Toujours au bon moment au bon endroit, ou presque. ft Malcom

Voila dix jours que j’ai pris une balle perdue et je commence seulement à m’en remettre. Je n’ai plus osée sortir depuis que je suis rentrée et ce même si je demeurais dans un hôtel miteux. Je n’ai même quasiment pas mangé. Je n’ai pas donné de nouvelles non plus. A qui de toute manière? Je n’ai aucune attache dans cette ville si néfaste à la vie paisible. Malgré tout, si je veux espérer m’en sortir, je dois me bouger les fesses et surtout trouver un quartier plus calme et essayer de revoir Mal pour qu’il m’aide à m’apprendre à me défendre et à survivre dans ce milieu si hostile. J’ai l’impression d’être une proie à chaque seconde que je passe dehors. Et chaque fois que j’entends un bruit soudain je me planque ou je m’accroupie pour éviter un éventuel projectil. Autant dire que je ne suis pas très vaillante et courageuse.

J’ai donc pris la décision, ne pouvant sortir de cet endroit de malheur, d’aller dans le quartier dont m’avait parlé Mal. il semblerait que je puisse trouver mieux là-bas qu’ici et en même temps, s’agissant du centre ville, j’espère que le lieu est bien plus calme et plus sécurisé. Encore que j’ai de gros doutes à ce sujet.

Je me suis donc préparée pour aller en repérages. Mes valises sont prêtes car si je trouve effectivement bien mieux, je ferai un aller retour pour tout récupérer. Encore que je ne sais pas si j’aurais la force de le faire aujourd’hui, ma blessure étant toujours douloureuse. Sans compter le stress que le trajet provoque. Pour essayer de ne pas paniquer au moindre bruit, j’ai enfoncé mes écouteurs dans mes oreilles et j’essaye de ne pas regarder autour de moi, paniquée par le monde. Au contraire, je me concentre sur ma destination, priant pour trouver quelque chose de bien mieux.

Le trajet m’a parut durer une éternité mais lorsque je suis arrivée devant le Café Français, je n’ai pas pu m’empêcher de dire “Wahou”. Je ne m’attendais pas du tout à cela après avoir vécu plus d’un mois dans un quartier bien miteux à côté. J’entre dans le lieux et j’en profite pour piquer un journal qui traîne dans le distributeur dans l’optique de me poser à une table après avoir commander un frappucino et d’analyser les petites annonces. Mais c’est sans compter ma maladresse et ma peur de tout. Dans un enchaînement incompréhensible d’événement, c’est une vraie catastrophe qui s’opère. La porte d’entrée claque dans un bruit sonore qui me fait sursauter si fort que je lance le journal sur la tête d’un client tout en faisant valdinguer ce qui se trouve sur le comptoir devant la serveuse qui me demande ce que je veux. Et dans tout ça, mon sursaut m’a conduite à faire un pas en arrière et heurter un mastodonte.

La douleur transperce mon pansement, je me retourne tout de même pour dire pardon et là, ma bouche entretrouverte de surprise, je vois Malcom. “Mal…” j’essaye d’articuler mais ma voix se brise également. De peur, mais surtout de surprise.

Mon pied sur une chaussure, une grande chaussure et un homme d’une taille hyper imposante, à tel point que mon regard se pose d’abord sur son torse avant de remonter vers sa tête. c’est Mal ! J’en suis très contente et sur le coup, harassée par la douleur, je ne lui réponds qu’une grimace alors qu’il me fai tun coucou neutre de la main. J’ai terriblement mal et du sang commence à suinter. La cicatrisation a dû mal à se faire et je suis quand même sortie parce que tout simplement, il n’y a plus de place et je n’étais pas une priorité. Enfin, soudain, le type qui s’est reçu le journal s’énerve. Au quart de tour, Mal réagit. Pour me protéger. Moi? Les larmes roulent sur mes joues alors que je m’accroupie pour essayer de couper la douleur. J’ai honte, qui plus est. Honte de voir les gens me défendre et d’être là, petite fille sans défense à ne pas savoir comment réagir.

