit qu’ajouter à son déséquilibre lorsque Micka entreprit de sauter de joie en la ligotant comme un jambon. Elle ne comprenait rien, si ce n’est que son intérêt immédiat était de suivre le mouvement, si elle ne voulait pas tomber. Au milieu de cette montagne russe émotionnelle, Kyoran essayait de traiter les informations. Par dessus l’épaule de Micka et entre deux sauts de cabri, elle croisa le regard de l’assistante, aussi confuse qu’elle. La célébration prit fin aussi soudainement qu’elle avait démarré. Décidément, on passait de 0 à 100 en 3 secondes, et inversement. Elle ne se souvenait pas de ce trait de caractère chez sa frenemy.

Lorsque cette dernière prit la parole (pour dire autre chose que des « Elle? Elle! EEELLLE ?!!»), la situation commença à retrouver du sens. Contre toute attente, le chien qu’elle avait percuté n’était pas Bob !

...Bob ? Qui appelle son chien Bob ?

Kyoran se sentit un peu coupable du soulagement qu’elle ressentit à cet instant. Malgré tout, elle avait percuté un chien, et il en était mort. Ce n’était pas une fin heureuse.

« Est-ce qu’elle avait une puce ou un tatouage pour retrouver son propriétaire ?
- Non. Il s’agissait sans doute d’un chien errant, ils pullulent dans le quartier. Il y a des accidents toutes les semaines, mais la plupart ne sont pas amenés au vétérinaire. Vous avez fait ce qu’il fallait. J’imagine que vous souhaitez que l’on s’occupe de la dépouille ? »


Elle hocha la tête, et la jeune fille ne se fit pas prier pour saisir cette excuse pour repartir vers l’arrière-boutique.

« Mais où est Bob alors ? »

Kyoran regardait Mickaëla en coin, comme si elle ne savait pas à quoi s’attendre, après ses dernières réactions imprévisibles. Elle hésitait un peu. Après tout, plus rien ne les liait dans cette histoire. Kyo avait heurté un chien. Micka avait perdu le sien. Aucun rapport entre les deux histoires. Elle pourrait discrètement s’éloigner, profiter de ce répit dans la malédiction pour remettre de la distance entre elles deux. Ni vu, ni connu. Mais elle n’arrivait pas à s’y résoudre. Elle avait vu, elle avait senti la détresse de la jeune femme. Elle en avait même encore la trace sur sa manche. Elle n’avait pas le cœur de la laisser toute seule dans cette situation. Mais elle tergiversait encore. Elle ne savait pas si Micka serait ravie de sa présence et de son aide. Peut-être que l’acte le plus miséricordieux serait de la laisser tranquille, s’effacer de sa vue ?

Si elle partait, elle passait pour une égoïste sans âme. Si elle restait, elle risquait de se faire incendier. Et elle ne préférait pas imaginer si Bob connaissait une fin tragique en sa présence… Il n’y avait que des mauvaises options, et Kyoran était à peu près sûre que quoi qu’elle fasse, sa décision allait se retourner contre elle. Alors perdu pour perdu... Elle retint un petit soupir fataliste.

« Ton chien…. Bob. Tu l’as perdu depuis combien de temps ? Où ? Je… peux peut-être t’aider à le chercher. Si tu veux. »

Elle avait dit cela avec un faux air détaché, des hésitations plein la voix, et sans vraiment oser soutenir le regard de son interlocutrice.

« Non mais vraiment… si ça peut t’aider, genre pour couvrir plus de terrain ou quoi… Il ressemble à quoi? Tu as une photo ? On peut peut-être demander au véto déjà s’ils l’ont vu ? »

Ces paroles pleines de virages et de pauses ne ressemblaient pas du tout à Kyoran. Elle se faisait toute petite. Elle se donna une contenance en revenant sonner au comptoir. Après un moment d’attente (durant lequel elle se fit violence pour ne pas s’acharner sur la clochette, encore et encore), l’assistante revint, visiblement méfiante et un peu déçue de voir qu’elles étaient toujours là. Mais non, elle n’avait pas vu un chien correspondant à la description de Bob.
Kyoran sortit un billet de son sac et le glissa sur la banque d’accueil. Ça devrait couvrir les coûts pour Not-Bob. Elle allait laisser son numéro de téléphone, lorsqu’elle se rappela du sort funeste de l’appareil. En quelques pas lestes, elle le récupéra. Écran fendu, et il ne semblait plus s’allumer. Great. Elle le glissa malgré tout dans ses affaires : à Downfall, rien ne se jette, tout se répare. Elle commençait doucement à intégrer les codes de sa nouvelle ville et à en developper de nouvelles habitudes.
Elle se retourna à nouveau vers sa compagne d’infortune.

« Il y a un parc pas loin, peut-être… ? Ou un lieu où vous avez l’habitude d’aller et dont... Bob aurait pu retrouver le chemin tout seul ? »

Elle avait beau essayer de faire un effort, elle ne pouvait pas s’empêcher de marquer un temps d’arrêt à chaque fois qu’elle devait dire son nom. Elle commençait déjà à s’imaginer en train de crier “ BoooooooOOOOBBB ? BOOOOOOBBBBB ! " dans tous les recoins de Downfall, et voir tout un tas de péquenauds lever la tête vers elles. Ca allait à coup sûr lui valoir tout un tas d’emmerdes.

___________
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyVen 8 Avr - 7:18

L’adrénaline retombe aussi rapidement qu’elle m’a été shootée dans les veines à la base. Vous savez bien, ces histoires à coucher debout sur les mères capables de soulever la carcasse d’une camionnette en feu pour sauver le gosse (leur gosse) enfermé dedans comme par le plus grand hasard des choses. C’est EXACTEMENT ça ! Et quand je pense à ce que je serais capable de déplacer comme montagne pour un chien (car appelons un chat un chat, même s’il s’agit clairement d’un clébard) ; l’Everest n’a qu’à bien se tenir pour le jour où j’aurai un enfant. Où j’aurais pu avoir un enfant. À l’enfant que j’aurais pu avoir …
Cette pensée m’agrippe tout à coup les tripes. Et pas qu’un peu. J’avais pourtant réussi à la renflouer tellement loin dans un fin fond tiroir de mon subconscient que le meuble avait fini par prendre la poussière. Il faut croire que l’adrénaline ça ne réveille pas que les instincts désirés, mais également ceux désireux de sortir. Et, il va sans dire, que l’indésirable présence à mes côtés ne m’aide pas à me concentrer. À bien y réfléchir, c’est clairement elle l’origine de tout ce mal. Enfin, pas que elle. Mais en grande partie quand même. Et elle le SAIT !

Elle a beau jouer les bons samaritains à l’encontre de cette inconnue, ça ne prend pas avec moi. Quand elle pose la question sur la puce ou le tatouage, je la soupçonne vaguement de ne pas en être à son premier carnage. Ce qui, il en va de soi, ne m’étonnerait même pas. Comme si l’univers avait pu se contenter de m’attribuer sa seule poisse. Il a dû probablement piocher dans un chapeau géant (pourquoi pas un choixpeau tiens, prends ça dans les dents Rowling, on sait d’où tu tiens tes sources !) et au petit-bonheur-la-chance c’est bibi qui a écopé du jackpot. Mais non loin de s’en contenter, pourquoi ne pas partager ? Du moins, c’est ce que j’espère secrètement. Si une main invisible perchée tout en haut derrière les nuages m’a attribué à moi et moi seule tout le poids de cette Gweria … non, mieux ne vaut pas tâter ce terrain. Je risque de me fâcher.
Déjà qu’il va falloir que je brûle tous les vêtements que je porte et que j’aille me désinfecter au dettol ou carrément à la javel. Je n’aurais pas dû toucher le nuisible. Mais vous savez ce qu’on dit, dans le feu de l’action …
Satanée adrénaline !

Lorsque les mots me sortent naturellement de la bouche (il est déjà trop tard que pour les ravaler), elle se sent concernée. Ce qui n’est pas étonnant en soi. Et rajouter à ça que mon corps (ce traitre) s’est tourné vers elle. Mais qu’est-ce qu’il lui prend à celui-là ? Fichtre, si on ne peut déjà plus compter sur ses propres supposés alliés, où va le monde ?!
Question très ironique à poser dans une ville tel Downfall. J’en conviens.

Je la vois peser le pour et le contre de ma … proposition ? En était-ce seulement une ? M’est avis que c’était seulement une question. Un point d’interrogation pour rompre le silence. Mais comme je viens de le constater avec mon propre corps, voilà que ma bouche se met également à copiner avec l’ennemi. Je lève les yeux au ciel. Du moins c’est ce qui se passe dans ma tête. Car il est clair qu’il n’y a plus aucune coordination dans mes paroles et mes gestes. Ou plutôt : il y en a entre les paroles et les gestes ; mais pas en accord avec les pensées. Ce serait vraiment un cas clinique très intéressant à analyser. Mais gardons le plaisir pour plus tard. Attaquons-nous d’abord aux choses urgentes. Partiellement induites par l’adrénaline qui a débordé de mes veines. C’est la seule explication plausible que je peux avancer. Du moins, pour le moment.

Le pour et le contre.
Le contre et le pour.
Elle va bien finir par se rendre compte que la meilleure option reste la fuite, non ?
Et je ne lui en tiendrais aucunement rigueur. Même si les conventions sociables n’en attendraient pas moins. Certes, mais lesdites conventions ne connaissent clairement pas Kyoran Gweria. Sans quoi elles lui auraient d’ores et déjà signé le bon de sortie, sans passer par la case start – ou prison ; as you wish.

Voilà que sa bouche s’ouvre et qu’elle baragouine des mots les uns à la suite de l’autre. Je dois lui accorder un regard suspicieux à ne guère en douter. Elle semble avoir les mêmes soucis de coordination interne que moi. Ça tombe c’est quelque chose qui circule dans l’air. Il y a pas mal de zoonoses qui doivent trainer dans un cabinet véto. Pour notre défense, nous n’y sommes pour rien dans toute cette mascarade de mauvais goût.

Elle veut, elle ne veut pas.
Elle ne veut pas, elle veut.
Je confirme, ça doit dérailler sec dans sa caboche à elle aussi.
Nous voilà embarquées dans le même bateau.
L’ironie n’en démord clairement pas aujourd’hui.
Nous sommes vouées à vaguer et divaguer ensemble.
Pour le meilleur.
Et assurément le pire.
Si j’avais un verre, je trinquerais volontiers à cette saloperie d’entourloupe du destin.
Quelqu’un est VRAIMENT en train de jouer au twister là-haut.

- « Une photo? »

Non mais genre, est-ce que j’ai une tête à prendre une photo de mon chien ? Qui plus est, ça aurait bel air avec l’énergumène en question. Bob couché sous la table de salon. Bob couché sur la table de salon. Bob couché dans le canapé. Bob couché dans le lit. Là clairement il aurait déguerpi fissa avant même que j’arrive à immortaliser le moment. Ce chien devait fort probablement être un chat dans une vie antérieure. Il roupille vingt heures par jour et il arrive encore à faire ses nuits. Je le suspecte d’ailleurs de siphonner secrètement les heures de sommeil qui me reviennent de droit. Il faut dire qu’avec sa gueule d’ange il a eu tôt fait de persuader Morphée que c’était incontestablement lui le maître de la maison. Enfin, de l’appart. Mais on se comprend.
Je m’égare. Revenons donc à notre mouton, aussi connu sous le nom de brebis noire (j’aurais pu dire galleuse, mais nous n’en sommes pas encore là dans notre relation … quoi que).

- « Non. »

Que je juge utile de rajouter. Comme si elle pouvait encore en douter. Mon téléphone ne sert que pour des raisons professionnelles. Pas de photos. Rien de perso. Rien qui de près ou de loin pourrait relier qui que ce soit de l’extérieur (je ne vise personne en particulier *hum *hum) à ma position actuelle. Je ne suis inscrite sur aucun site, sur aucun réseau social et je ne suis joignable que par des numéros avec reconnaissance et identification à la clé. Si je vais me laisser attendrir par une bouille de Bob à immortaliser, elle se fourre le doigt dans l’œil. Si elle pouvait l’enfoncer bien loin, limite ça m’arrangerait. Mais ne cédons pas à la facilité des rêves éveillés.
Qui plus est, je le vois tous les jours. Je sais parfaitement à quoi il ressemble et ce sous tous les angles … ce qui est un peu malsain comme phrase, sortie de son contexte. Soit ! Il n’y a absolument aucune raison qui justifierais que je le prenne en photo. Il sera toujours là demain. Et après-demain. Sauf bien sûr, si quelqu’un envisage de l’écraser. Là non plus, je ne vise personne.

- « C’est un Staffordshire terrier bleu au poitrail blanc. Court sur pattes. Il avoisine les vingt-cinq kilos. Musclé sans être gros. Mais n’allez pas lui dire que ça vient de moi sans quoi il va porter plainte pour négligence auprès du syndicat des toutous. Et il porte un harnais orange fluorescent. Enfin … il le portait en sortant de chez nous. »

Chez nous. Comme c’est étrange de dire ça …

- « C’était il y a une grosse demi-heure à tout casser. »

J’ai complètement perdu l’heure de vue. Combien de temps j’ai roupillé ? Combien de temps j’ai passé à le chercher ? Depuis combien de temps on traine ici ? Le temps a cette fâcheuse tendance à se tordre quand on est en présence l’une de l’autre. Mais toi aussi tu as dû le remarquer, non ?
Tandis que je lui lance ce regard sous-entendant ma pensée, il semble y avoir un quiproquo car là voilà déjà en train de trottiner jusqu’au comptoir où une petite sonnette de comptoir de motel lui fait l’honneur de l’accueillir. Une fois. Rien. Tic. Tac. Deux fois. Toujours rien. Tic. Tac. Je la vois qui se dandine à l’image de quelqu’un qui s’accorderait bien une petite pause technique. Je ne relève pas l’info. Après quelques tic-tacs supplémentaires, notre précédente interlocutrice commune se présente à nous. Son regard semble à la fois déçu et exaspéré, voire excédé. Je peux le comprendre. Kyoran a tendance à avoir le même effet sur moi.
Quelques mots s’échangent, mais la description de Bob (qui a déjà évolué, ça s’appelle la magie du bouche-à-oreille) ne lui évoque rien. J’ignore si c’est une bonne ou une moins bonne chose. Mais ça devra attendre plus tard. Au plus on traine nos carcasses ici, au plus le risque est grand que quelqu’un d’autre le fauche. Enfin, je dis ça … mais tant que j’occupe la Gweria à l’intérieur, elle ne risque pas de foutre le boxon à l’extérieur. Et encore, ça c’est la théorie. Ce pays où il fait bon vivre sur papier.

- « Il y a un parc oui. C’est là que je l’ai perdu de vue. »

Que je l’ai perdu tout court, mais je m’abstiens bien de partager cette information. Elle n’a pas besoin de savoir que je suis une maîtresse indigne et ingrate. Une insomniaque qui a préféré prendre le risque de s’endormir sur un banc plutôt que de penser au bien-être de son animal. Inconsciemment j’ai resserré mes doigts en poings. Je le remarque car mes ongles s’enfoncent dans mes paumes et ce n’est pas la sensation la plus agréable de la journée.

- « On a débarqué il n’y a pas si longtemps que ça. Ça m’étonnerait que Bob retrouve seul le chemin jusqu’à l’appart. »

Il faut dire que monsieur n’est pas vraiment une flèche en géographie. Tel chien, tel maître à ce qu’on dit …
Est-ce que je ne viens pas juste de lui dévoiler un peu trop sur ma vie privée ? Et c’est quoi ce petit rictus en coin à chaque fois que son nom tombe ?

- « Quoi ? »

Je lui jette ce regard noir qu’elle a pris l’habitude de récolter de ma part. À se demander comment on a pu être proches dans le passé. Un passé très TRÈS lointain.

- « Qu’est-ce qui te prend de bégayer ainsi ? C’est toi qui me porte la poisse et non l’inverse je te signale. Et ça m’étonnerait que la donne ait changé sous simple prétexte qu’on a traversé le mur. »

Sans quoi j’aurais déménagé depuis perpette-lez-bains et même que je t’aurais embarqué dans ma valise King size ! Pliée en quatre dans la soute à bagages. Avec un petit passage clandestin via le réseau sous-terrain. Non pas que je ne sais pas me payer le billet officiel (et toi non plus d’ailleurs), mais juste pour le plaisir de tirer le trajet en longueur.

- « Si tu n’as pas envie de te salir encore plus les mains, ce n’est pas moi qui vais te retenir. La porte est là. »

Et je joins un petit signe de la tête à la parole. Bon au moins l’équilibre est rétabli entre ces deux-là. Mais pour combien de temps encore ?
Et sans attendre sa réaction, je la dépasse et me dirige moi-même vers la sortie. En la frôlant (sans pour autant la toucher, un contact physique par décennie ça suffit clairement et aujourd’hui j’ai déjà pas mal abusé de la chose), je ne me gêne pas pour rajouter un :

- « Je te dirais bien que ça m’a fait plaisir de te revoir, mais ce serait hypocrite de ma part de te mentir. Fais attention à toi et sur ce qui traverse la route surtout. »

Un brin de politesse n’a jamais tué personne. Ce qui est bien dommage.
Mais outre le fait qu’entre elle et moi ça ne passe bien, je n’ai pas particulièrement envie de lui souhaiter de mauvaises choses. Elle vit sa vie comme elle l’entend, tant que c’est loin de moi.
Et sur cette pensée, je sors au grand air et me dirige à nouveau en direction du parc.
Là où tout a commencé.
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Kyoran Gweria
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyVen 8 Avr - 20:45

Staffordshire terrier. Staffordshire terrier. Staffordshire terrier. Kyoran se répétait mentalement le nom de la race pour essayer de l’imprimer dans sa mémoire. Elle n’avait pas la moindre idée d’à quoi ça pouvait ressembler, un Stafford terrier. Mais à défaut d’une photo, elle essayait de mémoriser chaque détail que lui donnait Mickaëla. Bleu ? Elle n’y connaissait rien en chien, mais même avec ses maigres connaissances, elle se doutait bien que cette information n’était pas littérale. Poitrail blanc. Enfin une information qu’elle pouvait visualiser. Court sur pattes, mais vingt-cinq kilos. Ok, on ne cherchait pas non plus un chihuahua. C’était une bonne nouvelle : la cible était plus grosse, plus facile à repérer. Harnais orange.

