[TERMINE] master of puppets, I'm pulling your strings + valentin arsenault

Sintra arqua un sourcil dubitatif lorsque le français se vanta, gonflé d’orgueil, être le genre de personne capable de surprendre. Et donc de la surprendre également. Cet aveu, elle l’avait concédé uniquement dans le but de le flatter. Car si Valentin se montrait étonnamment capable d’une réserve avisée, il n’en demeurerait pas moins un homme narcissique, et donc vulnérable. La coréenne avait déployé au cours de cette soirée de nombreuses stratégies afin d’atteindre et de coincer le fils Arsenault : jouer les âmes blessées et désespérées, créer une tension sexuelle de plus en plus forte, flatter son ego avide d’égards, suggérer vouloir s’en remettre à lui et son pseudo-pouvoir. Toutes ces stratégies avaient été soigneusement orchestrées, dans le dévoilement progressif de ses réelles intentions : se présenter à lui, et amorcer l’idée d’un accord pouvant profiter à chacun, tout cela dans le cadre chaleureux et intime d’une rencontre. Elle avait espéré attiser sa curiosité, l’amener à la suivre dans un rapport de force duquel il aurait voulu sortir vainqueur, ou du moins, dans lequel il aurait pris ce qui lui était offert. Or, les intentions de la coréenne dépassant le cadre de la simple baise, elle avait perdu l’intérêt de sa cible. La femme qu’il voyait enfin ne l’intéressait pas, et lui inspirait la prudence. A raison. Pourtant, Shinohara refusait de lui concéder qu’elle l’avait sous-estimé. Elle savait clairement à quoi s’en tenir avec ce connard, et il n’y avait pas de quoi s’en sentir honoré.

Toujours était-il qu’elle le laissa dans le fantasme de sa superbe. S’astreignant à un silence, la jeune femme se leva, mue par l’envie de fumer une cigarette et de boire un nouveau verre de whisky. Elle s’amusait à reprendre les codes utilisés par la pègre pour les négociations et de transactions. Le français accepta la cigarette offerte, que Sintra alluma, en bon hôtesse. A sa désinvolture s’opposait la rigidité avec laquelle l’héritier Arsenault voulait certainement faire transparaître son inflexibilité. A d’autres Valentin… Cette mascarade, il n’y avait que lui dans cette pièce pour y croire. S’il refusait de contracter quoique ce soit avec elle, c’était uniquement parce qu’il était vexé. Vexé de ne pas avoir suscité le moindre désir charnel chez elle.

D’une voix douce, Sintra lui exposa sa situation et ses projets. Projets qui le concernaient, puisqu’elle sollicitait son soutien, de sa place, désignée comme influente et de fait, intéressante. Un sourire gagna les lèvres du français. Sourire que la coréenne lui rendit, le teintant de respect. Or, Shinohara savait parfaitement que ce trou du cul n’était que le fils de la Reine Mère Arsenault, et que là était son seul statut, sa seule valeur au sein de l’organisation criminelle. En l’approchant, Sintra avait voulu miser sur ses tendances cupides, narcissiques et impulsives, pour devenir l’amante et l’associée. Même si ce soutien était conditionné par le fait qu’il la prenne en pitié, dans sa grande générosité et condescendance. Mais elle ne s’était pas laissée leurrée par son nom, aussi prestigieux était-il. Sa mère devait être tellement déçue d’avoir mis au monde un tel abruti.
En guise de réponse, Arsenault l’accusa de s’être fourvoyée dans ses manœuvres, dans cette mascarade à laquelle elle s’était livrée pour l’approcher. Il lui affirma qu’ô grand jamais il n’aurait perdu son temps à discuter avec elle après l’avoir épuisée. La jeune femme se permit un rire pincé et appuyé. Elle se retint néanmoins de les reprendre, lui et ses fantasmes, et accepta sans ciller son refus de négocier avec elle. Il voulait avoir les idées plus claires. La porte n’était donc pas fermée ; il s’autoriserait à revenir vers elle, peut-être en ami. « Tu sais où me trouver » se contenta de répondre la jeune femme, percevant qu’il serait réellement risqué de froisser davantage son ego déjà endolori par une érection insatisfaite. « Bonne soirée Valentin. Au plaisir. » Shinohara roucoula ces derniers mots, offrant un regard chaleureux à l’homme qui partait.

Une fois libérée de la présence du français, Sintra s’allongea à nouveau dans le canapé. D’un geste doux et maitrisé, elle fit tourner l’alcool contre les parois de son verre, pensive. Au vu de l’attitude de sa cible et du résultat de son approche, elle allait devoir taper plus haut, dans la gamme réellement puissante. Il irait voir Auclair, puisque Arsenault n’était pas capable de reconnaitre et saisir les opportunités offertes. Elle changerait bien évidemment de tactique, et ferait passer Valentin pour un homme aux penchants insistants et délacés. Et au fond, ce changement de cible et de fait de stratégie convenait à la coréenne qui ne serait pas contrainte d’entretenir l’ego de ce connard pour négocier les futurs accords.