La scène me paraît capillotractère et complètement irréelle et pourtant. En tout cas, la serveuse semble connaître Malcom et lui parle avec douceur. Le monde me paraît étrange entre ces gens qui rigolent surement de à cause de moi et parlent une langue entre le français et l’anglais, la scène irréaliste et Malcom qui me défend avant même que je me rende compte qu’on voulait s’en prendre à moi par pure agacement. Je suis pathétique. Je peux finalement me redresser, au moment où la serveuse s’occupe de calmer Malcom et le client, pour au moins reprendre contenance. Je trouve une petite serviette pour essayer d’éponger le café mais en vain…  Je ne sais pas où me mettre j’ai déclenché un vrai chaos… C’est alors qu’une nouvelle fois, Mal vient à ma rescousse, passe derrière le comptoir et éponge tout. Mon regard le remercie chaleureusement même si je suis au bord des larmes.

Il me montre alors le tableau derrière lui pour que je choisisse surement la boisson que je voulais prendre. Mes yeux s’ouvrent grands comme des culs de bouteille. Que fait-il? Et la serveuse? Moi je veux lui faire un câlin pour le remercier, je veux qu’il revienne à côté de moi, pas qu’il prenne ma commande et que… que quoi? “Bon la traumatisée tu commandes ou tu dors sur le comptoir?” lance un type en français. Je me retournes et le regarde sans comprendre réellement ce qu’il me dit. J’ai compris dormir et commander. Et vu son ton il est énervé. Je me retourne à nouveau vers Malcom et lui demande “ Un frappucino et ce que vous voulez pour vous Mal.” Ma voix tremble et je me recroqueville sur moi-même. La plaie de mon ventre saigne, je me suis encore pétée des sutures. Tant pis pour aujourd’hui. Il faudra que je trouve un médecin demain. Et que je fasse attention, mais rien que l'idée de sortir à nouveau me tétanise. Je tremble d'ailleurs encore. Mais, je sors alors de la ligne quand Malcom a tout noté et je l’attends dans l’intention d’enrouler mes bras autour de lui dans un câlin de remerciement que je n’aurais jamais imaginé donné à une telle personne. D’autant qu’une fois encore, il m’ aidé et défendue. Pour moi ou parce qu’il est si altruiste qu’il aide tout le monde, peu importe au fond, je ne vois que l’action en elle même. “ Merci encore Mal, pour tout ce que tu as fait.” j’enchaîne finalement, en passant au tutoiement pour qu’il comprenne que je rompt la distance entre nous deux ainsi. Enfin, j’espère qu’il le comprendra.

Je sais bien que face à ce grand dadet mutique et impassible mon geste semble vain et désuet mais j’ai besoin de le remercier et vu qu’il ne parle pas je me dis que mes gestes parleront pour moi même. Faire ce câlin me permet également de dissimuler la douleur qui me transperce le flan. J’ai pété mes points… encore. Pour sûre. C’est certain de chez certain. Maintenant faut que je fasse illusion jusqu’à trouver quelqu’un pour me rafistoler. Puis soudain, alors que je me détache de lui je me mets à rire les yeux pleins de larmes. “ Je suis vraiment désolée j’ai dû te mettre mal à l’aise. On sent que les câlins c’est pas ton truc. Peut être que tu préfères les coups de couteau?” je lance avec amusement, loin de me douter de ce qu’il fait dans son quotidien.