Stafford terrier, poitrail blanc, vingt cinq kilos, pas très haut, harnais orange. Elle récitait intérieurement le descriptif tandis qu’elle tapotait impatiemment la sonnette du comptoir. L’échange avec l’assistante fut bref cependant. Ils n’avaient pas soigné ou vu de chien de cette race aujourd’hui. Elle proposa sans entrain d’afficher une photo du disparu sur un panneau en liège qui croulait déjà sous les annonces et flyers. Gweria déclina la proposition sans rien ajouter. Quel propriétaire d’animal n’a pas au moins une photo de son compagnon à quatre pattes ? Elle n’aurait pas été étonnée s’il s’agissait d’un natif de Downfall ou d’un habitant de longue date. Après tout, ils n’ont pas grandi avec la même abondance de technologie et de superflu, et n’ont pas toujours les moyens de se procurer un boîtier ou un téléphone avec appareil photo. Mais une ancienne new-yorkaise ? Même sans être une instagrameuse, cette absence absolue de photographies la laissait songeuse. Elle tentait de relativiser : après tout, elle ne prenait pas tant de photos que ça non plus. Mais elle, elle n’avait pas de Bob à photographier.

Même bredouille, Kyoran était bien déterminée à se mettre à la recherche du canidé. Toutes les informations étaient donc précieuses pour décider de la suite des opérations. Elle l’avait perdu dans un parc. Si ça se trouve après un petit tour il y était revenu. Même si ça n’avait guère d’importance pour leur quête actuelle, elle ne put s'empêcher de noter que Micka avait rejoint Downfall récemment, elle aussi. Était-ce sa malchance qui l’avait menée ici ? Le destin ne semblait pas prêt à renoncer à leur binôme bancal. Elle esquissa malgré elle un léger sourire en coin devant l’ironie de leurs chemins qui ne cessaient jamais de se faire des croche-pattes.

« Quoi ? Qu’est-ce qui te prend de bégayer ainsi ? C’est toi qui me porte la poisse et non l’inverse je te signale. Et ça m’étonnerait que la donne ait changé sous simple prétexte qu’on a traversé le mur. »

La morsure de ce “quoi” et du regard qui l’accompagnait suffit à rappeler à Kyoran qu’il ne s’agissait pas de retrouvailles entre vieilles amies. Les effusions de la psy un peu plus tôt n’étaient que des moments de faiblesse, où son désespoir avait un instant éclipsé la haine et la rancœur. Mais il ne fallait pas s’y tromper. La tirade qui suivit ramena encore davantage Kyo à la réalité. L’attaque n’était même pas voilée, et elle se sentit soudain stupide d’avoir cru pouvoir lui proposer son aide et obtenir une réponse différente. Tout à coup, la culpabilité s’évapora, piquée par l’acidité des mots qui lui étaient adressés. Elle avait bien conscience de sa qualité de porte-malheur et elle en était la première désolée. Mais elle savait aussi pertinemment qu’elle n’avait jamais volontairement essayé de nuire à Mickaëla. Et ce n’était pas faute de tenter de se faire discrète, ou de vouloir aider et réparer les dégâts. Elle était prête à faire bien plus d’efforts avec elle qu’avec quiconque, elle prenait des pincettes, se faisait petite, s’excusait de choses dont elle n’était pas réellement responsable, au fond. Mais cette pénitence avait ses limites. Elle savait qu’elle ne méritait pas autant de fiel.

« Si tu n’as pas envie de te salir les mains, ce n’est pas moi qui vais te retenir. La porte est là. »

Kyoran ne put retenir un petit rictus. Se salir les mains. Si elle savait à quel point elle n’avait pas de mal à se salir les mains, elle ne lui parlerait peut-être pas sur le même ton. Elle faillit siffler que ce n’était pas elle qui avait perdu son chien. Mais elle retint finalement son venin. Non par charité, mais parce qu’elle valait mieux que de s’abaisser à ce genre d’attaque facile.
Les sourcils légèrement levés, d’un air de défiance, elle resta bien plantée là où elle était. Elle ne comptait pas prendre la porte parce qu’on le lui ordonnait.

“C’est toujours plus facile d’accuser les autres ou la poisse, que de prendre ses responsabilités, j’imagine.”

Toute hésitation dans la voix, toute attitude douce et docile avaient disparus. Kyoran était rendue à elle-même. Avec un calme qui sous-entendait l’indifférence, elle ne lachait pas l’autre brune, qui se dirigeait finalement vers la sortie.

Elle hocha la tête sarcastiquement, avant de hausser les épaules. L’air de dire “si ça te fait du bien de vider ton sac ma pauvre, fais toi plaisir”. Elle se targuait de ne pas être hypocrite, tout ça pour être passive-agressive. Pas sûre qu’on gagne au change.

“Et bon courage à toi pour retrouver Bob.”

Le nom ridicule résonnait encore dans l’air quand la porte claqua derrière Mickaëla. Kyoran expira bruyamment, pas mécontente que cet échange soit terminé. Elle relâcha ses épaules puis fit demi-tour pour récupérer son sac. Du coin de l'œil, elle aperçut une mèche de cheveux et un front qui disparurent prestement à l’angle d’un mur, derrière le comptoir. L’assistante du vétérinaire n’était pas d’une grande aide, mais visiblement, elle trouvait le drama des deux new-yorkaises particulièrement divertissant et n’en avait pas perdu une miette.

Quelques secondes après, elle sortait à son tour. Elle pouvait deviner la silhouette de l’autre psycho, déjà loin. C’était très bien comme ça. Après tout, pourquoi aurait-elle dû perdre encore plusieurs heures à chercher un foutu clébard, alors qu’on lui parlait comme à un chien ? Pourquoi avait-elle voulu rendre service à cette femme qui n’avait que de la véhémence à son égard ? Ce n’était pas son problème. Bon débarras.

Elle s’engouffra dans la voiture (qui par miracle n’avait pas été volée) et jeta un regard à l’horloge. Définitivement trop tard pour rattraper le rendez-vous loupé. Mais elle allait rejoindre son bureau tout de même, elle avait des coups de fil à passer et maintenant qu’elle n’avait plus de portable… Elle n’était pas bien loin de toute façon.
Mais tandis qu’elle mettait le contact, elle sentait que son agacement ne se diffusait pas mais semblait au contraire s’engluer en elle. Elle peinait à passer à autre chose et à se recentrer sur la suite de sa journée. Elle se repassait l’échange, et non, décidemment, plus elle y pensait plus elle pestait. Elle était irréprochable dans cette histoire. Bon… Si on ne comptait pas Not-Bob. Mais c’était un accident. Ce n’était pas comme si elle roulait à fond la caisse dans le seul objectif de renverser tous les cabots qui croisaient sa route ! Elle se demandait tout de même si un autre maître quelque part était dans la même panique que Mickaëla, en train de chercher la pauvre chienne. Au mieux, il ne saurait jamais ce qui était arrivé à son animal. Au pire, il trouverait le renseignement auprès du vétérinaire. Ou l’inverse. Elle ne savait pas ce qui était le mieux, entre savoir ou rester dans l’ignorance.
Mais non. Il s’agissait probablement d’un chien errant. C’est ce que l’assistante lui avait dit, non ? Oui, voilà. Ça restait triste, mais au moins il n’y avait pas un humain désespéré en train de quadriller le quartier en criant “Claudette ! Claaaaudeeettte???”.

Kyoran conduisait attentivement, mais les dents serrées. Tout son corps était tendu, et elle se rendit bientôt compte que malgré elle, elle roulait au pas. Que malgré elle, elle jetait des petits regards de droite et de gauche. En partie pour s’assurer qu’aucun autre chien n'avait la brillante idée de traverser juste sous ses roues. En partie pour voir si elle n'apercevait pas un…quoi déjà ? Un… Strandford Terrier bleu, avec du blanc sur le poitrail, et un harnais orange.

Elle bougonnait derrière le volant. Non, Mickaela ne méritait pas son aide. Mais… Si elle retrouvait son chien, ça lui fermerait peut-être un peu le clapet. Il ne faut jamais sous-estimer ce qu’on peut accomplir par pure mesquinerie et esprit de contradiction. Animée de cette nouvelle motivation, elle abandonna l’idée de se rendre au travail. Ca attendrait. On n'était plus à ça près. Elle avait un chien à retrouver et une guigne à contredire.
Elle fit plusieurs tours dans les rues adjacentes, repéra le parc mentionné plus tôt. Elle était aux aguets, mais sa recherche n’était pas très fructueuse. Elle vit des chats, des chiens en laisse qui traînaient derrière eux leur propriétaire, des punks à chien, sans chien. Elle s’arrêta plusieurs fois pour demander à des passants s’ils avaient vu un Strandford Terrier bleu au poitrail blanc. La plupart répondirent d’un hochement de tête négatif, sans arrêter leur marche. D’autres s’étonnèrent, rapportant qu’une autre personne leur avait demandé la même chose.

Elle espérait ne pas recroiser l’autre mégère. Visiblement, elle n’était pas loin.

Quelques minutes après, il lui sembla repérer un animal entre deux véhicules. Il flânait sur le trottoir, le nez à l’air. Elle ne le voyait que de façon intermittente, mais il semblait correspondre à la description, au moins pour le gabarit. Pas de trace du harnais, mais après tout, Mickaëla n’avait pas l’air bien sûr et puis il avait pu le perdre entre-temps. Fenêtre ouverte, elle tenta un “Bob?” interrogatif. Le chien leva fièrement sa truffe, se tournant vers elle, exhibant au passage un cou blanc qui tranchait avec le reste de sa fourrure sombre. Kyoran arrêta sa voiture avec joie, prête à célébrer. Putain elle l’avait trouvé ! Ça allait lui en boucher un coin à l’autre taupe !

Elle se pencha en travers de l’habitacle pour ouvrir la portière côté passager. Elle allait sortir pour venir à sa rencontre mais visiblement, ça ne serait pas nécessaire : d’un bond, il avait rejoint le siège à ses côtés, la regardant avec attention. Sa langue pendante commençait déjà à dégoutter lentement sur le tissu. Finalement, ça avait du bon d’avoir une voiture de l’occasion !
Kyoran le câlina avec enthousiasme, comme si elle le connaissait depuis toujours, et l’animal lui rendit la même politesse.
Passée la satisfaction de cette réussite, la brune resta cependant à l’arrêt un moment. Et maintenant quoi ? Elle n’avait plus de portable, et ce n’était pas comme si elle avait le numéro de Micka, de toute façon. Revenir au vétérinaire ? L’idée semblait logique, après tout. Mais non, elle n’allait pas amener un deuxième chien là-bas, la même journée. L’assistante devrait se trouver un autre feuilleton.

Après quelques hésitations, elle se mit à la recherche d’une cabine téléphonique. Et oui, dans cette ville technologiquement en retard, ces vestiges du passé existaient toujours. Ça ne voulait pas dire qu’ils marchaient pour autant. Mais Kyo eu de la chance sur ce coup. Une veine qui se doubla quand son appel aboutit, quelque part à Brooklyn.

“Allo ? C’est pour quoi ?
- Gab’, c’est moi.
- Kyo ? C’est quoi ce numéro, t’as encore pété un portable ?
- Ouai, je t’appelle d’une cabine, je t’expliquerai. Mais j’ai pas beaucoup de temps là, et j’aurais besoin que tu me rendes un service. T’es devant ton pc ?
- Tu me connais ! Faudra que je te montre, j’ai débloqué un nouvel item dans Carmin Odyssey, je suis entrain de rouler sur l’équipe adverse ils comprennent rien à ce qui leur…
- Gab’.
- Yep, pardon. Attends. Voila. Qu’est-ce que je peux faire pour toi?
- Tu peux me trouver l’adresse de quelqu’un, ici à Downfall ?
- T’as besoin de poser la question ? Je pourrais presque me vexer. Shoot !
- Mickaëla Andersonn.”


Kyoran entendit des touches de clavier s’activer, quelques secondes de silence.

“ J’ai ! T’as de quoi noter ?”


Après une nouvelle virée en voiture, elle se retrouva au pied de l’immeuble indiqué, non sans satisfaction. Puis sur le palier de sa vieille connaissance, accompagnée de son chien, qui la suivait avec une facilité déconcertante. Elle lui avait donné de l'eau un peu plus tôt, ça semblait avoir suffit à sceller leur amitié.
Maintenant, il ne restait plus qu’à attendre. Impossible de savoir combien de temps allait passer avant que la locataire revienne chez elle. Mais Kyoran était bien déterminée à l’attendre. Elle s’installa en tailleur, le dos contre le mur à côté de la porte. Bien vite, Bob vint se coucher contre elle, posant sa grosse tête sur sa cuisse.

Ils patienteraient le temps nécessaire.

___________
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyVen 15 Avr - 7:29

Au moins elle a récupéré un peu de répartie avant que je ne la dépasse et lui fausse compagnie. Non pas que je m’inquiétais d’une manière quelconque de sa santé mentale, mais ce bégaiement était vraiment, si pas déplacé, au moins louche. Comme si quelque chose clochait. Comme si elle essayait de me cacher quelconque chose. Mais quitte à devoir m’avouer qu’elle avait vraiment écrasé Bob et abandonné son corps quelque part dans son sillage, autant le faire en présence d’un témoin. Soit-il réticent. Parce qu’il n’y a pas à dire, la politesse et la bienséance de cette assistante frôlaient vraiment à peine le politiquement correct. Quand bien même elle réside à Downfall, là où le drame a eu lieu. Enfin, ce ne sont là que des présomptions. Vu que madame n’est pas passée aux aveux et a finalement réussi à reprendre le dessus de son état émotionnel. Je ne l’imaginais vraiment pas prendre tellement à cœur le fait de percuter quelqu’un ou quelque chose. Peut-être bien que c’est l’effet quelque chose. Car le quelqu’un lui aurait assurément arraché moins de culpabilité. Sauf si ce quelqu’un avait été un enfant.

Mais qu’est-ce qui peut bien me prendre de penser à des atrocités pareilles ? In fine, tout le malheur du monde n’est pas (in)directement due à la présence d’une personne. Soit-elle Kyoran Gweria. Ni même tout le malheur de mon monde. Et si je dois être parfaitement honnête, même pas le quart de la moitié que j’ai tendance à lui imputer. C’est plutôt qu’elle est systématiquement la mauvaise personne au mauvaise endroit. Ou même carrément la bonne personne au mauvais endroit. Car à force de se trouver toujours là où il ne faut pas au moment elle aurait mieux fait de s’abstenir, bah bingo ; elle écope du mauvais rôle à tire larigot. Et je suis bien la première à l’affubler de cette réputation. Est-ce je dois pour autant avouer qu’elle n’a pas tort dans ses dernières paroles ? Bien sûr ( !) que c’est plus facile d’accuser les autres. C’est d’ailleurs plus vivable aussi. Si j’étais vraiment la seule responsable de toute la poisse que je traine derrière moi, est-ce que je n’aurais pas mieux fait de me tirer une balle il y a de nombreuses années déjà ? Qui te dit que je n’ai pas essayé ? Mais j’avais tellement peur de me rater. Imaginez un peu ce qu’il aurait pu m’en coûter …

Non, il est clair que je ne vais pas lui avouer ça. Ce serait là carrément lui offrir sur un plateau d’argent des excuses pour ces années de supposée maltraitance. Elle serait bien fichue de me facturer des intérêts et des dommages collatéraux. Désolée cocotte, mais pour ceux-là j’ai déjà donné. Et pas qu’un peu. C’est peut-être ça mon retour de karma après tout?
Est-ce que ça changerait pour autant si on enterrait la hache de guerre ? Est-ce que la roue arrêterait pour autant de tourner ? J’espère que tu me permets d’en douter.

Tandis que je rumine et que je rumine et que je rumine encore, je retourne en arrière sur le chemin précédemment emprunté au petit trot (pour ne pas dire autre chose). C’est clairement plus facile à un rythme plus en accord avec ma condition physique. Condition qui commence sérieusement à manquer d’adrénaline. Et de sucre. La faute à ne pas avoir déjeuner. Mais si c’est pour ne rien garder, est-ce que ça vaut vraiment la peine de gaspiller ? Surtout dans une ville avec une telle précarité ? Plutôt donner que de jeter. Mais donner à qui ? Donner comment? Et si possible en évitant de me faire coller une étiquette qui me vaudra à coup sûr des visites aussi imprévues que impromptues.

Je me secoue légèrement la tête (pas trop fort non plus, sinon je risque de perdre l’équilibre et de me vautrer à terre, en pleine pâture aux vautours du parc) pour dissiper les idées et m’éclaircir l’esprit. Il faut que je me concentre sur mon objectif premier à savoir, trouver Bob. Mais où est-ce qu’il a bien pu passer ? C’est bien la première fois qu’il me fait ça. Pas de prendre la poudre d’escampette, on s’entend bien. Mais de s’éloigner si loin et si longtemps. À New York j’avais carrément le droit de lui retirer sa laisse qu’il restait collé à mes basques comme une sangsue. Pas moyen de faire trois pas sans manquer de tomber car il se tortillait entre mes jambes en mouvement. Soit il a vu quelque chose qui l’a intrigué plus que moi (est-ce que je dois me prendre une claque en pleine face là ?), soit quelqu’un me l’a kidnappé. Bob-nappé je dirais même. Ce qui pourrait être plausible, si monsieur n’avait pas été un chien battu. Du coup, la confiance et lui ça fait trouze-mille. Mais il suffit que le bobnappeur ait été une jolie fille. Ou un bobnappeur accompagné d’une jolie bidoche à quatre pattes. Même si monsieur est castré. Même si monsieur est bien éduqué. Comment refuser? Micka zéro – les forces de la nature bonus plus douze.

Entre-temps j’ai retrouvé le parc (sans même me tromper une seule fois, voyons l’effet de la maternité sur certain(e)s !) et je m’y engouffre en quête de … mais de quoi au juste ? De Bob lui-même ? D’indices pouvant me mener à son lieu de détention ? D’autres fausses pistes qui vont me ramener au cabinet vétérinaire car Kyoran n’est pas le seul danger public qui circule sur les routes actuellement ? Je soupire intérieurement rien qu’à l’idée que la probabilité que je perde une bonne partie de ma journée augmente de pas en pas. Théoriquement j’aurais déjà dû le trouver mon chien. Mais vous avez ce qu’on dit sur la théorie …

Allez Micka on se reprend !
C’est Bob quoi!
Un petit effort que diable!

Et c’est exactement ça qu’il me faut pour me rebooster. Je me tiens droite, j’inspire un grand coup et je me lance à sa recherche. ON Y CROIT !

