[TERMINÉ]Si le crocodile a la queue retournée, ce n’est plus un Lacoste, n’est-ce pas? [PV India]

La douleur va et vient. Même si elle a plutôt tendance à venir. C’est que l’adrénaline a pas mal redescendu là-dedans. Le deuxième coup de feu n’aura donné qu’une maigre récolte. Bon, faut dire que malgré le fait que ce n’est pas profond, ça coule bien. Voilà encore un vêtement que je ne pourrai jamais me permettre de remettre un jour. Pas que ça va me tenir éveillée de la nuit hein. Déjà il n’en faut pas autant pour en arriver là. Mais soit. Malgré le garrot, que quelqu’un va finir par devoir me retirer si je veux éviter pires séquelles, je suis quand même lucide au point de deviner que j’ai perdu plus que nécessaire (pour autant que nécessité il y avait). Pas non plus de quoi réclamer une transfusion à l’hosto (D’ailleurs, avec quel sang ? Comme partout dans le monde c’est pénurie à gogo car tout le monde préfère garder le sien égoïstement dans son propre corps.), mais suffisamment que pour avoir emporté une partie d’adrénaline et d’énergie à sa suite. Heureusement je suis assise (enfin, si on peut appeler cela ainsi) sans quoi ce serait encore plus pénible.

Le fait que l’agent accède à ma demande d’appeler les secours me rassure quelque peu. Et encore, je suis certaine que c’est pour la vendeuse qu’il s’affaire le plus. Ce qui est logique. Des dommages collatéraux présents dans cette pièce, je suis bien son dernier souci. Et même moi j’aurais pu me reléguer au second plan si les spasmes de douleur ne me faisaient pas grimacer autant. Je déteste quand mon corps prend le dessus sur le reste. Ce qui est un peu son droit le plus stricte, on est d’accord. Et accessoirement cela devrait me rassurer en ce qui concerne instinct de survie et autres balivernes. Mais là pour le coup, si je pouvais m’en passer …

- « Mickaëla Andersonn. »

Que je réponds machinalement. Il serait peut-être temps que j’arrête d’utiliser son nom d’ailleurs. Mais pour cela faudrait-il encore que le divorce soit prononcé officiellement. Et pour cela il faut qu’il signe ce stupide bout de papier de mes deux. Et puis quoi Micka, tu reprendrais ton nom de jeune fille ? Celui qui colle au cul de ton paternel telle une mouche à son brin ? Et en plus tu voudrais l’utiliser ici ? Au vu et au sus de tout Downfall ? Avec tout ce qui ça implique derrière ? Mouais … je me disais bien. Va pour Andersonn alors. Avec le double –n, de nazi.

Entre-temps les secours débarquent avec un magnifique brancard dernier cri (façon de parler, faut bien relativiser dans ce genre de situation). La vendeuse geint et gémit et je me contente de lever les yeux au ciel (ou plutôt au plafond) pour ne pas lui balancer le fin fond de ma pensée. Certes elle n’a pas besoin de ça ici et maintenant, mais peut-être que d’autres oui. Pourtant je m’abstiens. Quelle grande fille que je fais.
Les minutes s’écoulent avant qu’on vienne me prendre en charge à mon tour. J’ai droit à une attelle pour immobiliser ma jambe et la tenir bien droite. Inutile d’un deuxième brancard pour ça (puis faudrait déjà l’avoir hein), mais je ne dis pas non à la personne qui m’aide à (très) péniblement monter les escaliers. ‘tain ça me semblait vachement moins long en descente.

Quelques longues, lourdes, interminables et j’en passe minutes plus tard, me voilà l’air libre. Le souffle court. Le front en sueur. Si on pouvait mettre ça sur la plaie par balle plutôt que sur ma condition physique déplorable, ça m’arrangerait. D’ailleurs, je signe où ?
Toujours soutenue par un bras aidant, je sautille en direction d’une des ambulances. Mon pronostic vital n’était pas engagé (il ne manquerait plus que ça !), j’ai droit à un peu d’espace pour respirer en attendant qu’on démarre. C’est là que je vois ma petite autoproclamée relookeuse s’approcher en toute discrétion. Je hausse un sourcil. Non mais elle joue à quoi là ? Désolée de te le dire princesse, mais ils n’en n’ont mais alors strictement rien à cirer de toi tu sais. Mais si tu continues à agir de la sorte, tu vas vraiment devenir suspecte.

Elle finit par me glisser un petit papier (où je m’attends presque à découvrir un code secret qui me permettrait de devenir encore plus riche que je ne le suis déjà vu son comportement) et quelques mots qui me font sourire bien malgré moi et la situation qui nous entoure.

- « Promis. Mais la prochaine fois j’investis dans un gilet par balle. À moins que cela existe en modèle sac ? »

Haha. Humour àlakon. Et dire qu’on ne m’a même pas encore donné la moindre dose de morphine. Et que ça ne risque même pas d’arriver. Limite pas qu’on va me recoudre ça à l’arrache entre la soupe et les patates. Y’a quand même de ces expressions, je vous jure …

- « Croyez-moi, c’est mon quotidien. C’est vous qui n’allez pas vouloir réitérer l’exploit. Mais je garde vos coordonnées. Ne sait-on jamais. Passez néanmoins une belle fin de journée mademoiselle Jodie Carter. Et au plaisir. »

Je sais, je sais, je n’aurais pas dû insister ainsi sur son nom, mais que voulez-vous. Parfois c’est difficile de ne pas céder à la facilité.
Et sur ce, je m’installe aussi confortablement qu’il est possible de le faire à l’arrière d’une ambulance avec une jambe en stretch et attend que les portes se ferment.
Claudia va être tellement ravie de me voir débarquer ainsi aux urgences.
Et moi donc.
Et moi donc.