Nous allons finalement nous asseoir et cela me soulage grandement. J’essaye de ne pas montrer ma douleur mais je me suis vendue toute seule je pense car Mal est carrément bloqué sur mon ventre. Enfin, quelque part par là. J’ai envie d’ignorer la chose histoire de faire comme si de rien était. “ C’est donc ici que tu vis?” je demande avec curiosité, mais il ne lâche toujours pas le regard. “Malcom, ça devient gênant.” je chuchote en remontant son menton pour qu’il me regarde dans les yeux. Je le lâche puis je regarde autour de nous pour être sûre que personne ne nous fixe ou nous jauge du regard. J’ouvre alors ma veste puis je soulève mon t-shirt pour laisser apparaître une plaie ensanglantée avec des points qui ont salement sautés. “Une balle. J’étais là au mauvais endroit au mauvais moment.” J’explique simplement en baissant mon haut pour camoufler les dégâts. De ce que j’ai vu, il faudrait que je fasse rapidement rafistoler tout ça, mais ça attendra un peu. “ Tu sais des fois, j’aimerais tellement ne jamais être venue. J’ai l’impression d’être une enfant dans un monde d’adulte violent et chaotique…” et ce n’est pas qu’une impression, ici, je suis inutile et une vraie proie.

Je bois un peu de mon frappuccino et je me rends compte que même lorsque j’avale cela tire sur la cicatrice, je crois que je ne m’en sortirai jamais. Mais je ne peux pas rester sans rien faire à attendre une nouvelle balle dans le corps ou de voir encore l’un de mes détracteurs comme j’ai vu Eliel la dernière fois, juste après ma rencontre avec Malcom. Ici le monde est noir et semble emplit de malice, du pire que l’on peut faire chez l’être humain. Je me rends compte que Malcom s’est dressé en sauveur mais au fond peut être que lui aussi, un jour, me poignarder d’une manière ou d’une autre. Je n’ai juste pas envie de penser à ça pour le moment. Aujourd’hui, il a encore pris ma défense. Alors je ne suis pas certaine que ce soit parce que c’est moi, mais j’aime à le croire. “Il faut que je m’endurcisse et que j’apprenne à me défendre aussi. Si tu connais quelqu’un ou si tu veux t’y coller je suis preneuse !” je demande alors. Evidemment, c’est pas tout de suite que je vais pouvoir m’y mettre ce qui me frustre allègrement, mais il va falloir que j’y passe.

Je suis spontanée et spontanément j’ai fait un câlin à Malcom mais quand j’ai senti ses muscles tous raides j’ai compris qu’il n’avait pas l’habitude de recevoir ce genre d’attention. “C’est une boutade t’en fais pas !” je lance alors qu’il arque un sourcil. Evidemment, je ne lui demande pas vraiment s’il préfère recevoir un coup de couteau ce serait vraiment très… bizarre. Au fond, je le suis peut être un peu à faire ce genre de blague dans un moment pareil, dans un lieu pareil et avec cet homme plutôt impressionnant.  Tellement, que je n’ose même pas être faible face à lui.

C’est la raison pour laquelle je suis soulagée que l’on aille finalement s’asseoir. Ainsi, je n’aurais pas à lui montrer que j’ai vraiment mal et que ma blessure recommence à saigner. J’en profite alors pour faire ma curieuse comme je sais si bien le faire et lui demande s’il vit ici. Visiblement, c’est pas le cas. Je devrais essayer de négocier une chambre pour ma part. Mais du coup, il me montre son pectoral, là où il y a son petit carnet si je me souviens bien. Je mets surement un temps à percuter puis je me rappelle le petit dessin explicatif qu’il m’avait fait. “ Ohh c’est ton lieu de travail, c’est ça?” je demande alors, en espérant que je me souvienne bien des détails. Je suis assez visuelle en terme de mémoire donc je ne devrais pas me faire trop de souci, mais il y a tellement à apprendre et retenir depuis que je suis dans cette ville.

En revanche, il y a quelque chose qui ne va pas. Malcom fixe l’endroit de ma blessure et c’en est gênant. Je lui fais part alors de mon embarras avant de lui montrer les dégâts. Je ne sais pas trop ce qu’il pense en voyant ma blessure mais je ne peux lire aucune émotion sur son visage ce qui est assez déstabilisant je dois le dire. Je suis quelqu’un de très expressif que ce soit dans un sens ou dans l’autre alors être face à quelqu’un de plutôt “neutre” est à la fois reposant et fatigant. Je cherche tout le temps à savoir ce qu’il peut bien y avoir dans sa tête mais ça me donne également un challenge. J’ai envie d’apprendre à le connaître malgré toutes les barrières qu’il y a entre nous.