~.~

Mouais … on y a cru surtout. Pas très concluant cette quête du Saint Bob. J’ai dû accoster toute la population de Downfall qui a eu le malheur ne serait-ce que de s’approcher du parc. Parc qui n’est d’ailleurs pas des plus petits. Certes pas comparable au bon vieux Central Park (et encore heureux, mes aïeux !), mais qui représente tout de même une superficie non négligeable. J’ai les mollets en feu. J’ai fait mon quota de sport pour les trois mois à venir. Dois-je remercier Bob pour autant ? Non parce que je ne l’ai toujours pas trouvé et que les gens ont commencé à me reconnaître à force de se faire aborder. Je n’ai récolté que des signes négatifs de la tête. Parfois compatissants, parfois clairement hostiles. J’ignore encore lesquels sont les pires.
J’aurais pu continuer encore quelques heures. Fait est que je n’ai plus la force physique pour le faire. Ces quelques nuits de sévère insomnie et le manque de matière dans le corps commence à se faire ressentir. Puis vu le nombre de fois que j’ai fait le tour du parc, ça m’étonnerait que Bob soit encore là. À moins que depuis le début il me suit comme un gentil petit toutou et qu’en fait il se trimballe derrière moi. Même si je suis loin d’être persuadée par cette théorie (tiens, encore une !) du complot, je me retourne tout de même pour vérifier. Ne sait-on jamais. Mais non. Rien. Niks. Noppes. Que-Dalle.

Traînant un peu des pieds (j’avoue) je finis par rentrer à l’appart. Je rumine des et ci par-ci et des et ci par là. Et s’il m’attendait près du banc où je l’ai perdu ? Et s’il avait réussi à être ramené à la clinique vétérinaire ? Et s’il s’était perdu ? Et s’il se persuadait doucement que je n’allais jamais le retrouver ? Et s’il s’était désormais mis en tête que je n’avais jamais ne serait-ce commencé à le chercher ?! Bon bon d’accord, tout ça c’est de l’antropomorphisme pour les nuls. N’empêche que dans des cas pareils c’est rarement la logique et la raison qui prennent le relais. Que du contraire même. À chaque pas qui me rapproche de l’appart, et m’éloigne donc du parc, je sens comme un poids supplémentaire s’ajouter au-dessus de ma tête. S’installer sur mes épaules. Le tout prêt à m’écraser à terre, face première. Et j’en viendrais presque à penser que c’est exactement ce que je mérite.

Je pousse la porte du bâtiment et commence à gravir les escaliers. Vraiment plus par habitude que par conviction. Tout dans mon langage corporel doit crier haut et fort à qui veut le voir que la dépression me pend au-dessus de la tête tel le petit nuage de Olaf. Mais en plus gris (peut-être même tirant sur le noir) et plus menaçant. Lorsque j’arrive à mon étage, un bruissement attire mon attention. Pas quelque chose de foncièrement bruyant, mais juste assez que pour déclencher mes reflexes de première nécessité. Et qu’elle n’est pas ma surprise lorsque je découvre un chien devant la porte de mon appartement. Le port fier, la langue pendante, la queue qui danse la java. Mais ce n’est pas lui qui attire mon attention, du moins pas mon attention principale. Ce sont les deux jambes qui dépassent de la masse et qui finissent par relever (et révéler) leur propriétaire. La colère me monte aussi vite que la panique. Nouveau shot d’adrénaline ! Je ne sais pas combien mon corps peut encore en supporter, mais il semble s’en foutre comme de sa première petite culotte. Ni une ni deux je fonce en leur direction, plongeant par la même occasion ma main dans ma poche pour y agripper mes clés.

- « Qu’est-ce que tu fous ici bordel ?! »

Que je marmonne entre mes dents tandis que je glisse la clé (je dois m’y reprendre à deux fois) dans la serrure et ouvre la porte (un peu brusquement). Le chien s’y engouffre sans demander son reste et moi j’attrape mon invitée surprise (pour ne pas dire autre chose) par le coude et l’invite à sa suite.

- « Quelqu’un t’as vu?! »

Que je grogne plutôt que je ne parle. Tandis que je la pousse un peu (*hum) à l’intérieur je scrute quand même le hall des deux côtés pour m’assurer de … mais de quoi au juste ?
Je referme aussitôt la porte dans mon dos, me débarrasse de ma veste que je pends au crochet prévu à cet effet avant d’entamer les cent pas là où beau mes jambes veulent bien me porter.

- « Si elle m’a trouvé aussi facilement, il pourra aisément en faire de même. Peut-être même qu’il est déjà en route. Est-ce que la ligne était seulement sécurisée ? Et si elle a épelé mon nom ? Et si elle a utilisé l’ancien ? »

Les questions et les suppositions fusent dans tous les sens, même si je ne m’adresse pas directement à elle. Comme si elle n’était même pas dans la pièce avec moi. Ce que je prends quand même le temps de vérifier. Je remarque que le chien a disparu de mon champ de vision. Ou plutôt, je l’entends qui déménage les gamelles dans la cuisine. Je m’arrête, au beau milieu de la pièce, et plonge mon regard net dans celui de Kyoran.

- « Mais qu’est-ce qui t’es passée par la tête ? »

Au moment même où le point d’interrogation tombe, quelqu’un frappe à la porte. Mon cœur se glace. Ma respiration se bloque. Je la regarde elle. Puis je tourne lentement mon regard vers la porte. Est-ce qu’il aurait vraiment fait aussi rapide ? Je la regarde à nouveau, comme si elle avait la science infuse sur la suite des événements.
Peu importe, je prends sur moi. C’est lui. Je le sais. Je le sens. Mais au moins j’ai un témoin dans l’appartement. Pour peu que ça puisse jouer en ma faveur.
On frappe une nouvelle fois.
Combien de temps vient de s’écouler au juste ?
J’inspire un grand coup, me retourne et hésite une dernière fois avant d’ouvrir.
Allez-y.

Je tombe nez-à-nez avec un voisin de palier que j’ai dû croiser royal deux fois depuis qu’on a emménagé. Je le regarde d’un air interloqué. Il me sourit.
C’est lui son indic ?

- « Il vous attendait depuis un bon moment déjà. Je l’ai fait rentrer en attendant que vous arriviez. On ne sait jamais. »

Il ?
Mon regard part vers le bas.
Où je rencontre deux grands yeux qui m’observent comme si c’était le plus beau jour de leur vie.

- « Salut Bob. »


Dernière édition par Mickaëla Andersonn le Mar 3 Mai - 20:53, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyMer 20 Avr - 16:43

Même pas un merci. Ça commençait bien.

Kyoran s’était relevée en voyant Micka arriver, prête à lui rendre son chien avec une grande humilité. Elle n’avait pas du tout l’intention de la ramener, noooon. Son expression était très solennelle, apaisée par le devoir accompli à la face de l’adversité. Son action parlait pour elle.
À ses pieds, Bob la regardait avec interrogation, ne semblant pas bien comprendre pourquoi elle avait quitté le confort de cette moquette de hall d’immeuble, si agréable. Puis il regarda la nouvelle venue, sagement assis en attendant que la porte soit ouverte. Il s’engouffra sans demander son reste : clairement, il connaissait le chemin.
Pourtant, Mickaëla paraissait bien loin de l’explosion d’allégresse et de soulagement que Kyoran avait imaginée. Certes, elle ne devait pas être ravie de la voir devant chez elle, encore moins de devoir lui être reconnaissante. Mais est-ce que son animosité envers elle pouvait surpasser son amour pour son chien ? Vu l’état dans lequel elle l’avait vue plus tôt, elle en doutait.

"Qu’est-ce que tu fous ici bordel ?!"

Était-ce une question rhétorique ? La réponse semblait si évidente que Kyoran ne s’abaissa pas à la formuler. Elle était à deux doigts de faire demi-tour, maintenant qu’elle avait ramené le chien à bon port. Not claiming any of that negative bullshit. Mais la poigne sur son bras l’attira dans une autre direction. Elle s’en dégagea d’un mouvement de coude sec. Ce genre de contact autoritaire faisait affleurer ses réflexes les plus hargneux. Elles étaient des adultes, et Mickaëla avait intérêt à commencer à la traiter comme telle, car si elle continuait à la prendre de haut, elle ne pouvait pas garantir qu’un bras n’allait pas finir cassé. Voir deux.

"Quelqu’un t’as vu?! "

Kyoran arqua un de ses sourcils. Okay miss paranoïa. Elle venait de passer plusieurs heures à éplucher les rues à la recherche de son clébard. Évidemment que quelqu’un l’avait vue. Malgré son envie de répondre de façon véhémente et faussement premier degré, elle sentait bien la panique qui gagnait son interlocutrice. Il y avait quelque chose d’autre, quelque chose qu’elle ignorait. Quelque chose de sérieux. L’heure n’était pas au “jeu”.

“J’ai croisé un de tes voisins en arrivant. C’est tout."

Gweria balaya d’un regard circulaire la pièce dans laquelle elles se trouvaient. Elle retira sa veste et la posa négligemment sur le dossier du canapé, comme si elle était une habituée du lieu. Après tout, elle n’avait pas l’intention de rester, mais Micka l’avait poussée à l’intérieur, ça valait invitation, non ? Quitte à se faire aboyer dessus, autant être à l’aise.

Le joyeux tintamarre qui lui parvenait de la cuisine indiquait que “Bob” avait également trouvé le chemin des croquettes. Mais Kyoran commençait à se douter qu’elle n’avait pas ramené le bon chien. Non. La Micka qui lui était tombé dans les bras plus tôt malgré sa haine aurait couvert son chien d’attentions, elle en était certaine. Elle aurait sans doute été ridicule dans son affection, et Kyoran aurait donné cher pour voir ça. Quelle déception. Mais pourquoi les avoir fait rentrer alors, ces deux intrus ? Elle commençait vaguement à se demander si à défaut de Bob, Micka allait vouloir garder celui-ci, en consolation ? En tout cas, pour l’heure il n’aurait pas le ventre vide, et ça en faisait au moins un sur trois d’heureux et satisfait de cette situation.

"Si elle m’a trouvé aussi facilement, il pourra aisément en faire de même. Peut-être même qu’il est déjà en route. Est-ce que la ligne était seulement sécurisée ? Et si elle a épelé mon nom ? Et si elle a utilisé l’ancien ?"

Son hôte était en train de piétiner et tournoyer dans l’appartement comme une mouche qui ne trouve pas de fenêtre. Elle marmonnait des interrogations que Kyoran n’entendait que par bribes. Déjà que sa santé physique ne semblait pas des plus vaillantes, voilà qu’elle se mettait maintenant à parler toute seule. Mais encore une fois, formuler des inquiétudes sur l'état de la psychologue aurait été déplacé.

“Il” pourrait la retrouver ? Son ancien nom ? Déjà en route ? Ligne sécurisée ? Kyoran se rembrunit. Elle n’était pas exactement sûre de ce dont Micka parlait, mais elle pouvait certainement émettre des suppositions. Et surtout, elle reconnaissait ce listing, ces interrogations, pour les avoir traînées pendant des années. Et si ce policier dans le diner les avait reconnus ? Ou alors le réceptionniste du dernier motel ? Et si Owen les avait retrouvés ? Et si Sat avait été arrêté en sortant chercher à manger ? Et si…  C’était un ouvrage qui n’arrêtait jamais de se tricoter et de se détricoter. La paranoïa devient une mécanique de survie, lorsque l’on se cache de quelqu’un. C’était le danger de Schrödinger : tant que quelque chose d’affreux n’était pas arrivé, il restait possible, voire imminent. On n’était jamais complètement tranquille.

Kyoran ne savait pas grand-chose de ce qu’il s’était passé ces dernières années dans la vie de Mickaëla. Mais elle connaissait au moins un connard dans sa vie, et pour cause, c’est elle qui lui avait présenté. Pour sa défense, il n’avait pas l’air d’un connard, à l’époque. Elle essayait de se souvenir des confidences de la psy lors du meeting auquel elle avait assisté. Clairement, d’après son récit de l’époque, ce mari (ex-mari ?) pouvait totalement remplir le profil du stalker barjot. Ça aurait également été une bonne explication à sa présence à Downfall. Après tout, quelle personne saine d’esprit rejoindrait le borough ? À moins de fuir quelqu’un ou quelque chose.

"Mais qu’est-ce qui t’est passé par la tête ?"

Elle s’apprêtait à lui répondre avec verve, mais on frappa à la porte. Et encore un peu plus, elle vit sa frenemy se crisper, se tendre, pâlir. À croire qu’elle s’attendait à trouver La Mort sur son palier. Micka la regardait comme pour quémander une réponse, mais elle ne savait pas laquelle. Elle fronça un peu plus les sourcils, et instinctivement, la raideur de son hôte devint la sienne. Quels que soient leurs différends, s’il y avait une réelle menace, Kyoran n’hésiterait pas une seconde à monter au créneau. Micka avait ses défauts et leur relation n’était pas toujours cordiale. Mais elle savait qu’au fond, il s’agissait de quelqu’un de bien. Ça lui suffisait. Sans être son “ride or die”, elle ne resterait pas passive si on s’en prenait à elle en sa présence.
L’hésitation semblait étirer les secondes comme un mauvais film. Les coups se répétèrent contre la porte. Ils ne paraissaient pas agressifs ou impatients cependant, ce qui rassura Kyoran. Elle adressa un léger hochement de tête encourageant à Mickaëla, tout en s’avançant d’un pas derrière elle, façon silencieuse de lui dire qu’elle avait compris son angoisse et qu’elle était là pour assurer ses arrières, si besoin.

Toute la tension s’évapora sous le sourire bonhomme du voisin serviable. Ce n’était donc pas La Mort qui toquait, et encore moins un connard d’ex. C’était un bon samaritain. Et Bob. Le vrai Bob. Kyoran se recula légèrement pour effacer sa présence de ce moment de retrouvailles. Elle commençait déjà à se demander ce qu’il allait advenir du chien qui l’avait si facilement suivie. Il allait sans doute falloir le ramener au vétérinaire. Était-elle coincée dans une boucle temporelle qui ne serait plus que ponctuée par des visites au véto avec des chiens trouvés dans la rue ? Grounddog day ?
Quand on parle du loup… L’animal choisit ce moment pour émerger de la cuisine avec panache, bien décidé à venir se présenter à ce nouveau venu. Kyoran l’intercepta au vol, craignant une altercation, mais heureusement, aucun des deux canidés ne semblait d’humeur bagarreuse.

“Oh mais vous avez de la compagnie, je vais vous laisser !”

Après les remerciements d’usage, le voisin disparut dans le couloir et la porte se referma. Tandis que Bob et sa maîtresse tâchaient de se retrouver, Kyoran peinait à contenir l’excitation de Not-Bob 2ème du nom. Clairement, lui aussi voulait être de la fête. Et la jeune femme notait progressivement toutes les différences entre ces deux animaux. C’était donc à ça que ressemblait un Staffordshire terrier bleu.
Clairement, elle avait négligé le côté “court sur pattes” lors de sa recherche. Not-Bob 2 était également un peu plus grand et sans doute un peu plus lourd que le vrai tenant du titre. Le “bleu” qui l’avait tant laissée dubitative était en fait une robe grise satinée et courte, ce qui ne ressemblait pas au pelage noir et plus fourni arboré par le clebs inconnu. Finalement, les seules véritables ressemblances étaient le poitrail blanc et le fait qu'ils soient tous les deux des mâles.
Oui, elle avait vérifié.

Après plusieurs minutes à canaliser la folle énergie du deuxième chien, qui ne savait se décider entre sauter pour essayer de rejoindre le nouveau copain ou pour léchouiller la figure de cette brune sympa, Kyoran finit par le relâcher. Elle se préparait déjà à se prendre son erreur en pleine face et décida d’anticiper avec autodérision.

“Deux chiens pour le prix d’un. Tu pourras plus dire que je te porte la poisse maintenant.”

Avec toutes ces effusions, elle en avait presque oublié la tension de Mickaëla quelques minutes avant. Elle continuait à observer les deux animaux se courser et jouer à la bagarre. Comme si c’était plus simple de tendre une perche à son interlocutrice sans en avoir l’air, et sans la regarder, elle ajouta :

“Et ne t’inquiète pas trop. La personne qui m’a indiqué ton adresse utilise des outils cryptés. L’information ne devrait pas parvenir à… quelqu’un d’autre.”

Elle jeta un rapide regard vers la psy, comme pour tenter de percevoir quelque chose dans ses traits. Elle savait trop bien qu’il ne valait mieux pas creuser ouvertement, sous peine d’être invitée à se mêler de ce qui la regarde. Mais malgré tout, elle ne pouvait faire taire une certaine préoccupation pour son interlocutrice.
De quoi laisser une porte ouverte entre elles, si jamais. À Mickaëla de choisir si elle souhaiterait franchir le pas.

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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyMar 3 Mai - 21:39

Salut. Bob.
C’est tout ce que j’arrive à lâcher.
C’est d’un profond, je vous jure.

Mais dans l’actuel état des choses, je ne suis pas vraiment capable de faire plus. Je reste d’ailleurs là, à le fixer dans le blanc des yeux. Ma grosse pantoufle. Mon grand bleu. Mon Bob. Je sens l’émotion me mordiller les tripes et je sens les larmes monter. Je les refoule de tout mon être. Je n’ai pas besoin de ça. Pas ici. Pas maintenant. Pas devant toutes ces personnes. Que ce soit le voisin inconnu (qui m’a reconnu malgré nos deux piètres croisements furtifs) ou mon invitée loin d’être inconnue (que j’aurais préféré ne pas avoir retrouvée à Downfall, mais quand même bien un peu même si je ne l’avouerai jamais à voix haute et encore moins devant témoin). Bob me regarde donc. Et je regarde Bob. On se regarde. Et tout autour de nous, le monde continue de tourner.
Et. On. S’en. Fout.
Du moins un peu.

Car la réalité a tôt fait de nous rattraper. C’est toujours violent quand ça arrive. Un peu comme s’il fallait rattraper toutes ces vilaines secondes perdues à ne rien faire. Un arrêt sur image compensé par une avance-rapide. Tout à coup mes sens se mettent à tout encaisser à la fois. Les sons. Les couleurs. Les présences. Et l’oppressance. La réflexion me vient tout à coup, sans crier garde, que Gweria a ramené sa propre pantoufle poilue car c’est bien la présence de cette dernière qui annonce le début de l’apocalypse. De l’excitation canine dans mon dos. De l’excitation canine à mes jambes. Oui parce que Bob à le ventre tellement près du sol qu’il lui est anatomiquement impossible de me sauter dessus. Si si, je vous assure, la nature est bien faite parfois. Des soupirs et des luttes internes dans mon dos donc. Un sourire niais juste en face. Là encore l’univers décide de me laisser le bénéfice du doute et mon sympathique voisin (je garde quand même une certaine réserve quant au choix de l’adjectif) prend congé de nos retrouvailles. Tandis que mon bras referme la porte dans ce que je qualifierais vulgairement de réflexe, Bob ne tient plus. Il trépigne de ses quatre pattes à l’image des majorettes dans un défilé du quatorze juillet. Face à l’injustice de mère nature à l’avoir doté de pattes adéquates (tout dépend du point de vue), je m’accroupis à ses côtés (soyons honnêtes un instant, mon corps s’apprêtait de toute façon à me lâcher). Il arrive, envers et contre tout, à se hisser avec les pattes avant sur mes genoux (je vous ai déjà parlé de mon aversion pour les poils ?) et à me refaire le portrait. Je vous laisse imaginer ce que je pense de la bave de chien … mais comme nécessité fait loi. Et je pense sincèrement que ses sentiments ont été autant chamboulés que les miens. À cette exception près (si on retire le fait qu’il n’y en a qu’un des deux qui lèche la truffe de l’autre) que lui a réussi à déjeuner avant la balade … tiens en parlant du loup, est-ce que je n’ai pas vu et entendu un concurrent direct faire l’inventaire des restes abandonnés à leur triste sort dans la cuisine ?