C’est ainsi que je lui confie parfois regretter d’être venue.  “Mais au fond, si je suis venue c’est en connaissance de cause, et parce que je dois retrouver ma mère.” j’ajoute finalement. Avant d’en conclure que d’accord je suis une enfant dans un monde de brutes, complètement inutile et sans défenses mais que c’est aussi ce que je dois changer. Donc, je dois apprendre à me défendre, à m’endurcire et faire le nécessaire pour éviter le maximum d’ennuis. Les balles perdues sont déjà assez incontrôlables sans en plus ajouter des événements desquels je pourrais m’ôter toute seule.

Bon, par contre, entre temps, Malcom m’a donné une serviette en papier à poser sur ma plaie mais je sens que ça ne suffit pas et lui aussi. Il se lève et me fait signe de le suivre. “ Tu veux aller où Mal, je suis pas en état pour marcher longtemps.” Dans l’idéal il me faudrait une bonne armoire à pharmacie pour me refaire les points. Je devrais pouvoir le faire. Mais je fais aussi confiance à la montagne devant moi aussi, je m’appuie sur la table pour me redresser et je lui attrape le bras pour aller de l’avant.  “Tu sais, je crois qu’il me faudrait un kit de couture et des compresses. Tu sais si je peux trouver ça?” je demande alors, au cas où. Après tout il connaît bien le coin, il doit pouvoir savoir où je peux trouver le nécessaire. Il faudra que je cherche aussi du travail pour continuer de payer tout le nécessaire. Heureusement pour moi, je suis arrivée avec un bon pécule pour pouvoir vivre plusieurs semaines sans me poser de questions mais ce n'est pas éternel.

Une part de moi me dit que je devrais me méfier de ce grand gaillard aux allures pas commodes et muet. Mais d’un autre côté, il est toujours l’homme de la situation. depuis notre toute première rencontre, il est là au bon moment et il m’a touchée. En fait, je crois que j’ai tout simplement envie de me coller à lui pour échapper à toutes les horreurs qui pourraient m’arriver ici. J’ai la sensation qu’il pourrait être comme mon refuge intemporel, la personne avec qui je pourrais me sentir, pour une fois, sereine. C’est aussi surement la raison pour laquelle je suis si spontanée avec lui malgré son apparence plutôt froide et distance. Un câlin n’a jamais tué personne après tout non? Puis on se met à parler. Je me marre toute seule, parce que parler est un bien grand mot. Je m’engage dans un monologue pontué de gestes divers et variés venant de Malcom, vivant à me répondre de temps en temps.

J’arrive donc à deviner qu’il travaille ici. C’est une bonne chose. Au moins je sais où venir pour le trouver quelque part. Quant à Mal, je le vois focaliser sur ma blessure et je comprends qu’il veut m’emmener quelque part. Marcher? Oui mais alors avec parcimonie. Je finis tout de même par le suivre tout simplement parce que j’ai confiance en lui. Ma mère me fustigerait surement pour ça, mais elle n’est pas là et je ne la retrouve pas de toute manière ! Donc je suis Malcom en espérant qu’il m’emmène dans un endroit pour trouver un kit de couture histoire de refaire mes points.

Finalement, on entre dans une pièce qui ressemble à un truc entre le débarras et la salle de réunion. Je m’assoie sur une des trois chaises qui encadrent la table pendant que Mal disparaît derrière l’autre porte. Je l’entends farfouiller et grogner. Je regarde la pièce sous toutes les coutures sans trouver de choses particulièrement étranges. En revanche, le lieu me fait froid dans le dos. Et si Mal est un psychopathe, je suis probablement déjà morte. Je secoue alors la tête quand le doux géant arrive vers moi et me signifie qu’il serait mieux de m’asseoir sur la table. Effectivement, vu sa taille, ce sera mieux pour lui si je suis plus haute. A coup de grimaces, je me hisse donc et relève mon haut pour qu’il puisse voir la plaie. Elle est dégueulasse. Soyons honnêtes. Mais je n’ai pas vraiment, non plus, respecté les consignes du médecin.

Malcom est vraiment très proche de moi alors qu’il inspecte la plaie. Ses doigts sur ma peau me font frissonner et son odeur est particulière mais j’aime bien. Je n’ai juste pas le temps d’aller au bout de mes réflexion qu’une jeune femme blonde arrive, pimpante, fringante et surtout à l’aise. J’ouvre grand les yeux alors qu’elle traite Malcom comme un enfant dans ses blagues et qu’il réagit en mode premier degré. Je pouffe légèrement d’ailleurs, en voyant qu’il plonge dans son humour très basique. “ Mal elle rigole !” je murmure en touchant son bras. “ Enchantée Cassidy, je suis Alba.” je me présente en même temps que je la salue, par politesse. Parce que ce qu’elle dit ensuite me serre l’estomac d’incompréhension. “ Comment ça il est plus doué pour ouvrir les plaie que pour les refermer?” je demande alors surprise. Mais malgré l’appréhension, alors que la dénommée Cassidy s’approche de moi et étale tout pour me soigner, je prends instinctivement la main de Malcom dans la mienne.

Me retrouvée ainsi dans une pièce ave cMalcom et une parfaite inconnue ne me fait pas plus peur que ça. Je devrais surement me méfier, mais il y a quelque chose chez Mal qui m’attire. Pas sentimentalement, ou peut être que si, mais surtout, je me sens en sécurité. Paradoxal? Sûrement. Bref, je suis là, assise sur cette fichue table terriblement froide avec une poupée barbie (non j’abuse je sais ! ) qui fait des blagues pas très sympas, surtout pour Malcom. Je me pose des tas de questions et je ne sais pas quoi penser même si au fond, ça n’entâche pas vraiment ce que je peux percevoir en cet homme qui n’est autre qu’une montagne de muscles muette.

Quand Cassidy reprend contenance et qu’elle m’annonce qu’il est videur de truites,  j’ai deux réactions. La première c’est de faire une grimace comme jamais on m’a vu en faire, une vraie grimace de dégoût. Et la seconde c’est d’avoir un haut le coeur qui pouvait laisser croire que j’allais vomir. Et elle enchaîne avec ces histoires de vidage, découpage, et autre. “ Je vais vomir arrêtez ! Je suis végé…” j’explique pour couper court à cette discussion des plus horrible à écouter.

Puis elle donne une compresse à Malcom. je suis contente qu’il ne lâche pas ma main. Au fond, ça montre qu’il n’est pas dégouté par ma proximité. Je lui souris pour lui montrer qu’il peut y aller et grimace quand il appuie sur la plaie. Ce n’est pas indolore mine de rien.  Mais je me focalise sur mon sauveur. Je l’observe et renifle son odeur, l’air de rien. Je me demande vraiment où est la vérité et où est le mensonge dans tout ce que Cassidy a raconté, mais même si au fond, il est genre tueur à gages, je m’en fiche. Tout ce qui m’importe c’est son comportement avec moi. Trop peu de gens dans cette ville font attention aux autres. Je ne peux juste pas oublier qu’il a été présent pour moi.

“Vous faites ça souvent?” je demande alors en regardant Malcom puis la dénomée Cassidy. Elle a l’air d’avoir des mains d’experte et Malcom semblait assez à l’aise à l’idée de me réparer tout à l’heure. La plaie est plutôt bien refermée mais à la surface la cicatrisation a dû mal à s’achever surement parce que je sursaute à tous les coins de rue, à la moindre main posée sur mon épaule ou au moindre bruit ressemblant de près ou de loin à un coup de feu. Je prends pas mal de douches dès que j’en ai l’occasion et je suis pas certaine que l’eau soit très propre dans le coin. Sans compter que j’ai absolument rien pour me désinfecter ou autre.  Enfin, pendant que la jeune femme me répare rapidement, je lance quelques regards à Malcom pour voir ses réactions et pour voir s’il a changé depuis la dernière fois. J’essaye d’être discrète sans savoir si j’y parviens.