Timing parfait. Car du coin de l’œil je remarque que Kyoran a perdu son combat contre les poils et a lâché la bête. J’en fait de même. Non pas que je crains une quelconque altercation (sans quoi elle aurait déjà eu lieu), mais dans le doute. Il y avait clairement trop d’éléments contre moi. Un chien sur les genoux, ça passe. Deux, c’est foutu d’avance. Surtout vu la vitesse à laquelle ce monstre arrivant en galopant vers nous. Je ne vais pas vous mentir, j’ai même légèrement poussé Bob en sa direction. Non seulement pour détourner l’attention du clébard inconnu, mais également pour faire barrage d’un corps proportionnellement plus massif que le mien. Depuis qu’on s’est installés à Downfall, j’ai perdu plusieurs kilos. Bob en a pris. Un but partout. Balle au centre.

Et notre coup de bluff mutuel paie. Après quelques joyeuses renifflades (il n’y a pas d’autres mots que pour décrire le speed dating entre deux canidés), voilà les deux loustics à se trimballer partout dans l’appart comme si le monde leur appartenait. Il n’y a pas à dire, Bob ferait un parfait guide touristique. Mon endroit préféré pour dormir par ici. Mon bain de soleil par là. Suivez-moi en direction des croquettes bio qui coûtent un os et qu’on ne trouve que très difficilement de ce côté du mur …
Bref, il vend du rêve.

Tandis que les enfants font leur vie, j’en profite pour me relever tant bien que mal. J’y mets le peu d’énergie qu’il me reste pour faire bonne figure. Même si je connais mon public. Peut-être justement parce que je le connais. Il ne faut pas montrer ses blessures à un prédateur. Elle l’est. Pas nécessairement à mon encontre. Mais elle le pourrait. Elle le devrait. Surtout après tout le mal que je peux bien lui souhaiter à chaque fois qu’elle pénètre mon cercle d’intimité. Si on ne laisse pas Bébé seule dans un coin, je vous prie de croire que Micka ça lui convient très bien.

- « Avec la chance que tu te trimballes, Comme tu prétends si gaiement que la poisse a tourné. je vais me ramasser tous les animaux du parc et je pourrai me reconvertir en Blanche Neige. »

Ça y est, Blanche Neige est debout. Non sans une petite grimace qui s’est invitée sournoisement sur mon visage dans les derniers efforts. Je décide de noyer le poisson (avec deux –s) en continuant sur la lancée Disney.

- « À la seule condition qu’ils font le ménage et préparent à manger si je me mets à chanter. »

Je la cherche du regard.

- « Non mais le mec qui a pondu cette histoire avait vraiment un sacré coup dans le nez. À moins que quelqu’un lui ait proposé de s’occuper des tâches ménagères à la seule condition qu’il cesse immédiatement de brailler. »

Je tente une note d’humour. ET pour cacher mon état de délabrement avancé ET pour noyer une deuxième fois ce poisson qui ne veut décidément pas. Elle a tout compris. Ce qui n’est pas étonnant. En plus elle sait de qui je parle, ou du moins elle doit en avoir une bonne idée. Je n’ai pas vraiment envie de le mettre sur le tapis. Ne serait-ce que penser à son prénom m’est parfois insupportable et me file des crises d’angoisse. Mais à quoi ça sert d’éviter non-stop l’inévitable. N’est-ce pas justement lui accorder bien plus d’importance qu’il ne le mérite vraiment ? Probablement. Ce n’est pas pour autant plus facile de passer le cap. En parler rend la chose réelle. Mais la garder pour soi … et bien il paraît que ça fait d’autant plus de dégâts.

- « J’aimerais en être aussi certaine que toi. »

Même moi je remarque que ma voix a perdu tout ce qu’elle avait réussi à accumuler jusqu’à maintenant pour n’être qu’un amas de défaitisme déprimant. Ce n’est pourtant pas dans mes habitudes. Enfin, je devrais plutôt dire que ça ne l’avait jamais été entre nous avant. Pas à ce point-là. Après la fac, après le mariage … à chaque fois que Kyo a croisé ma route, j’avais avancé un pas de plus vers ma propre tombe. Le hasard (ou peu importe) veut qu’à chaque fois que la situation a empirée, elle n’était pas bien loin. Mais je n’avais pas envie de lui imposer mon déclin. Ni même qu’elle le devine de près ou de loin. Alors oui, c’est plus facile d’être hostile, voire carrément désagréable. Ça oblige les gens à s’éloigner et à le rester. Sauf ceux dont tu aimerais qu’ils le fassent. Était-ce un appel à l’aide déjà à cette époque ? Qui sait.

- « Mais un nouveau déménagement semble plus à l’ordre du jour. »

C’est un peu ce que je n’ai pas eu de cesse de faire ces dernières années. J’ai été utopiste de croire que ça changerait une fois passée le Mur. En même temps, je n’y ai probablement jamais cru moi-même. Sinon pourquoi y a-t-il autant de cartons dans les placards que je n’ai toujours pas pris le temps de déballer ?

- « Je … »

Ne me sens tout à coup pas bien. Voire vraiment mal. Preuve en est que je me retrouve à terre avant même d’avoir enchaîné plusieurs mots. Mes jambes ont lâché. Ça aurait pu être pire. J’aurais pu y aller face en premier. Elle aurait rigolé. Ou elle aurait essayé de ne pas le faire. Fait est qu’elle aurait eu raison de se laisser aller. Quelle pathétique image je dois refléter. Elle mérite bien de voir à quel état je suis réduite. Moi qui ait si désespérément tenté de le cacher. Vaut mieux ici qu’au taf. Vaut mieux ici qu’en consultation. Même si l’absence de témoin m’aurait plus arrangé. Mais ça restera entre ses quatre murs … pas vrai ?

- « Je suis désolée. »

Pour ceci.
Pour maintenant.
Pour avant.
Tu n’as qu’à choisir.

Je me laisse retomber vers l’arrière, contre le mur qui me sert de pilier, et détourne le regard vers le salon. Je soupire par le nez. Peut-on encore tomber plus bas ?
Et pourquoi pas.
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Kyoran Gweria
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptySam 7 Mai - 15:59

Les deux chiens paraissaient de mèche, comme s’ils se connaissaient depuis toujours et étaient prêts à fomenter de mauvais coups ensemble. Leur entente était inversement proportionnelle à celle des deux humaines. Quoi que. Une sorte de trêve semblait être de mise. Kyoran était surprise, elle s’attendait à en entendre des vertes et des pas mûres après avoir débarqué chez Mickaëla, non-invitée, avec un chien sorti de dieu sait où. Mais non. La psy avait sans doute épuisé son quota d’énervement après sa sortie chez le véto.

“Avec la chance que tu te trimballes, comme tu prétends si gaiement que la poisse a tourné, je vais me ramasser tous les animaux du parc et je pourrai me reconvertir en Blanche Neige. À la seule condition qu’ils font le ménage et préparent à manger si je me mets à chanter. Non mais le mec qui a pondu cette histoire avait vraiment un sacré coup dans le nez. À moins que quelqu’un lui ait proposé de s’occuper des tâches ménagères à la seule condition qu’il cesse immédiatement de brailler.
-Parce que tu connais un mec qui se préoccupe des tâches ménagères de base, toi ?”


Elle esquissa un sourire de connivence. Un ennemi commun à critiquer, c’était toujours mieux que d’être soi-même la destination de toutes les réprimandes. Et entre Sat pour elle et Wil pour Micka, sans oublier les frères Grimm et leur vision tordue des contes de fées, les hommes semblaient une parfaite cible. Not all men. Mais un sacré paquet de connards quand même.
Elle ne l’aurait pas reconnu, mais c’était plutôt agréable de retrouver ce semblant de légèreté entre elles. Cet échange semblait issu d’une autre époque, où il n’y avait pas que méfiance et véhémence dans leurs interactions.

Même si Kyoran s’était détendue depuis les battements à la porte et avec cette digression, son cerveau était toujours en quête d’indices afin de comprendre ce qui clochait. Aussi, elle n’avait pas manqué de noter cette légère expression d’inconfort lorsque son hôte s’était redressée. Et elle n’était pas vraiment dupe : l’humour était une excellente défense, lorsqu’on essayait de détourner l’attention d’un sujet sensible. Alors après un moment de silence, elle avait décidé à demi-mots d’adresser ce qu’elle devinait de la situation. Elle espérait que ses paroles pourraient apaiser un peu son interlocutrice, mais ça semblait peine perdue.

"J’aimerais en être aussi certaine que toi. Mais un nouveau déménagement semble plus à l’ordre du jour."

Si Gab entendait ses compétences en sécurité remises en question comme ça, il aurait sans doute boudé pendant un moment, après avoir qualifié Mickaëla de noms d’oiseaux. Mais Kyo se garderait bien de lui rapporter ça. Et puis, elle comprenait. La paranoïa ne se satisfait pas d’éléments rassurants. À sa place, elle serait sans doute déjà en train de faire ses valises, et personne n’aurait réussi à l’arrêter, peu importe les arguments évoqués.

“Si tu n’as pas peur que j’échappe ton vase préféré, je pourrais t’aider à porter des cartons.”

Elle avait jugé bon de continuer avec une touche d’humour, pour que sa frenemy ne se sente pas trop accabler par le poids de cette discussion et ses implications. Mais en réalité, elle se doutait bien que le déménagement aurait un double but : demeurer à une adresse inconnue du mari. Et de Kyo. On n’invite pas un chat noir à sa pendaison de crémaillère.

Cet échange prenait un ton qu’elle n’aurait jamais vu venir. Après l’agressivité chez le véto, le désespoir, la véhémence, la panique à son arrivée dans l’appartement, puis le calme et l’humour après avoir retrouvé Bob, voilà qu’on semblait glisser vers de la vulnérabilité. Et de l’honnêteté. Deux choses radicalement évitées entre elles. Cette journée était décidément un vrai rollercoaster. Kyoran se sentait un peu prise de court. À la fois heureuse de percevoir un brin d’humanité dans leur relation, et en même temps… désarmée. Elle avait l’impression de ne pas être la bonne personne pour rassurer Micka, ou lui remonter le moral. Tout simplement, pour l’aider. La preuve, même quand elle essayait, elle ramenait le mauvais chien. Mais ce ton vaincu qu’elle entendait était loin d’être anodin. Micka ne laissait certainement pas voir ses faiblesses au premier venu. Mais encore moins à elle. Pour qu’elle baisse ses défenses comme ça, c’était vraiment mauvais signe. Elle n’avait sans doute plus l’énergie pour prétendre, peut-être même se sentait-elle acculée au pied du mur.

Comme pour confirmer ses craintes, son interlocutrice commença une phrase sans la finir. Face à quelqu’un d’autre, Kyoran n’aurait pas manqué l’occasion de lui renvoyer son “Qu’est-ce qui te prend de bégayer ainsi ?”. Mais pas là, pas maintenant qu’elles semblaient enfin avoir rétabli un semblant de communication sincère. Et encore moins lorsque Mickaëla s’effondra sur le sol.
Par réflexe, elle s'avança vers la souffrante, même s’il était déjà trop tard pour lui éviter la chute. Elle avait cru qu’elle faisait un malaise, mais non, malgré ce moment de faiblesse, Micka était toujours consciente. Assez consciente pour prononcer une phrase que Kyo n’aurait jamais imaginé entendre, adressée à elle.

"Je suis désolée."

Dans quel univers parallèle était-elle entrée en franchissant la porte de cet appartement ? Cet aveu inattendu avait stoppé Kyoran dans son premier instinct. Elle allait se baisser, demander si ça allait, proposer qu’elle s’allonge complètement, ou de l’aider à rejoindre le canapé, peut-être surélever ses jambes. Mais elle ne fit rien de tout ça. Elle cherchait à faire sens de cette dernière phrase. Pourquoi Micka s’excusait-elle ? Pour ce malaise ? Pour son attitude hostile ? Ou une autre offense dont elle n’aurait pas connaissance ? Elle essayait de l’interroger du regard, mais la psy avait les yeux dans le vide, détournés, peut-être pour éviter d’en dire plus. Elle songea à la questionner, mais elle était à peu près sûre que d’un instant à l’autre Micka allait changer d’avis, reprendre ses esprits et si Kyo rappelait cette phrase, la psy nierait simplement tout en bloc. Elle ne dit rien. De toute manière, quelle réponse pouvait-on apporter à ça ?

Sans prévenir, Kyoran fit demi-tour et se dirigea vers ce qu’elle devinait être la cuisine, d’après les bruits de croquettes entendus plus tôt. Elle prit un verre sur l’évier et le remplit d’eau. Elle entreprit ensuite de faire un rapide inventaire des placards et du frigo pour trouver quelque chose à grignoter. Mickaëla n’aimerait sans doute pas cette nouvelle invasion de sa propriété, mais hé, au moins comme ça Kyoran aussi aurait une raison d’être désolée. Voilà qui les rendra quittes. La pêche fut maigre, ce qui expliquait peut-être l’état de fatigue extrême de la maîtresse de maison. Elle parvint cependant à trouver un paquet de crackers. Ça ferait l’affaire.
Sa trouvaille sous le bras et le verre à la main, elle fit un crochet par le salon, attrapa deux coussins sur le canapé de sa main libre, avant de revenir vers l’entrée. Attirés par une Micka à terre, les deux clébards étaient évidemment en train de la couvrir d’attention non-sollicitée. Pour une fois qu’elle était à leur hauteur, ils n’allaient pas se priver. Kyoran les chassa plus ou moins efficacement, afin de pouvoir la rejoindre. Elle commença par lui tendre le verre d’eau, puis le paquet de crackers.

“Tiens. Tu devrais manger quelque chose, ça te fera peut-être un peu de bien. J’ai pris le premier truc que j’ai trouvé, mais je peux aller chercher une pizza ou autre chose, si besoin.”

Elle regardait cette ancienne connaissance avec un air soucieux, et les éléments qu’elle avait déjà noté chez le véto lui sautèrent encore plus aux yeux. Mickaëla avait toujours été mince, mais sa maigreur semblait avoir encore atteint un autre niveau. Etait-ce les emmerdes, les addictions, son arrivée à Downfall ? Difficile à dire. À cela s’ajoutait un teint quelque peu blafard, accompagné par des cernes creusées. L’image de la jeune femme qu’elle avait jadis connue se surimprima un instant sur la quarantenaire. Elle n’était plus la même personne. Mais après tout, elle non plus.
Après avoir une nouvelle fois tenté d’écarter les chiens, Kyoran laissa tomber un coussin par terre, contre le mur à côté de Micka. Elle s’y glissa avant de tendre le coussin restant à sa voisine. Ainsi installée, Kyo était prête à rester là le temps qu’il faudrait. Après avoir poireauté dans le couloir de l’immeuble, elle n’était plus à ça près, mais au moins il y avait un upgrade pour ses fesses.
Not-Bob 2 prit cette nouvelle paire de jambes étendues comme une invitation pour s’y affaler avant de réclamer de l’attention. Elle lui gratouilla la tête tout en songeant qu’il allait vraiment falloir qu’elle s’occupe de lui. Mais pas tout de suite.

Épaule contre épaule, assise par terre dans cette entrée, Kyoran laissa le silence s’installer un moment, seulement interrompu par les bruits des chiens. Après une hésitation, elle se lança finalement.

“Qu’est-ce que je peux faire pour t’aider ?”

Elle ne parlait pas seulement de sa faiblesse du moment. Gweria n’était pas connue pour ses nombreuses et longues amitiés. Elle n’était pas habituée à jouer les confidentes, à être une épaule sur laquelle pleurer ou même, juste s’appuyer. Mais cette constatation la rendait triste, un peu. Elle n’avait pas souvent l’occasion d’être là pour quelqu’un d’autre. Mais la réciproque était également vraie. Alors, elle savait ce que c’était, d’avoir l’impression de devoir faire face à toutes les galères, seule.
Elle se sentait maladroite dans ses mots, et elle continuait de redouter le moment où la Micka furieuse allait ressortir. Elle s’attendait à chaque instant à se faire virer sans ménagement.

“Et si tu commençais par me raconter ce qui t’arrive, et après on avisera d’un plan de bataille.”

Elle ne regardait pas sa compagne, pour ne pas ajouter le poids d’un regard. On n’aime pas être vu, lorsqu’on est vulnérable. Alors à la place, elle appuya juste un peu plus son épaule contre la sienne.

___________
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Mickaëla Andersonn
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyDim 8 Mai - 21:31

Je regarde le salon.
Je regarde le vide.
Je ne regarde rien et j’écoute encore moins.
Les sons et les couleurs semblent ricocher tout contre le peu de carapace qu’il me reste. Je suis certaine que si on pouvait la matérialiser, on remarquerait sans mal qu’elle est trouée de partout et que l’eau dégouline de toute part. L’eau … ou l’alcool. Même si je n’ai rien bu depuis hier soir. À moins que c’était ce matin ? Le temps aussi se joue de moi. Depuis quand suis-je ainsi affalée à terre ? Il y a quelques heures d’ici, je me disputais du regard avec mon autoproclamée Némésis dans la salle d’attente d’une clinique vétérinaire. À moins que ça aussi ça se soit déroulé il y a vachement plus longtemps dans le temps ? Voire pas du tout même. Ce qui est, ce qui n’est pas, ce qui aurait pu été, ce qui ne sera jamais … tout se rencontre, se mélange, se détériore. Mes neurones partent en vrille. Mon corps aussi. Sans quoi je ne serais probablement pas assise là.
Je me suis trainée contre le mur, juste pour ne pas m’étaler de tout mon long. À même le sol. Ce n’est pas l’envie qui m’en manque. C’est uniquement le public.

Je sais qu’elle est là. Je la sens. Je la devine. Qui me regarde, ou ne me regarde pas. À me fixer. À me juger. Ou à se faire violence pour s’en empêcher. Mais pourquoi donc lutter ? Chasser le naturel, blah blah blah galop. Vous voyez le topo. Et à la nature humaine est ainsi faite. Je ne lui demande aucunement de la nier pour moi. Quand bien même, qui suis-je pour seulement pouvoir lui imposer un tel choix ? La propriétaire de ce lieu ? Certes, mais pourquoi combien de temps encore ?
Je me souviens vaguement avoir souri à son allusion sur sa gaucherie en cartonnage. Un sourire triste. Mélancolique. Est-ce qu’elle voit un vase quelque part dans le décor ? Pour y mettre quoi ? Des fleurs que je me serais achetée moi-même ? Fut un temps il m’en offrait pour me plaire. Ensuite il m’en a offert – beaucoup plus – pour me faire taire. Le dernier vase, c’est moi qui l’ai cassée …

Je déglutis. Plus par réflexe que par réel intérêt. Le corps est assez bien foutu. Il respire seul. Il évacue seul. Il fonctionne parfaitement bien en mode pilote automatique. Si je le laissais faire, il arriverait même à vivre ma vie à ma place. Sauf que voilà, il n’est pas vraiment en accord avec mon esprit. Je reformule : ils sont tous deux de connivence, mais ils ont omis mon rôle prépondérant dans l’histoire. Pour se nourrir, il faut que je sois d’accord. Il faut que je remplisse le frigo. Il faut que je carbure à autre chose que le nombre de degrés que peut contenir un verre hexagonal. Eh oui, même moi j’ai des principes. Je ne suis pas fan du goulot.

Au loin, j’entends que ça bouge dans la cuisine. Je n’ai ni le courage de contester, ni même de regarder. Je pourrais deviner, mais à quoi bon ? Elle pourrait encore être en train de me dévaliser que je n’en aurais strictement rien à faire. Je peux difficilement ravaler les trois derniers mots que je lui ai adressé. Quelque chose me dit que je les ai exprimés à voix haute. Je ne regrette pas. Ça devait se faire. Pour la suite, elle en fait ce qu’elle veut. Elle les accepte. Elle les rejette. Elle les ignore. Elle les piétine. Elle me les renvoie dans la tronche à la puissance mille. Est-ce que cela me ferait seulement réagir ? Je me sens autant que je m’entends soupire. Une inspiration aussi longue que lourde. Comme si j’avais oublié de respirer pendant mes instants de lutte interne et que mon corps réclamait désormais justice. C’est son droit le plus total. Du coin de l’œil je remarque une masse trapue qui s’approche de moi. Tantôt enjouée, tantôt inquiète. Moi à terre. Deux fois de suite. En si peu de temps. Il y a de quoi se poser de sérieuses questions. Même au plus profond de mes mauvaises passes ces trois dernières années, il a toujours dû fournir un effort considérable pour m’approcher. Pleurer dans un lit qui se situe à plusieurs dizaines de centimètres du sol, je vous prie de croire que c’est un exploit pour monsieur. Et ce n’est pas faute d’avoir essayé. Du coup, là en pleine pâture et à hauteur de réconfort, il s’y prend comme un véritable gentleman. Il pose sa grosse tête massive sur une de mes cuisses. Il me regarde du coin de l’œil, mais pas directement non plus. Comme s’il testait les limites avant de les franchir. Il a d’ailleurs uniquement déposé sa mâchoire imposante sur mon pantalon, le reste de son corps toujours debout. Enfin, peut-être vraiment parler de debout quand la bidoche se trimballe si près du sol ? Ma main droite est la première à confirmer la trêve. Je viens lui caresser le haut du crâne, là où le poil est encore un peu plus court et super doux. Sa queue en béton armée commence aussitôt à battre le rythme. Heureusement il n’y a rien à portée, c’est vraiment une arme de destruction massive celle-là. Il n’en faut guère plus pour lancer l’assaut de l’autre barrique de service. Bob a beau s’imposer de son rectangle massif, l’autre bestiole est plus grande (du moins plus haute sur pattes), plus enjouée et fichtrement moins sur la défensive. En voilà un qui n’a jamais connu un passé similaire à celui de Bob dans sa petite vie de banlieue, quand bien même celle-ci porte le doux nom de Downfall. Comme quoi, il y a réputation et réputation.

Je n’ai que le temps (et le courage) de relever le menton pour m’éviter un gros steak en plein nez (dans le meilleur des cas). À la place je me fais laver le menton et le cou et mon haut se ramasse un aller simple pour le pressing. À moins que la poubelle me fasse les yeux doux. J’ai une grosse patte (voire deux) qui vient m’écraser un muscle dont j’avais oublié l’existence, mais ce n’est certes pas le seul. Le moins qu’on puisse dire c’est que l’animal me fait me sentir vivante. De là à clamer que c’est une bonne chose …
Tandis que j’espérais un soutien quelconque de la part de Bob, il semble plutôt prendre cette absence de réaction-slash-débat de ma part pour une invitation. Le voilà-t-il pas qui commence à se coucher sur mes jambes comme si je venais d’être promue canapé de sa Majesté canine. Dans mon malheur (pour autant qu’on puisse appeler cela ainsi) je n’ai pas à bouger le moindre petit doigt pour faire cesser tout ce cirque. C’est une force divine qui s’en occupe à ma place. De manière plus ou moins efficace. Puisque dans un premier temps le chien sans nom tente de choper le coussin, persuadé qu’il s’agit d’un objet de jeu. Il ne manquerait plus que ça, une explosion de plumes ou de peluches pour retapisser l’appartement. Moi qui m’apprête à déménager …

Mon avant-bras droit se tend vers elle pour se saisir ce qu’elle me tend. J’y découvre la fraicheur d’un verre. Je devine plus que je ne vois qu’il ne s’agit pas d’un liquide alcoolisé. Facile, je n’en ai plus. Même carrément que je tente autant que possible de ne pas en avoir à proximité. Vous savez, la tentation tout ça.
Tandis qu’elle s’affaire à négocier avec les chiens un moment de répit, je laisse retomber mon bras – le verre déposé à côté de mes jambes. Et elle voudrait me payer une pizza ? Si j’avais eu la force de lui balancer une vanne, je ne me serais pas privée de sous-entendre que niveau drague elle craint sa race. Au moins cette image tortille un peu la ligne sérieuse que doit former ma bouche. Elle et moi. Moi et elle. Au campus on aurait tellement pu faire gober ça.

Elle revient à la charge. S’installe à côté, sur un coussin non-éventré. Nous voilà chacune avec un chien sur les jambes. La belle paire qu’on fait. On devrait faire un selfie. C’est un truc à la once in a lifetime. Autant l’immortaliser vu qu’on va toutes les deux le nier jusqu’au reste de notre vie. Ou de notre non-vie. Même si elle venait à se terminer ce soir.
L’évidence de cette phrase est telle que lorsqu’elle laisse retomber son épaule contre la mienne, plutôt que de me dégager, je me laisse carrément aller. Ma tête vient heurter la sienne. Pas violemment. Mais juste assez que pour me rendre compte que c’est dur. Dans tous les sens du terme.

- « Si tu acceptes de m’héberger, je t’offre même un vase incassable. »

Je ne sais même pas d’où ça vient. Elle et moi dans le même appart. Dans un même espace de vie. Vu le parcours qu’on se trimballe. Vu notre histoire personnelle. Vu tout le malheur que j’ai pu lui souhaiter depuis ces vingt dernières années (et plus si affinités). Si c’est elle mon revers de karma, j’ignore bien laquelle les deux est la plus à plaindre.

- « Le plus gros défi a déjà été relevé. »

Je fais un petit signe du menton en direction de nos paires de jambes mutuelles. Les deux loubards sont installés quasi à l’identique. De mon côté, Bob me regarde avec son museau posé sur ses pattes avant. Sa queue dansant toujours la java. Un simple mot de ma part et il est prêt à me refaire le portrait. Et dire que c’est ce jeune homme qui est censé assurer ma sécurité. Heureusement que l’air ne fait pas la chanson. Même pas quand sa maîtresse se prend pour Blanche Neige.

- « Il s’appelle comment ? »

Noyez, noyez, noyez le poisson,
Avant que le poison ne vous noie.
Toute la subtilité d’une phrase à travers une seule et unique lettre.
The story of my life.

Je me redresse un peu, rompant le contact instauré entre nos deux têtes dures ; voire même nos épaules. J’inspire un nouveau coup et tourne mon regard de telle sorte à le plonger dans le sien.

- « Qu’est-ce qu’il reste à dire ? Tu étais là. Tu as entendu mes confessions. Même si je ne sais toujours pas ce que toi, Kyoran Gweria, tu foutais dans un groupe de soutien pour femmes battues. »

Ça y est, c’est dit.
Ça me fait un petit pansement au cœur quand même.
Même si j’en suis une, il y a une différence à l’entendre.
À ce même titre, elle pourrait en être une. J’ai du mal à l’imaginer. C’est d’ailleurs l’hypothèse qui a le plus rapidement été jarté à chaque fois que je me suis posée la question. Au moins le dilemme me permettait de poser mes idées sur autre chose. Un temps du moins.

- « Quand j’ai enfin réussi à tourner la page, Enfin, en grandes lignes hein, puisque monsieur s’efforce de ne pas vouloir signer cette saloperie de petit bout de papier officiel. je suis tombée sous le charme de la mauvaise personne. Encore une fois. Quelle douce ironie n’est-ce pas ? Une vraie psychopathe. À croire que je les attire. »

Ce qui est peut-être le cas.
À cette idée, je me laisse retomber vers l’arrière et daigne enfin porter le verre à mes lèvres toutes sèches. Je sirote quelques gorgées, histoire de ne pas tout gerber. Bob m’observe toujours tel un chat s’apprêtant à sauter sur sa proie. Je reporte mon attention sur le chien qui en fait de même sur les jambes de ma voisine. Lui j’ignore si c’est sur elle qu’il veut sauter, sur moi, sur Bob ou carrément sur tous en même temps.

- « Et toi, qu’est-ce que tu viens te perdre par ici ? »

Confession pour confession.
De toute évidence, rien en sortira de ces quatre murs.
N’est-ce pas ?
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Kyoran Gweria
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyLun 23 Mai - 9:04

C’était étrange de se retrouver ainsi. La tête de Micka contre celle de Kyo. Cette dernière n’osait même pas respirer trop fort, de peur de déranger cet instant. On pouvait sentir toute la fatigue de l'hôte dans cette simple rédition.

“Si tu acceptes de m’héberger, je t’offre même un vase incassable.
- Deal.”


Kyoran était-elle sérieuse ? Sans doute autant que Mickaëla. Elle n’imaginait pas vraiment sa victime karmique vouloir emménager dans la gueule du loup. Mais si cette dernière avait besoin d’un point de chute, elle ne lui fermerait pas la porte au nez. De toute façon, pour le peu de temps qu’elle passait chez elle, et vu la taille de la baraque, ça ne serait pas vraiment un problème. Et puis après tout, c’était sa faute si Wilfried parvenait à trouver son adresse. Même si elle doutait que les données de Gab’ puissent être siphonnées.

“Le plus gros défi a déjà été relevé. Il s’appelle comment ?”

Gweria suivit le regard de sa compagne, vers le chien inconnu. C’est qu’il commençait à lui tenir chaud aux jambes ce grand benêt. Comme s’il avait remarqué l’attention dont il était soudain le sujet, il avait relevé la tête pour les regarder avec enthousiasme. La situation était périlleuse : le moindre geste ou parole pourrait être interprété comme une invitation à leur faire la fête. Et en étant ainsi assises par terre, Kyoran ne donnait pas cher de leur peau si ça arrivait. Elle gratouilla l’arrière de l’oreille du cabot un petit moment, en réfléchissant.

“Bonne question. Il va encore falloir que je passe chez ce putain de véto pour voir s’il a un propriétaire. Comment as-tu choisi le nom de Bob, toi ?”

La jeune femme était prête à glisser dans cette conversation sans conséquence, si c’était ce dont Mickaëla avait besoin. Mais le charme fut rompu, tout comme le contact entre elles. Le regard droit et franc que la psy plongea dans le sien la surprit. Est-ce que la trêve était terminée ? Son adversaire avait-elle repris suffisamment de force pour vouloir rouvrir les hostilités ? Ah…cette fameuse réunion à laquelle elle n’aurait jamais dû assister était enfin mise sur le tapis. Kyo ne savait pas trop si la réplique était chargée en accusations, ou juste une façon de poser la question qui devait traîner dans sa tête depuis ce jour maudit. Mais non. Malgré une certaine acidité, son interlocutrice semblait plus abattue qu’autre chose.
Comment répondre ? Avouer qu’elle traquait à l’époque un enfoiré qui ciblait via ces réunions des femmes vulnérables n’était pas une option. Elle ne pouvait pas révéler son passe-temps inavouable. Au prochain coup de malchance, la colère ne mettrait pas longtemps à pousser Micka à la dénoncer aux autorités. Et puis même sans ce risque. Le cercle des initiés était plus que réduit, et c’était préférable. Alors, quoi dire ? Elle ne voulait pourtant pas lui mentir, pas dans ce moment. Un peu plus tôt dans la journée, elle n’aurait pas eu de scrupules. Mais maintenant… Ce serait dommage. Kyoran avait un air grave et sérieux, comme si elle pesait ce qu’elle allait dire.

“Une de mes amies de l’époque était concernée, mais elle n’osait pas chercher de l’aide, parler de sa situation. J’avais pensé trouver des idées sur comment l’épauler en me rendant à une de ces réunions.”

C’était un demi-mensonge. Après tout, si on considérait le lien entre Kyoran et Mickaëla comme une sorte d’amitié (très dysfonctionnelle, je vous l’accorde), une partie de cette déclaration n’était pas complètement fausse. Elle avait bel et bien une amie qui était une femme battue.

“ Et hum… désolée pour ça. Je ne voulais pas espionner tes confidences à l’époque. Je n’ai jamais vraiment eu l’occasion de te le dire.”

Elle évita d’ajouter un “car à chaque fois qu’on se croise tu manques de m‘arracher les yeux”. Véridique, mais pas nécessaire. Son regard était passé sur ses mains, puis revenu sur son alter-égo. Malgré les arrangements avec la réalité, elle espérait que sa sincérité transparaîtrait. Et puis après tout, Micka avait ouvert la porte des excuses un peu plus tôt. À son tour.

Les confidences de la psy vinrent bientôt combler le silence. Un ex qui refuse le divorce et une psychopathe. Beau programme.

“T’as jamais pensé à les présenter ? Vu comme tu en parles, ils ont l’air faits l’un pour l’autre.”

Kyo se risqua à un demi sourire. Et au moins, ce n’était pas elle qui lui avait présenté la deuxième timbrée.

“Du coup, c’est lequel des deux affreux que tu crains de voir débarquer à ta porte ?”

La situation n’avait rien de vraiment amusant, et elle sentait une forme de fatalisme dans les paroles de son hôte. Alors elle faisait de son mieux pour garder cette discussion ouverte et essayer de la soulager d’un peu de son poids, en prenant un ton presque anodin.
Elle prit un cracker avant d’agiter la boîte en direction de Micka. Elle avait bu un peu, c’était un progrès, mais qu’elle ne compte pas s’en tirer si facilement. On ne pouvait pas vivre d’amour et d’eau fraîche, encore moins quand ses exes semblent faire un concours du plus gros toquard.

Évidemment, Not Bob 2 prit ce signal pour une invitation à venir manger lui aussi. Comme si la rasia sur les croquettes n’avait pas suffit ! Kyo eut toutes les peines du monde à l'empêcher de fourrer sa grosse truffe dans le carton. Elle fut obligée de lui concéder la moitié de son cracker pour négocier un moment de répit. Bob sembla hésiter à réclamer son dû, lui aussi. Mais il avait l’air trop bien installé et renonça finalement.

Après que la paix sociale fut rétablie entre elle et le chien, Mickaëla l’interrogea sur sa venue à Downfall. Que faisait-elle ici ? Elle-même s’interrogeait parfois sur ses motivations. Elle se demandait si elle avait fait le bon choix. Si on voulait vraiment être honnête, son déménagement ressemblait surtout à une fuite en avant. Mais encore une fois, elle ne pouvait pas être cent pour cent transparente dans sa réponse. Elle ne pouvait pas parler de sa volonté de traquer Owen Odd Gabriel pour qu’il goûte enfin à un peu de retour karmique. Mais il restait toujours une demi-vérité. Déjà bien suffisamment douloureuse à admettre.

“Envie de fuir le passé aussi, s’offrir un nouveau départ. T’es pas la seule à avoir des exes discutables. New York était devenue trop petite pour nous deux. Et puis cette ville m’étouffait, ou plutôt les gens qui y vivent. Tout le monde avait toujours quelque chose à dire sur ma vie, apparemment. Qu’elle soit réelle ou fantasmée. J’ai vu une opportunité pour l’entreprise et je l’ai saisie.”

Certes, elle ne disait pas tout. Par contre, tout était vrai. Et même si elle n’avait pas prononcé son nom, le fantôme de Sat (ou Christopher comme il se faisait appeler maintenant) hantait sa réponse, comme un mauvais film d’horreur dont on n’arrive pas à s’arracher. Elle détestait ne pas être indifférente à cette simple évocation. Elle doutait de l’être un jour.

“On devrait vraiment commencer un club des malheureuses en amour.”

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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyVen 3 Juin - 21:07


Je pense bien qu’il s’agit là de notre plus longue conversation depuis ce qui me semble être une petite éternité. C’était encore avant lui. Ou peut-être juste après. Bien que, dans mes souvenirs il n’a pas révélé sa véritable nature d’entrée de jeu. À moins que l’adage dit vrai et que l’amour rend aveugle. Ce que je ne pourrai pas nier. Même avec une bible sous la main en me perdant dans les yeux du juge avec la moumoute de travers. C’est peut-être cliché. Mais c’est aussi vrai. Il faut croire qu’il y a beaucoup de vérités dans la vie. Au moins autant que les mensonges. Histoire de garantir un certain équilibre dans le monde. Ou un autre ramassis de conneries du genre.

On échange donc. De manière qui dépasse le cordial. Je la sens un peu sur la défensive. Pas nécessairement dans ses paroles. Plutôt dans son langage corporel. Dans son expression en général. Et comment lui en vouloir ? Si on nous avait enfermé ensemble dans une pièce il y a quelques semaines – il y a quelques heures même, je l’avoue – d’ici, je ne donne pas cher du résultat. On aurait morflé toutes les deux, mais ni l’une ni l’autre ne serait laissée faire. Est-ce que je préfère pour autant la situation actuelle ? Qu’en est-il de sa part ? N’aurait-elle pas préféré remonter le temps de quelques années, quitte à prendre la partie vendetta pour contrebalancer ? Une vieille amitié ébranlée, mais avec une chance de s’en relever. Certes, mais se relever de quoi ? Est-ce que cela aurait seulement suffi ? Si ça n’avait été elle (ou moi, en sens inverse) quelqu’un aurait forcément fini par faire caputer toute cette histoire. Tant la sienne que la mienne. Shit happens. Shit happens a lot. Et ce n’est pas en essayant de la contourner qu’on ne finit pas par s’étaler dans une plus grosse encore juste après.
Sur cette délicieuse pensée, je lève mon verre et sirote une gorgée de plus. Ma bouche et ma trachée en sont tellement reconnaissantes que je les entends limite gémir dans mon dedans. Enfin, j’espère sincèrement que c’est dedans et que ça ne fait pas écho au dehors. Même si entre nous, on n’est plus vraiment à ça près.