“D’accord. J’irai voir Rémy, elle a été super avec moi.” Je dis ça plus pour moi que pour eux mais peut être la connaissent-ils. Quoi qu’il en soit, je préfère me référer aux gens que j’ai déjà vu pour le coup.

Quand la vraie tornade sort de la pièce pour aller chercher du matériel, mon regard croise celui de Malcom. Je lui souris et serre un peu plus sa main. “ Merci encore Mal. Je sais pas ce que je ferais sans toi. Si tu veux que je cuisine pour toi pendant plusieurs jours n’hésites pas ! Je ne sais pas comment te remercier.” Est-ce que je devrais lui raconter que j’ai emmerdé Rémy tout le long pour qu’on l’appelle quand je me suis faite tirée dessus? Je crois pas, il me prendrait soit pour une tarée soit pour une minette accroc. Il est juste un pilier et le premier à avoir été sympa avec moi dans cette maudite ville. Il faut croire que ça lui a donné un statut tout particulier.

Et en un rien de temps, alors que je m’apprêtais à poser ma tête contre le torse de la montagne de muscle à côté de moi, Cassidy rentre encore comme une tornade dans la pièce et finit le travail. Moi je me redresse, ni vue ni connue, enfin je l’espère, ou peut être pas, et j’attends la fin. C’est vrai que cette pommade fonctionne plutôt bien ! “Si sursauter au moindre bruit c’est faire des folies de son corps, je suis dans la merde” je ronchonne avant de regarder la jeune femme dans les yeux et de lui lancer un “ Merci beaucoup Cassidy. Comment pourrai-je vous rendre la pareille?” je demande avec une profonde sincérité sans pour autant lâcher Mal.

Je ne suis pas stupide j’ai bien compris que tout ce qui tourne autour de Malcom n’est pas net net mais pour autant je me sens en sécurité à ses côtés, et ça, le temps n’y change rien. Donc même si on vient de me dégoûter à vie avec des remarques loin d’être végé, même s’il n’est pas vraiment clair dans ses réponses, lui, il a toujours été là pour m’aider et une nouvelle fois, il vient de me le prouver. J’aimerais tellement faire quelque chose pour le remercier, genre vraiment le remercier ! Mais pour le moment j’assure que j’irai voir un médecin pour me refaire de meilleurs soins. Ca me donnera l’occasion de revoir Rémy. Elle a été au top avec moi et elle est même restée jusqu’à mon réveil à l’hôpital !

Bref, l faut quand même que je les remercie. Mais je ne sais pas comment faire. A part proposer mes talents de cuisinière. Ou de masseuse mais ce serait franchement louche non? Bah c’est tout ce que je peux faire. J’ai un peu de sous aussi. Peut être que ça aiderait? J’en sais rien à vrai dire et je finis par observer les réactions alors qu’il me fait signe que le remercier n’est pas nécessaire. “ Si, si j’insiste Malcom ! Tu as pris de ton temps et de ta patience tu mérites un retour. J’ai un de sous si vous voulez. Pas beaucoup mais peut être que…” Je ne devrais peut être pas autant me révéler j’imagine. Visiblement, j’ai de plus en plus de mal à me canaliser ! “Et ne vous inquiétez pas je me serais bien passé déjà de me prendre deux trous dans l’abdomen ! Je ne compte pas m’ouvrir à nouveau.” je réponds à la jeune femme qui vient de me soigner. Je ne sais pas pourquoi, l’autre trou a beaucoup mieux guérir apparemment.