J’écoute sans pour autant l’interrompre. Défaut professionnel. Même si défaut est peut-être un grand mot. Du coup elle pourrait avoir l’impression que je la regarde sans vraiment enregistrer, mais est-ce seulement important ? En plus elle connait mon taf. Je ne peux pas en dire autant en ce qui la concerne. Alors bien sûr je connais l’image, les apparences tout ça tout ça ; mais ça pue à des kilomètres à la ronde qu’il se cache quelque chose de plus profond. De plus secret. Et je ne suis clairement pas du genre à aller gratter pour que ça sorte. Surtout pas avec elle. Nous connaissant, et extrapolant la relation qui nous hante depuis un certaine temps (un temps certain) maintenant ; si j’ai le malheur de me rapprocher un tantinet de ce qui ne me regarde pas (ce qui n’est pas faux), ça va m’éclater à la tronche à l’image d’une pustule arrivée à maturation. Excusez du peu pour l’image, mais c’est vrai. Vous voyez, que des vérités !
Et si elle ne veut pas partager, cafter ou tout autre verbe qui se prêterait aux circonstances ; je ne vais pas lui jeter la pierre. Ce qui ne nous tue pas, nous rend plus fort. Mais en même temps Dieu bénit les ignorants. Vous y pigez encore quelques choses vous, à toutes ces contradictions à la mord-moi-l’nœud ?
Je jette l’éponge. Et elle un cracker. Quelle idée aussi de secouer ce sachet entre nos deux visages. Primo : j’ai vraiment l’air d’un cabot malheureux affalée ainsi ? (Non non, inutile de répondre.) Secundo : tu en fais quoi des véritables boules de poils qui n’attendaient que ton feu vert pour passer à l’assaut ?

J’observe du coin de l’œil Bob qui ne moufte toujours pas. Non pas que ça ne le tente pas, mais avec son système digestif hyper sensible (forcément je ne pouvais pas tomber in love avec un clébard dit « normal ») il risque de vomir sur notre invitée dans les précieuses minutes qui vont suivre. Soit il a appris la leçon la dernière fois – ce qui, en toute honnêteté, m’étonnerait mais l’espoir fait vivre ! ; soit il a trop peur que de perdre sa place présidentielle s’il se jetait dans la course aux votes. Ou dans la gueule du loup. Celui-là même qui arrive à négocier une bonne partie du paquet de petits biscuits salés avant de récupérer sa place de Alpha. Il n’y a pas à dire, elle va avoir des problèmes si elle lui cède le moindre de ses caprices ou si elle se persuade être sortie vainqueur de l’équation. Mais inutile pour moi de briser sa bulle utopiste. Du moins, pas dans l’immédiat. Pas tandis que la hache de guerre est (peut-être que temporairement) enterrée et qu’elle cherche de quoi fourrer dans la pipe. Est-ce qu’il est utile de lui préciser que je suis une ancienne junkie ? Mouais … gardons un peu de suspense pour plus tard. Si on zappe les étapes trop rapidement, le home-run aura un bien triste goût.

Où en étions-nous ?
Ah oui : les semi-confidences, le haschisch à non pardon la hache, la trêve, le vase de bienvenu.

- « Ils n’ont qu’à ériger un club pour les malades d’amour ou lieu de nous imposer, encore une fois, de devoir un subir les conséquences. »

Bah quoi, c’est vrai non ?
Pourquoi ce serait à nous de se casser la raie des fesses quand tout commence, à la base, par leur ingérence en la matière ? Et ce n’est pas comme si je pouvais leur conseiller d’aller voir un psy. Le pauvre risquerait de se retrouver dans notre club avant la fin de l’année.

- « Comme tu dis, je suis certaine qu’ils auront vite fait de trouver chaussure à leur pied. »

Un bon coup de Louboutin là où ça fait mal. Et crois bien que chez la femme ça a autant de mal à passer que chez l’homme. Enfin, pas que j’ai essayé ni que j’ai subi hein. Pas à cet endroit-là du coup. Il n’aurait pas osé. Pas dans la situation dans laquelle on se trouvait. Mais inutile de ramener toujours tout à lui, et par extension à eux, ne trouves-tu pas ?
Question rhétorique et silencieuse qui plus est.
Je te l’accorde.

- « Mais cessons de leur accorder plus d’attention qu’ils ne le méritent. Ils pourraient avoir les oreilles qui sifflent et nous suivre à la trace jusqu’ici. »

Il ne faudrait pas en rire.
Ne sous-estimons pas les psychopathes de nos jours, veux-tu.

Il me prend soudain l’idée de vouloir me lever. Allez savoir pourquoi. Peut-être que j’en ai assez de me laisser aller. Peut-être qu’il est temps de mettre en pratique ce que je viens d’énoncer. Dans le genre fais-ce que je dis, pas ce que je fais, on sait toutes les deux que c’est d’ores et déjà voué à l’échec. Mais si on s’y met à deux – ou quatre, si on prend en compte tous les participants de la pièce – il y a peut-être moyen d’en tirer quelque chose. Pour autant que j’arrive à me redresser. Ce qui n’est pas gagné. Et pas uniquement car je me trimballe vingt-cinq kilos (pour ne pas dire autre chose) de muscle (idem) sur mes tibias. Bob n’insiste d’ailleurs pas, même s’il n’est pas pour autant le plus coopératif dans l’histoire. Je me tiens tantôt au sol, tantôt au mur, tantôt avec mes mains, tantôt avec le front. Et Kyoran aura beau vouloir m’aider à rendre cela moins comique, elle n’est pas sans ignorer ce que la fierté et l’amour-propre peut faire comme dégâts supplémentaires.

Après ce qui doit pouvoir se compter en minutes, je me retrouve finalement droite. Enfin, debout. Le premier, je n’en suis pas totalement convaincue.

- « Et si on allait manger ce bout en extérieur ? »

Histoire de se faire voir ensemble. Histoire de faire gazer les gens tout autour. Histoire de faire savoir au monde qu’on n’a pas peur de ce qu’il pourrait colporter comme ragots par-delà le mur ? Et, un peu aussi, pour pas qu’un livreur cafte sur mon adresse car sa ligne n’est pas codée et/ou qu’il me juge du regard en voyant le désordre qui règne ici.

- « Tu veux passer au cabinet vétérinaire avant ou après. »

Je ne la regarde plus de face et commencer à me diriger – lentement – en direction de ma chambre à coucher, qui donne sur la salle de bain. Il faut quand même que je vérifie un minimum mon look. Juste pour m’assurer que c’est moins pire que ce que je suis en train d’anticiper. Même si je n’y crois pas trop.
Avant de passer la porte, je me retourne encore une fois vers elle. Ma main posée sur l’encadrement, pour me donner consistance.

- « Et Bob est un nom de code. Une sorte de premier filtre. Tu vois, quand on dit qu’on habite en colocation avec un Bob, les gens n’ont pas comme premier réflexe de regarder vers le sol. »

Et je lui décoche ce qui ressemble vaguement à un clin d’œil avant de m’éclipser. Bob à mes trousses. Forcément, à prononcer DEUX fois son propre nom dans la même phrase, qu’est-ce que je pouvais bien penser ?
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyMer 22 Juin - 17:16

Kyoran suivait la tentative de remise à la verticale de Micka, avec un mélange de surprise et de préoccupation. Si elle se relevait, c’était sans doute bon signe, elle se sentait un peu mieux. Ou bien elle voulait juste reprendre une posture plus assurée avant d’indiquer à sa convive la direction de la porte. Mais si ce déplacement avait pour but de vraiment rassurer sur son état, c’était râpé. Vu le temps et les hésitations pour se redresser, pas de doute qu’il ne s’agissait pas juste d’un coup de fatigue passager. Le problème était plus profond, étendu dans la durée.
Elle s’était levée à son tour, mais pas immédiatement. Comme pour lui laisser une petite longueur d’avance. Mais malgré cette clémence, elle arriva en tête de cette course inégale. Elle se retint bien de proposer son bras pour aider la psy. Non, son égo avait trop besoin de cette petite victoire, reprendre un peu le dessus. Elle devait déjà être mortifiée de s’être montrée si vulnérable devant elle.

Kyo ne put empêcher un haussement de sourcils étonné face à la proposition d’aller manger dehors. Certes, elle avait évoqué la possibilité d’aller chercher quelque chose, mais elle ne pensait pas voir cette idée acceptée. Était-ce pour autant une bonne chose ? Difficile à dire. Peut-être qu’elles commençaient un peu trop à tenter leur chance. Il aurait assurément été plus raisonnable de profiter de cette trêve inespérée pour se quitter en bons termes. Enfin. En meilleurs termes, plutôt.
Passé ce moment d’incrédulité, elle hocha la tête tout en époussetant un peu son pantalon.

“Ok ! Une envie particulière ? Tu connais sans doute mieux que moi les bonnes adresses des alentours.”

Et maintenant, elle lui demandait de choisir entre deux options. Véto ou resto. Passer au cabinet vétérinaire semblait une bonne idée pour régler ce malentendu au plus vite. Elle ne savait pas comment gérer un chien et puis, un autre propriétaire était sans doute dans le même état que l’avait été Mickaëla plus tôt dans la journée. Mais vu l’état incertain de son hôte… manger semblait être une priorité. Ca ferait mauvais genre si elle se tapait un nouveau malaise devant le guichet. Elle voyait de là la tête de l’assistante commère qui, décidément, aurait eu du spectacle aujourd’hui.
Non, on n’était plus à une heure près. Not Bob 2 semblait apprécier la compagnie des deux brunes et de son nouveau meilleur copain, alors bon. Autant aller manger un morceau avant de le ramener. Et puis avec sa veine, il s’agissait sans doute d’un clébard sans puce ni tatouage, un chien des rues que personne n’attend. Elle n’était pas pressée d’avoir à trouver une solution à ce problème, s’il se présentait.

“On ira après. Il n’a pas l’air trop malheureux avec nous, alors j’imagine que ça peut attendre un peu.”

Elle n’ajouta pas “et puis tu as besoin de reprendre des forces”. La psy, habituée à prendre soin des autres professionnellement, n’aurait sans doute pas apprécié qu’on inverse les rôles. À tous les coups elle aurait pris ça pour de la pitié, du paternalisme ou de la condescendance. Quelque soit le choix, il serait mauvais.

"Et Bob est un nom de code. Une sorte de premier filtre. Tu vois, quand on dit qu’on habite en colocation avec un Bob, les gens n’ont pas comme premier réflexe de regarder vers le sol."

Kyoran osa un léger sourire en écoutant cette explication. Ce n’était sans doute pas bon signe, d’avoir atteint un degré de parano et de précaution telles que même le choix du nom de ton chien est régi par la peur des autres. Mais l’anecdote restait drôle. Tandis que la propriétaire des lieux s’éclipsait, elle en profita pour récupérer sa veste sur le dossier du fauteuil. Le chien inconnu semblait reconnaître là des signes de promenade imminente. Peut-être pas un chien errant finalement. Ses pattes avant trépignaient d’impatience et d’excitation, tap tap tap, passant d’une patte à l’autre tout en fixant Kyoran avec ses grands yeux, la langue pendante.

“Euh… tu aurais une laisse et à collier à me prêter pour lui ?”

Elle se sentait un peu ridicule à demander ça. Après tout, il l’avait accompagnée jusque-là sans faire d’histoire. Et il ne s’agissait ni de son chien, ni de celui de Micka, alors au pire, s’il leur faussait compagnie, ça serait juste un retour à la situation de départ pour tout le monde. Il ferait sa vie et elle la sienne. Mais bêtement, maintenant qu’elle l’avait amené là, elle se sentait responsable. Elle ne pouvait pas juste le laisser repartir dans les rues, près à se faire faucher par la première voiture venue - le souvenir était encore vivace.
Elle lui aplatit la tête d’une caresse énergique avant de se diriger vers l’entrée. Elle se rendit compte qu’elle aussi avait faim, finalement. Elle se surprit à être presque aussi enthousiaste que son compagnon à quatre pattes à l’idée de cette sortie. C’était étrange. C’était… un vieux sentiment. Une joie facile. Aller manger un morceau avec une amie. Enfin, peut-être pas une amie mais… Depuis combien de temps ça ne lui était pas arrivé ? Quelque chose d’aussi simple, qui n’était pas un calcul, qui n’avait pas d’enjeu. Et oui, Micka n’était peut-être pas vraiment son amie. Mais en même temps, à qui pouvait-elle attribuer ce titre dans sa vie ? Elle avait beau se creuser le cerveau, il n’y avait personne. Ses dernières relations amicales remontaient à sa vie d’avant. Avant Sat, avant la cavale, avant la mafia, la justice, les galères, les rumeurs. Et encore, même à l’époque. Il s’agissait sans doute plus de potes et de connaissances que de véritables amis. Des gens avec qui on aime faire la fête, mais pas des gens sur qui on peut véritablement compter.
Bien sûr, il y avait Gab’. Mais ce n’était pas pareil. Ils étaient indéniablement amis, et Kyoran lui aurait confié son âme. Mais pour autant, leur lien était veiné par ses activités les moins avouables. Ils étaient toujours en train d’échanger autour d’un plan, à trouver ensemble des solutions pour une mission périlleuse. Gweria esquissa une légère grimace. Elle avait parfois le sentiment de se servir de lui. Il était un atout inestimable pour elle et trop souvent, leurs échanges étaient motivés par ses besoins, ses demandes. Trop rarement par une simple envie de passer du temps avec lui ou de savoir comment il allait. Il faudrait qu’elle remédie à ça. Il méritait mieux.

Elle chassa ces pensées d’un bref mouvement de tête.

“Alors, t’es prête ?”

Près de la porte, elle n’attendait plus que le feu vert de Micka pour sortir.

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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyLun 29 Aoû - 22:40

Je garde une main collée au mur tandis que je pénètre dans mon antre. C’est un peu comme s’aventurer dans un labyrinthe. Il parait qu’il faut garder le contact perpétuel avec les parois afin de ressortir de l’autre côté. Eh bien c’est un peu le même principe. Ça et le fait que j’ai surestimé mes capacités une fois debout. Je n’aurais assurément pas dû me retourner aussi rapidement. Même si j’ai l’impression d’avoir effectué cette manœuvre au ralenti. Ça tangue un peu. Comme sur un bateau. À l’arrêt. Toujours amarré. J’ai quelques nausées qui se font une joie de me titiller le dedans en quête de … l’absence de nourriture depuis plusieurs jours. Et j’en remercie silencieusement l’entité invisible responsable de ce choix culinaire. Sans quoi je n’aurais pas donné cher du sol. Et surtout de mes jambes. Même avec Bob à mes trousses. Et l’autre glouton sans nom dans la pièce principale. Mais passons. J’y vais un pas à la fois. En gardant les yeux bien ouverts. Sinon c’est pire.

Au loin Kyo me balance une question à laquelle je n’ai fichtrement pas réfléchi. D’ailleurs l’invitation est sortie sans vraiment demander mon avis. J’aurais probablement dû m’en abstenir. Tout comme elle de répondre. Je présume qu’elle a été autant prise au dépourvu que moi et que nous sommes toutes les deux conscientes que c’est un risque réel de pousser le bouchon aussi loin. Au pire on finira à la spa des poissons rouges … comme Maurice.
Je me surprends à sourire à cette image. Après le clébard, la poiscaille. Ça prouve bien le degré de gravité autour duquel on gravite. Ça doit aussi expliquer pourquoi on ne s’est toujours pas volées dans le chignon (abstraction faite qu’aucune de nous deux n’en porte un prestement). Je vais opter pour un sinistre alignement des planètes. Et l’approche de la pleine lune aussi. Puis pourquoi pas une force invisible perchée là-haut dans le ciel qui a fait un mauvais jet de dés. Autant en profiter tant que ça dure. Pour le même prix, à la fin de la soirée on finira sous un camion. Ou dans le caniveau. Ce qui est encore plus probable que possible. Que karma se joigne à la partie ou non.

Bob me frôle le genou, ce qui m’incite à regarder en direction du sol. Oh tiens, je suis dans la salle de bain. Je ne m’en suis même pas rendue compte. Tellement absorbée par des pensées absurdes mon pilote automatique a pris le relai. Il peut se montrer très efficace celui-là. Du moins, à l’occasion. Ma main, toujours posée contre la paroi la plus proche, me confirme la donne. C’est vachement plus frais au toucher. J’inspire un coup et me « balance » (pour ainsi dire) en direction de l’évier. Plus particulièrement vers le miroir qui en occupe la partie supérieure. Histoire de constater l’ampleur des dégâts. Bon, ça aurait pu être pire. Bon, ça aurait pu être mieux. Mais comme dirait l’autre : ça coûte plus cher. Non pas que je n’ai pas le fric pour, ceci dit. Un peu de maquillage ne ferait pas de mal, mais vu le peu de force que je me trimballe dans les bras (et la tremblote qui va avec), je ne donne pas cher du résultat. J’abandonne donc assez rapidement l’idée. Même si ça me désole un peu, quand même. Je vais me contenter de me jeter un peu d’eau sur le visage et on va voir ce que cela donne. Ça fait longtemps que j’ai cessé de croire aux miracles, mais disons que ça ne peut pas empirer … si ? Je prends quand même un instant pour réfléchir à ce que j’ai pu me tartiner sur le visage ces dernières heures, voire ces derniers jours, pour m’assurer que d’aucun ne risque de mal réagir à quelques gouttes de flotte. Alors comme rien ne me vient, je donne le tout pour le tout. J’ouvre le robinet, je me penche un peu (plus) vers l’avant, prends un peu d’eau dans le creux de mes mains et me noie le visage dedans. À décortiquer le mouvement ainsi, ça n’a rien de compliqué. Mais c’est ce qu’on vous fait croire !

Je ne sais pas vraiment comment ni pourquoi (même si j’ai une vague idée), mais les circonstances (on va dire ça) font que mes genoux se dérobent sous moi. Ajoutez à cela que la partie inférieure et supérieure de mon corps ne partent pas nécessairement dans la même direction et vous aurez une vue assez approximative du tableau final. Résultat des courses, dans une tentative (ou un réflexe) de survie mes doigts s’agrippent au bord du marbre … que mon front finit aussitôt par rencontrer. Bon, faut dire que c’était soit lui, soit la bouche … et inutile de préciser que je n’étais pas en train de trépigner pour perdre une dent. Il n’y a pas à dire, ça fait sacrément mal. Je pense même pouvoir affirmer que j’ai perdu connaissance une fraction de secondes. Juste assez que pour me retrouver à pendouiller entre l’évier (là où mes mains sont toujours ancrées) et le sol (où mes genoux ont trouvé refuge) avec Bob qui vient me balancer un gros steak en pleine poire tout en balançant sa queue faiblement, visiblement content qu’il y a plus de peur que de mal.
Ouais, parle pour toi grosse pantoufle.

Au loin, je perçois à nouveau la voix de Kyo. Par contre j’ai du mal à mettre des mots sur les sons. Je pense percevoir un point d’interrogation, mais de là à l’associer à une question. Je l’avais presque oublié dans l’équation. Mais peut-être est-ce bien d’avoir quelqu’un dans l’appart avec moi. Auquel cas mes mains n’auraient pas eu le bon sens de me retenir. Puis, je me rends compte que je suis toujours accrochée. La scène doit être assez amusante d’un point de vue tiers. Tandis que moi je patauge entre le lâcher-prise et le garder-prise. Je me relève ou je me laisse tomber ? Et ensuite quoi, je rampe jusqu’au salon ? Désolée, mais là encore mon amour-propre n’est pas prêt à assumer. Alors j’inspire un grand coup. Et un deuxième. Puis je tire sur mes bras en même temps que je pousse sur mes jambes. Je dois m’y reprendre à deux fois, mais j’arrive à me redresser (assez péniblement, on en convient). Je ferme les yeux et répète quelques exercices de médiation. Ça tourne toujours, mais déjà moins. Puis plus du tout. J’inspire une dernière fois par le nez avant d’ouvrir les paupières et de fixer à nouveau mon portrait dans le miroir. Je grimace en voyant les dégâts. Fichtre, c’est solide ce truc. Je grimace également quand je tâte la bosse du bout des doigts d’une des deux mains. Ça commence déjà à changer de couleur. Superbe sortie en prévision.

- « Tu devrais peut-être sortir sans moi. »

Que j’arrive à crier (disons plutôt que je hausse le ton) tandis que j’ouvre l’armoire de côté en quête d’un truc pour limiter la casse. Même si je n’ai pas grand-chose de stock dans la pharmacie. Les problèmes de junkie, tout ça tout ça.
Je plisse les yeux tandis que j’applique, tant bien que mal, un peu de crème avant de me débattre avec un sparadrap qui refuse de se détacher de son emballage.

- « Saloperie de ... »

Bob continue à zigzaguer entre mes guiboles à l’image d’un chat. Heureusement je ne suis pas en train de m’enfiler du rimmel …
D’un pied je tente de le pousser en direction de la porte qui donne vers la chambre.

- « Allez houst, tu n’as rien à faire ici et tu le sais. »

Bien sûr qu’il le sait !

- « Va ennuyer quelqu’un d’autre pendant que je termine de me préparer. »

Bon, il faut croire que ma bouche a choisi pour moi. Je termine la partie rafistolage de visage tandis que j’entends la bestiole trottiner son royal popotin jusqu’à nos invités. Je décide de simplement retirer mon sweat et de garder le legging (ça relèvera du défi plus tard pour le retirer celui-là). Mais quelque chose me dit que ça ne va pas être aussi simple qu’il n’y paraît. Du coup … je ravale le peu de fierté qu’il me reste et je retourne direction Gweria. Cette fois-ci sans prendre le mur comme béquille. Ou si peu.
Je dois vraiment méchamment me mordre les dents pour lui balancer ce qui suit :

- « Tu peux m’aider à retirer ça ? »

Je ne la regarde même pas dans les yeux. Merde j’aurais dû la foutre à la porte avec son chien tant qu’il était encore temps de le faire. On se serait quittées comme d’habitude et on n’en parlait plus pour les six prochaines années. Mais là il est clairement trop tard pour rebrousser chemin.

- « Je ne connais rien dans le coin. Je commande et on me livre en bas de l’immeuble. »

Pour les fois où je commande. Ce qui a radicalement diminué depuis mon déménagement. Enfin, depuis le premier. Celui où je suis partie un jour avec le strict minimum sous le bras et sans le moindre regard vers l’arrière.
Je tente de noyer le poisson comme je peux.
Quelque chose me dit que, dans un sens, ça nous arrange toutes les deux.

- « Et toi, tu squattes dans le coin depuis assez longtemps que pour connaître un coin sympa ? »

Qui ne pose pas de questions ?
Then again, à Downfall, est-ce que quelqu’un en pose seulement ?
À bien y réfléchir, ma question peut sous-entendre quelque chose qui n’est pas à l’ordre du jour. Ce n’est pas un interrogatoire. Et je m’en fous bien depuis combien de temps elle se balade de ce côté du mur. À moins qu’elle est ici à la demande de Will … ce qui m’étonnerait. Ou peut-être pas.

Je recherche à nouveau le contact visuel et reste coincée dans le mouvement où je tente d’extirper un bras de mon sweat. Toute sérieuse je lui demande de but en blanc :

- « Qu’est-ce que tu fais ici Kyoran ? »

Genre dans mon appart ?
Genre maintenant ?
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Kyoran Gweria
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyDim 11 Sep - 11:48

Kyoran commençait doucement à s'impatienter. Ou plutôt, chaque seconde qui passait distillait plus de doute et d’appréhension dans ses muscles, rendant l’immobilité difficile. Qu’est-ce qu’elle foutait dans cette salle de bain ? Peut-être avait-elle de gros regrets d’avoir proposé cette sortie ? Elle essayait peut-être de gagner du temps, espérant que Gweria prendrait la porte si elle était trop longue. Ou alors elle comptait simplement rester enfermée dans la salle d’eau et nier son existence en bloc. Comme pour confirmer ses pensées, la psy lui balança une invitation à dégager. Elle inhala profondément avant de lâcher un soupir exaspéré. C’était pour ça qu’elles ne trainaient avec personne en fait. Et encore moins avec Micka. Elle n’aimait pas les revirements d’avis, et qu’on lui fasse perdre son temps. Qu’est-ce que ça voulait dire, lui proposer de sortir manger un morceau et dans la minute suivante lui dire de partir ? Est-ce que c’était un petit jeu de psy(copathe) pour rétablir une sorte de domination, ou de distance, montrer qu’elle avait le pouvoir ? Est-ce que tout le moment précédent, toute cette vulnérabilité n’était qu’une ruse pour que le revers soit plus brutal ?

Elle fronça les sourcils, prête à prendre la porte. Mais en même temps, elle n’allait pas la laisser s’en tirer si facilement quand même, si ?

“Allez houst, tu n’as rien à faire ici et tu le sais.”

Ses yeux s’écarquillèrent, hallucinés par l’injonction et la familiarité avec laquelle elle lui lâchait ça. Ses mains se crispèrent un peu sur sa veste, dont elle tritura le col. Elle jeta un coup d’oeil au chien inconnu : tant pis, pas de laisse, il faudrait espérer qu’il la suive aussi docilement qu’à l’aller. Ce n’est qu’en voyant Bob les rejoindre, l’air penaud, qu’elle s’immobilisa, mortifiée de sa bêtise. Ok, même si Micka ne la portait pas dans son coeur, cette explication était quand même plus logique.

L’un allant rarement sans l’autre, la maîtresse des lieux suivit bientôt son compagnon. Elle semblait réussir à avancer sans appui. À peu près du moins. Mais Kyoran ne mit pas longtemps à remarquer la bosse, ou plutôt le pansement qui trônait sur la bosse qui lui ornait désormais le front. Qu’est-ce qu’elle avait encore foutu… ? Elle la lâchait des yeux cinq minutes et elle arrivait à se blesser, toute seule dans sa salle de bain, il fallait le faire quand même. Ce rappel insidieux de son état temporisa sa décision de partir (quelle softie). Comme pour abattre les dernières défenses, Micka lui demanda de l’aide. Plusieurs sentiments se bagarraient pour l’attention de Kyo. D’un côté, elle était peinée de cette nouvelle preuve de faiblesse témoignée par sa compagne. D’un autre, elle était quelque peu satisfaite que cette dernière ait besoin d’elle. C’était comme une minuscule vengeance sur le fait de lui avoir demandé de partir juste avant. Cependant, le regard de Mickaëla était fuyant, l’évitant avec soin, alors elle décida de ne pas en rajouter. Tout en tendant les bras pour se saisir du sweat et l’aider à s’en extraire, elle lui répondit sur le ton de la conversation :

“Pas vraiment, ça ne fait même pas un an que je suis là, et en dehors du boulot je n’ai pas beaucoup l’occasion de mettre le nez dehors. Je connais bien quelques adresses pompeuses autour du Civic Center, dîners d’affaires, tout ça, mais bon, ça ne me parait pas vraiment le mood pour ce soir, si ?”

Il y avait bien un bar à salades pas très loin, mais vu l’état de Micka, il fallait quelque chose d’un peu plus consistant qu’un menu pour top modèles au régime.

“On trouvera bien un diners dans le coin.”

Mais comme pour la sortir de ses préoccupations alimentaires, l’air sérieux de la psy trancha la légèreté du moment. Ce qu’elle faisait là ? Elle était sérieuse ? Son regard s’écarquilla à nouveau. Paye tes rides du front ! À ce rythme-là, elle allait demander à Micka de lui payer sa crème anti-vieillissement. Prise de court, elle resta un instant interdite, sans vraiment savoir quoi répondre, tergiversant entre claquer la porte sans répondre ou lui balancer une rhétorique bien sentie. Elle arqua un de ses sourcils avant de détailler sa camarade.

“Bonne question. Désolée d’avoir abusé de ton hospitalité.”

Les yeux braqués sur son interlocutrice, il n’était pas difficile de comprendre à son ton qu’elle n’était pas vraiment désolée. Plutôt agacée par ce chaud-froid constant balancé par Micka. Même si elle savait bien qu’elles ne pouvaient pas être amies simplement, pas comme autrefois, elle avait cru qu’elles pourraient au moins tenir une demi-journée en étant cordiales. Accepter de ne pas être constamment sur la défensive, ou pire, sur l’attaque.

"Ça va peut-être te surprendre, mais tu vois, j’étais contente de te voir et de passer un moment sans ces conneries de mauvais karma ou je ne sais quoi. Pendant un instant, j’ai eu l’impression de retrouver une vieille amie. Mais hé, tout le monde peut se tromper, pas vrai ?”

Derrière cette façade de colère, il y avait quelque chose de plus profond. Une blessure. Rien de grave, rien de dramatique. Elle oublierait vite cette illusion de quelques heures et elle reprendrait vite le train de son quotidien. Elle n’avait jamais eu besoin d’amis pour avancer, ça n’allait pas changer maintenant. Elle avait de toute façon d’autres choses à faire, elle n’avait pas de temps pour des bêtises d’adolescente.
Elle avait dit cela sans regarder Micka, fouillant dans la poche de sa veste en quête des clefs de voiture, comme si tout cela n’était qu’une incompréhension sans importance. Elle tapota la tête de Bob avant d’ouvrir la porte, puis se retourna brièvement pour appeler le chien non-identifié à la suivre. Sans adresser un autre regard à la psy ou lui laisser l’occasion de répondre, elle s’engagea dans le couloir avec le clébard sur les talons.

“Si tu te décides, je serais dans la Toyota Camry vert bouteille.”

Et elle disparut dans l’escalier.

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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyLun 12 Sep - 21:44

Qu’est-ce que tu fous ici Kyoran ?
Dans mon appartement.
Tandis qu’on pourrait toutes les deux trouver trente-six mille raisons différentes pour que tu n’y sois pas. Que tu ne sois pas entrée. Que tu ne m’aies pas accompagnée. Que tu n’aies pas tenté de retrouver Bob. Pourquoi Kyoran ?
Pourquoi ?

Je cherche vraiment à comprendre ce qui t’as poussé à agir et réagir ainsi ? De là à ce que tu sois restée quand j’ai fait connaissance avec le sol, je peux le concevoir. Je peux le comprendre. Mais toutes ces étapes précurseurs ? Toutes ces préliminaires de bon samaritain ? Quand bien même c’est toi (et je sais que tu as pris des années à t’en cacher), pourquoi ainsi t’exposer ? Pourquoi prendre le risque d’être repérée ? Pourquoi ici ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi avec moi ?
Est-ce que tu n’aurais pas juste … pu te contenter d’être toi ?

Je souris intérieurement à cette image. Parce qu’au final, c’est exactement ce que tu as fait. Du moins, c’est ce qu’aurais fait la Kyoran d’autre fois. Celle qui aurait dû être morte et enterrée depuis longtemps. Enfin, en ce qui me concerne. Et je ne dis pas ça en mal. Vu toutes les vacheries que j’ai pu te balancer ces dernières décennies (Oui, au pluriel. Oui, on se prend un coup de vieux. Oui, ça fait mal.) il n’y aurait pas de quoi s’en étonner. Qui plus est, je n’étais pas dans un état de semi-conscience quand on s’est croisées plus tôt dans la journée. Un peu (*hum) sur les nerfs peut-être. Légèrement au-dessus de la barre rouge clignotante. Voire un tantinet sur-émotive, je te l’accorde. Mais quand bien même ? Ce n’est pas la première fois pourtant. On s’est déjà quittées en de termes (pour ne pas dire autre chose) fichtrement plus éloquents (et volcaniques, je te le concède) que ça.
Alors pourquoi ?
Qu’est-ce qui a fait pencher la balance en ma faveur ?
Qu’est-ce qui t’as fait changer ton fusil d’épaule ?

Mais il faut croire que j’ai fait mouche quelque part. Y’a comme un bouton pause qui a été enfoncé par une main invisible. Je me demande si, comme dans les films, je pourrais lui passer la main devant les yeux qu’elle ne clignerait même pas des paupières. Ça ne prend bien sûr qu’une fraction de seconde. Ou plusieurs fractions. Mais le résultat en reste sensiblement pareil. Quand elle revient à elle (ou nous à nous, ça tombe c’était un délire collectif), c’est pour me jeter un regard … hum, je ne sais pas trop comment le décrire … dénigrant ? Menaçant ? Gwerian ? (Oui il fallait que ça rime) Comme dans un réflexe (?) je plisse un peu les yeux. C’est bête, car ce n’est clairement pas ça qui va me permettre d’y voir plus clair. J’ai raté un épisode non ?
Je n’ai même pas besoin de poser la question. Sa réplique tombe. Sèche. Cassante. Je mets quelques secondes à remettre les pièces du puzzle dans le bon sens. Un vrai casse-tête chinois (non mais de quoi elle parle au juste avec son abus de qui de quoi je-ne-sais-qu’est-ce ?!). Je vais pour l’interrompre, histoire de resituer le contexte (ça tombe mon expression faciale, ou mon body language – allez savoir, j’ai une bosse je vous rappelle !; bref mon corps a probablement dérapé quelque part ce qui l’a enduit en erreur), je vais donc pour … mais c’est sans compter sa mauvaise foi. Non je vous assure, là c’est vraiment ELLE !

Voilà-t-il pas qu’elle m’agresse limite verbalement. Je la laisse cracher son pus. Non pas me mordre sérieusement les dents pour ne pas lui renvoyer l’ascenseur (quelle expression àlakon !). Elle a besoin d’évacuer ? Qu’il en soit ainsi fait !
Bon, faut aussi dire que j’ai la consistance physique d’une asperge qu’on a jugé utile de redresser à la verticale. S’il me prenait l’idée farfelue de lui balancer un truc … eh bien tout porte à croire que ce truc ce serait moi. Et comme elle n’hésite pas à jeter le karma dans la balance, je vous prie de croire que la mienne est tellement pourave que je n’arriverai même pas à la toucher. Ou, au contraire, je lui tomberais franco dessus, elle perdant son équilibre et nous aurions été dans une position – ma foi – fort compromettante. Surtout si je rajoutais un peu de mauvaise foi de mon côté pour rendre la scène encore plus WTF. Mais je passe. J’encaisse. Je me contente de la regarder. Sans un mot. Sans un geste. Ça me prend déjà toute mon énergie pour rester droite sans m’appuyer sur un mur alors …

Mais dans l’équation il n’y a que moi qui la regarde. Elle a abandonné la guerre avant même qu’elle ait officiellement débutée (et pourtant c’est elle qui l’a déclarée celle-là, si je vous le dis !). Elle fait mine de fouiller ses poches. Bob a droit à une caresse. Moi à que dalle. Bon je ne vais pas m’en plaindre, je l’aurais sûrement mal pris si elle m’avait fait la même chose. Et voilà qu’elle décampe. Ligne droite (et pas peu fière) en direction de la porte d’entrée. Elle siffle après son protégé (qui à défaut de nom doit se contenter de) qui ne tarde pas à la rattraper. De sa part à lui, au moins, j’ai droit à une dernière œillade. Mais pour le même prix il voulait juste s’assurer que Bob allait le suivre. Ce qu’il ne fait pas. Même si lui aussi me regarde avec ses grands yeux où miroitent des points d’interrogations de toutes les couleurs (ça doit être mon imagination qui me joue des tours). Je soupire un coup. Ils me désespèrent. Tous les trois. Plus encore quand ils s’y mettent ensemble.

La porte commence doucement à se refermer sur ses gonds quand j’entends une dernière phrase arriver jusqu’à moi. Phrase qui me laisse perplexe. Et un peu sur le cul (même si, on s’entend bien, il est toujours debout). Ma bouche s’ouvre, ou du moins va pour s’ouvrir, mais rien ne sort. Et la porte se referme. Après quelques secondes, qui semblent s’écouler sans demander mon reste, je baisse la tête en direction de l’amour de ma vie (non parce que je suis assurément la sienne vu le jiggle de sa queue à la simple miette d’attention que je lui propose) :

- « Mel Gibson non plus il n’a jamais compris ce que pensaient les femmes. »

Et ce n’est pas faute d’avoir essayé. Peut-être que si je me faisais électrocuter … haha, bonne idée. Kyo va adorer ! Je secoue (légèrement) la tête. Pour dissiper la pensée. Et le sourire en coin qui va avec. C’est là que je réalise que dans le feu de l’action, elle a quand même réussi à retirer mon sweater. Ouf j’ai envie de dire. Je vérifie ce que j’avais enfilé en-dessous. Quelque chose qui fait la transition entre un t-shirt et un débardeur, de couleur blanche. J’ai bien envie de me changer, mais après l’épisode de la salle de bain et le fait qu’elle va me laisser me débrouiller seule pour descendre l’escalier (je peux toujours essayer sur les fesses ?) … Le legging aussi me fait hésiter. Je sens mes lèvres mimer une moue. Again, mon condition physique joue en ma défaveur. Va falloir que je fasse avec. Et moi aussi.