Bref, je reporte mon attention sur le molosse et il me mime une voiture. “ Non je ne conduis pas si c’est ce que tu me demandes. Et je suis venue à pieds. Mais du coup je pense que je vais rester un peu ici pour ne pas abîmer le travail et j’irai voir Rémy demain. Je vais essayer de trouver un endroit pour passer la nuit dans le coin. A moins que vous ayez des idées ?” je demande à tout hasard même si j’en ai plus que marre d’être un poids pour les gens qui m’entourent. J’aimerais tellement savoir me débrouiller seule sans sursauter au moindre coup de feu ! Même ce groupe de femme que Malcom m’a conseillé, je n’ai pas pu demander clairement à en faire partie, pas encore. Je ne sais pas comment faire et j’ai peur des conséquences. Je sais bien que c’est débile, mais faut que je me lances et trop de choses s’enchainent pour que j’y parvienne concrètement.

Toujours là au bon endroit au bon moment. Voilà ce que je vais retenir de Malcom. Il ne cherche pas à me forcer à faire quoi que ce soit et il essaye toujours de me diriger dans le droit chemin. Enfin, celui que je devrais emprunter. J’apprécie sa compagnie, elle est douce, faite de silence, certes, mais je ne me sens ni pressée, ni redevable, ni jugée, parce qu’il est comme ça, tout simplement. Il m’aide sans attendre aucun retour. C’est gênant car à mon sens je devrais au moins lui cuisiner un bon petit repas mais je ne peux pas, non plus, l’obliger à accepter. C’est au delà de mes compétences, je pense. En revanche, je me surprends à penser que la jeune femme, aussi gentille fût elle, pourrait nous laisser tranquilles maintenant. Je ne sais pas pourquoi, mais je ressens le besoin de rester seule avec Malcom. Et je suis consciente de la bizarrerie de la chose, que personne ne s’en fasse concernant ma santé mentale ! Elle va très bien. Ou peut être pas. A vrai dire, j’ai peut être envie de passer du temps avec le pire des psychopathes et / ou sociopathes.

Donc pour résumé, l’infirmière m’a recousue alors que j’aurais préféré que ce soit Malcom qui le fasse, elle fait des blagues à gerber, je n’ai pas de voiture et quand je demande s’ils ont des idées pour un endroit où dormir une nuit, il me montre le lieu où l’on se trouve mais la jeune femme sans réel prénom me note bien que c’est cher. Elle a tout pour plaire. Elle, je l’aime pas. Voilà, c’est fait. Délit de faciès mais j’assume. J’ai l’impression de revivre mes années à l’extérieur de Downfall. Je suis une latina alors je dois tout payer plus cher ou payer de mon corps. Rah que ça m’énerve ! Et pendant ce temps, je regarde l’échange qui se joue sous mes yeux entre grimaces et monologues qui m’énervent encore plus. Se faire de l’argent pour arrondir ses fins de moi. “ S’il faut que je me paye une chambre normale, j’en payerai une normale. Désolée, je n’arrondirai pas vos fins de mois illégalement. “ Je suis peut être un peu sèche ou trop franche mais je n’ai pas me mettre dans des coups fourrés.” J’ai déjà la poisse en faisant les choses dans les règles alors je n’imagine pas si je dois faire des trucs pas catholiques. Pour le coup vous aurez peut être besoin de la bâche de Malcom pour aller jeter mon corps quelque part.” Ca me fout des frissons rien que d’imaginer la chose. Je regarde alors Malcom pour montrer que c’est son retour que je veux et uniquement le sien parce que j’ai confiance en lui mais pas en elle. “ Je peux louer une chambre ici, c’est safe?” je demande “ Même pour une latina? Ou on va essayer de me prostituer ou de me prendre pour une servante?” Non parce que j’ai déjà eu ces cas là et même mon boulot de rabatteuse pour un restaurant, je sais que je l’ai eu à cause de mon physique. Franchement, parfois, j’ai juste envie de pleurer et de me laisser mourir. Et honnêtement, à choisir, même s’il y a cette bâche peu rassurante - qu’il peut utiliser pour faire de la peinture seulement après tout - je préfèrerais mille fois aller chez Malcom que d’être encore dans un endroit où on risque de s'introduire la nuit dans ma chambre, comme cela m’est arrivée au Angel’s Nest.