À mon tour de tapoter la tête de Bob (sans aller trop en avant et risquer de me vautrer le nez dans le parquet) :

- « Sois sage, je ne serai pas longue. »

Et d’attraper une veste légère au porte-manteau (un minimum de décence et de camouflage ne peut pas de mal) avant de sortir à mon tour (en vérifiant bien que mon sac possède le nécessaire pour rentrer, et pour payer – du-uh). Tout en haut de l’escalier, je prends un moment supplémentaire pour inspirer en prévision de ce qui va suivre. Bon, ce sera toujours plus facile que de devoir les monter. Ce sera un souci pour plus tard. Et je me lance (mais pas trop fort, ni trop vite). D’ailleurs j’ai l’impression qu’il me faut une éternité pour arriver en bas. Avec la chance que j’ai (et l’indice karma en ébullition), il n’y aura pas de voiture vert bouteille à dénicher à l’horizon. Soit parce qu’elle se sera barrée (je ne peux pas lui en vouloir, même si un peu quand même), soit elle m’a raconté des salades sur la couleur (ce qui n’est pas vrai, car je l’ai vu passer en voiture en cherchant Bob, mais chut !).

Eh bien non, elle est bien là (mauvaise langue que je fais). J’ouvre la portière convoyeur et inspire (encore une fois) avant de me hisser dans la bête. Et dire que j’étais à terre il y a moins de dix (quinze ? vingt ?) minutes. Je m’installe, enfin j’essaie. J’ai l’impression d’être un sac d’os qui tient ensemble que parce que la colonne vertébrale à la flemme de se détacher.

- « Du pompeux autour du Civic Center hein ? »

Comme si de rien ne s’était passé entre la proposition et maintenant.

- « Le mood n’y est peut-être pas, mais la thune oui. »

J’en ai.
Elle en a.
Nous en avons.
Et à Downfall il n’y a pas non plus x mille endroits pour aller la dépenser.

- « Mais est-ce qu’ils me laisseront seulement entrer sapée ainsi ? »

Et encore, on a jarté le sweater !

Je ne la regarde à aucun moment. Mon regard fixé vers l’avant. À travers le pare-brise. Sur cette magnifique (*tousse) ville que nous avons toutes les deux choisis pour, au final, la même stupide et utopiste idée.

- « Ce n’est pas ce karma-là que je visais par ma question. »

Comprendra ce qu’elle voudra.
Je ne vais pas m’excuser une nouvelle fois.
Je vais la faire gerber.
Et moi aussi.
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Kyoran Gweria
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptySam 1 Oct - 14:01

Kyoran se laissa le temps de la descente jusqu’au rez-de-chaussée pour calmer ses nerfs. Pour chaque marche, elle se délestait d’un lambeau de rancœur. Elle s’enfonçait dans les escaliers comme dans une eau claire censée la purifier. Bye bye la fureur qui avait jailli à ce “Qu’est-ce que tu fais ici Kyoran ? ”. Une marche de plus et tchao la déception d’avoir cru à une trêve. Encore une et adieu la culpabilité, cette impression d’être encore trop naïve parfois, même après toutes ces années et toutes ces galères qui auraient dû lui endurcir le crâne. C’était l’avantage de son activité secrète : elle avait appris comment gérer ses émotions afin de s’en détacher quand il le fallait, pour qu’elles n’entravent pas ses actions. Elle avait assez de bagages, la seule manière de ne pas crouler sous leur poids était de savoir les ranger dans un coin en attendant d’avoir la disponibilité d’esprit pour trier tout ça.

Dans son dos, elle pouvait entendre le trottinement joyeux du chien. Il ne savait pas où ils allaient, mais il la suivait avec enthousiasme, serein, comme s’il la connaissait depuis toujours et se fiait à elle sans la moindre crainte. Ça devait être bien, d’être aussi insouciant, optimiste. Pouvoir accorder sa confiance comme ça, sans peser le pour et le contre indéfiniment, sans être sur la défensive, sans guetter le coup bas qui ne manquerait pas d’arriver, c’était certain. Une fois les dernières marches et ses pensées négatives derrière elle, elle ralentit son allure pour laisser l’animal revenir à son niveau. Sa grosse tête s’appuya contre sa cuisse, la langue pendouillante, le regard en biais vers elle. Il n’y avait pas une pensée derrière ces grands yeux. Elle lui ébouriffa la tête avant de se remettre en marche vers la voiture. Lorsqu’elle ouvrit la portière côté passager, il ne se fit pas prier et bondit sur le siège. Il prenait vite les mauvaises habitudes, apparemment.

Assise derrière le volant, Gweria expira, expia les derniers résidus de tension, avant d’observer son compagnon. Bon, maintenant qu’il n’y avait plus Mickaëla à nourrir, il semblait logique de retourner au vétérinaire pour essayer de retrouver le propriétaire du canidé. Un petit pincement quelque part dans la poitrine. Même si elle savait que la meilleure issue à cette situation serait qu’il ait une famille et qu’il la rejoigne, il allait lui manquer. Juste un peu. L’animal amenait une légèreté et une tendresse qui manquaient cruellement à son quotidien. Et puis quand elle était sortie de l’appart, il n’avait pas hésité. Il aurait pu rechigner à partir, préférer rester jouer avec son copain Bob et bouffer toutes ses croquettes. Au lieu de cela, il l’avait suivie et c’était une loyauté pour laquelle Kyoran était reconnaissante, même si elle n’avait rien fait pour la mériter.

Mais non. Elle n’avait pas assez de temps pour bien s’occuper d’un animal. Elle s’ébroua, comme pour se remettre les idées en place. Ce qui ne servit pas à grand-chose, car c’est à cet instant que la psy grimpa dans la bagnole, prenant la place du chien qui descendit de mauvaise grâce à ses pieds. Kyoran aurait souri en voyant la bestiole contorsionner maladroitement son gros corps pour se trouver une place, si toute la raideur du dernier échange avec Micka ne lui était pas revenue implacablement en la voyant.

*J’espère qu’il va lui baver dessus, au moins*

Sa passagère prit la parole comme si de rien n’était. La seule indication d’une certaine gêne était ce regard invisible, fuyant, qui trouvait toujours quelque chose d’autre à observer. N’importe quoi, tout sauf elle. Kyoran se rasséréna à cette observation. Il n’aurait pas été acceptable qu’elle soit trop pimpante, tout de même. À cette absence de contact visuel, Kyo répondit par un mutisme de rigueur.

Mickaëla semblait d’humeur dépensière. Contrairement à ce qu’elle aurait cru, la perspective d’un repas dans un restaurant snob ne la rebutait pas autant qu’elle. Kyoran s’était dégoûtée de ces lieux. Elle qui aimait tant les repas délicieux et les lieux splendides, des années de dîners d'affaires insipides avaient fini par les lui rendre insupportables, indéfectiblement liés à des discussions hypocrites et des compagnies détestables. Un bref regard vers sa camarade lui suffit pour noter sa tenue, qui ne passerait certainement pas l’examen d’entrée à l’une de ces adresses huppées. Mais elle n’allait pas commenter là dessus. Et puis quoi encore, lui faire ce plaisir pour qu’elle puisse ensuite lui renvoyer dans la figure qu’elle était mesquine ? Hors de question. Elle comptait profiter de l’excuse du chien pour se rediriger vers un établissement plus humble, mais avant qu’elle dégaine cette excuse, la psy avait relevé ses manquements vestimentaires, toute seule, comme une grande. Kyoran n’esquissa pas un sourire mais une légère inclinaison de la tête vint confirmer cette crainte. Elle enclencha le contact et engagea la voiture dans les rues, en quête de leur prochain repas.

“On devrait pouvoir trouver autre chose. De toute manière, avec…”

Son regard descendit sur le chien qui semblait trop content de faire partie de cette aventure.

“... Ben, je doute que les pompeux nous laissent entrer.”

Elles roulaient depuis une minute ou deux lorsque Micka lâcha une nouvelle énigme. Pas ce karma-là qu’elle visait ? Qu’est-ce qu’elle racontait encore. Kyo comprenait bien qu’elle faisait référence à sa dernière phrase avant d’avoir quitté l’appartement, mais en dehors de ça, mystère. Il y avait plusieurs sortes de karma maintenant ? Impassible, elle continuait à fixer la route et à guetter les bâtiments sur le côté. Elle avait bien conscience qu’elle avait remonté les murailles, remis le masque froid et efficace. Mais intérieurement, elle continuait à retourner la phrase, à essayer de la craquer comme une noix. Elle finit par laisser tomber. Tant pis cette devinette resterait sans réponse et Micka devrait se contenter de son silence. Kyoran à ce moment n’avait plus qu’une idée en tête : trouver un resto, s’assurer que Micka mange un truc (c’était juste pour sa conscience : si elle avait abandonné Micka et appris après coup qu’elle avait fait un malaise, elle aurait culpabilisé), puis retourner au véto. Après, elle pourrait reprendre le cours de sa vie habituelle. Une to-do list factuelle, sans émotion superflue.

Peu après, elle se gara le long d’un trottoir cahoteux. Enfin, l’enseigne d’un dîners semblait indiquer qu’ils étaient ouverts, malgré une salle désertique. L’avantage avec ce genre de lieu, c’est qu’en principe, ils servent à toute heure de la journée et acceptent n’importe qui sans trop de questions. Le chien aurait pu poser problème, mais les clients n’avaient pas l’air de se précipiter alors Kyoran doutait qu’ils feraient la fine bouche.
Elle s’extirpa du véhicule, marqua un temps d’arrêt sur le trottoir, à proximité de la portière de la passagère. Elle n’allait pas lui ouvrir la porte tout de même. Ni faire le moindre geste pour l’aider. Mais, quand même. Si jamais elle se sentait mal, autant être à portée de main pour réagir. Manquerait plus qu’elle se pète la tête sur le coin du trottoir, et ça serait encore sa faute.

Toujours sans un mot mais une fois qu’elle fut assurée d’être suivie par ses deux compères, elle se dirigea vers l’entrée du resto. Elle n’avait pas demandé à Micka si ça lui allait. Elle ne comptait pas lui laisser tellement le choix. Ça ne sentait pas la grande cuisine, mais il y avait des pancakes, des gaufres, des œufs, des burgers… Elle trouverait bien un truc pour se retaper, et c’était tout ce qu’on attendait de ce repas. Une nécessité alimentaire.

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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran]   [TERMINÉ] Vade Retro [Mickaëla x Kyoran] EmptyDim 9 Oct - 20:27

Je ne la regarde toujours pas. Même pas du coin de l’œil. Car quelque chose me dit qu’elle, elle me regarde. Alors j’aimerais bien éviter ce moment akward où on ne va pas vraiment se regarder, ni vraiment ne pas se regarder. Enfin, vous me comprenez. Donc je fixe toujours devant moi. Du moins j’oblige mes yeux à aller dans cette direction. Pour le même prix je pourrai baisser la tête et fixer la bestiole avec laquelle je suis obligée de partager mon espace vitale. Sympa la douche de poils … même si j’avais eu une tenue plus adaptée au bon-chic-bon-genre, cela aurait fait un magnifique raté. Et quelque part (oui quand même) je suis limite contente de ne pas avoir réussi à changer le bas. Déjà que Bob n’a pas le droit de m’approcher quand je suis en tenue de sortie, si en plus je rentre ce soir (pour autant que j’arrive à rentrer, mais c’est un débat à avoir plus tard) avec l’odeur et la poilure d’un autre … quand bien même ils ont fait copain-copain dans la pièce de vie … non, évitons. Le legging je peux toujours le brûler après coup. Ce n’était déjà pas l’idée du siècle à la base de l’avoir enfilé. Et ne parlons même pas de le retirer. Mais ça aussi, ça attendra. Car entre-temps, eh bien nous avons démarré.

Mes derniers mots quittent ma bouche à ce moment-là. Pas certaine que j’avais envie de dire ça à voix haute. Même, en même temps, j’estime qu’elle mérite de l’entendre. Enfin, elle mérite ce qui se cache derrière. Et que j’ai tellement enrobé de glue et de WTF que ça ne veut probablement pas-slash-plus dire grand-chose. Certainement pas sorti de son contexte. Certainement pas tant qu’elle n’a pas développé des compétences télépathiques. Ce que, sincèrement, je n’espère pas. Même si, je dois bien l’avouer, entre nous ça aurait grandement pu faciliter la communication. Mais il y a certaines choses qui se doivent de rester là-haut et ne jamais en sortir. Sous aucun prétexte quelconque. Dans ce meuble tout poussiéreux avec son gratte-ciel de tiroirs. Tous plus remplis les uns que les autres. Avec des serrures toutes rouillées et une clé unique. Parce que, soyons honnêtes, c’est plus pratique. Mais c’est aussi plus réaliste. Il suffit d’ouvrir une seule porte pour que Pandore fasse son apparition surprise. Et cette clé, justement, je trouve qu’elle approche un peu trop de la surface. Elle arrive à portée de main de quelqu’un d’autre que moi. Et je ne veux pas de cela. Je ne suis pas prête. Kyoran a beau savoir certaines choses, il y en a d’autres sur lesquelles je n’ai ni l’envie ni l’énergie de me confier. Pas avec elle. Pas avec quiconque. Ce n’est pas elle. C’est moi. Ça a toujours été moi.

Je m’égare en pensées. Je dérive vers des souvenirs que je pensais pourtant enfermés à double, voire quadruple, tour. Au lointain, il me semble entendre la voix de la conductrice. Mais je peux me tromper. Tout se passe peut-être dans ma tête. Je fixe le paysage sans vraiment le voir. Au plutôt, ce n’est pas le présent que je regarde. Combien de fois n’aies-je pas fixé le vide ainsi ? Combien de fois n’aies-je pas envisagé d’ouvrir la porte du véhicule en mouvement ? Combien de fois n’a-t-il pas glissé sa main sur ma cuisse en ces moments ? Non pas pour rassurer, mais uniquement dans le but de me posséder. De me marquer. Je sens mes dents se serrer à cette image. À cette emprise. Je pensais qu’au plus j’instaurais de distance entre nous, au plus ce fil invisible liant nos alliances allaient se tendre ; pour – in fine – finir par se rompre. Fait est de constater que c’est rarement aussi facile. Ma gorge est sèche. Déglutir semble retentir dans mes oreilles comme si c’était le bruit le plus assourdissant que je sois capable de reproduire. Comme si j’allais éclater les tympans de Kyoran si jamais il me venait à l’idée de recommencer.

Mes doigts se sont crispés. Sur quelque chose. Mais quoi ? Quand mon regard daigne enfin aller en ce sens, c’est pour tomber sur deux grands yeux globuleux qui me fixent avec la même intensité qu’un Bob. Sauf que Bob est plus près du sol. Et moins poilu. Cela me ramène néanmoins à la réalité. Et quand je déporte mon attention vers le siège à ma gauche … c’est pour me rendre compte qu’il est vide. Tiens, quand est-ce qu’elle est descendue ? Et depuis quand sommes-nous à l’arrêt ? Le sommes-nous seulement ? Un rapide mouvement du visage vers l’autre côté me rassure sur plusieurs points : la voiture ne bouge plus. Kyoran m’attend dehors. Avec une moue un peu exaspérée sur le visage. Je me demande vaguement combien de temps j’ai été ailleurs. Beaucoup trop. C’est un fait.

La bestiole sans nom, quant à elle, semble apprécier ce moment en tête à tête. Il a d’ailleurs posé la sienne sur ma cuisse gauche et tente de m’hypnotiser avec son regard de chien battu. Dommage pour lui, ce n’est pas un cocker. Mais ça fera l’affaire. Non pas que j’ai pour habitude de céder au chantage affectif (trois années passées avec Bob et il n’a jamais réussi à me chauler la moindre bouchée de viande … peut-être parce que j’en mange peu, peut-être parce qu’il est allergique …) ; ce n’est pas aujourd’hui que je vais céder. Ah ben en fait si … voilà qu’il sort avant moi tandis que mes doigts ont réussi à trouver tous seuls comme des grands comment ouvrir la portière. Bon, ce n’est pas pour autant qu’il aura mon repas. Pour autant qu’on puisse parler de repas.

Je m’extirpe à mon tour de l’habitacle et referme derrière moi. Pas que je suppute que quelqu’un puisse avoir l’audace de voler cette beauté technologique, mais comme nous sommes toujours à Downfall … preuve en est la tenue complètement improbable que je me trimballe. Je soupire intérieurement et me fais le serment solennel de ne plus jamais sortir ainsi, peu importe le côté du mur.

Chien sans nom (il va vraiment falloir que Gweria se décide) me devance en trottinant joyeusement en direction de celle qu’il a d’ores et déjà adopté (il n’y a qu’elle qui refuse de voir l’évidence en face … tiens, ça me rappelle vaguement quelqu’un …). Je les rejoins un peu plus péniblement, mais toujours debout. Et ce sans aucun soutien quelconque. J’en suis la première surprise. On pénètre le resto (si on peut appeler cela ainsi) qui annonce notre présence par une petite clochette. Cela en serait presque coquet. Presque. Je suis Thelma (car je me sens d’humeur Louise pour le coup) vers une petite table près de la baie vitrée. Cet endroit sort vraiment d’une autre époque. J’ai quelques romans de Stephen King qui me traversent les méninges. Pas certain que ce soit encourageant.

Dans un silence un peu pesant (enfin je le perçois comme tel, mais je suis certaine que les autres s’en balancent comme de leur première culotte), je parcours la carte du regard. Kyoran semble en faire de même tandis que le gros toutou tente de négocier une place à ses côtés sur la banquette.

Une serveuse finit par nous rejoindre. Toute joyeuse. Toute stéréotypée. C’est moi où on a atterri dans un film des années quatre-vingt?

- « Une salade composée s’il vous plait. »

Et, devinant plus que ne voyant effectivement le regard que me lance ma partenaire de crime, je rajoute prestement :

- « Et un muffin chocolat-banane. »

Sinon je sens bien qu’elle va me fourrer du sucre à la seringue. Ou au poing. Voire les deux. Et je n’ai pas la force physiquement pour seulement envisage de la contrer.
La serveuse en profite pour prendre sa commande avant de rebrousser chemin. Je la regarde encore un instant avant de revenir vers miss violence-si-je-ne-mange-pas.

- « Ça rappelle la fac, tu ne trouves pas? »

Je sens un ersatz de sourire me glisser sur les lèvres.
Nostalgie quand tu nous tiens.

- « Avec vingt-cinq ans de rides et de soucis en plus. »

Mademoiselle rabat-joie pour vous servir.
Enchantée.
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