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 [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]

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Mickaëla Andersonn
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MessageSujet: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyDim 9 Oct - 20:22

Assise sur tabouret à même le comptoir, j’observe d’un air distrait l’enveloppe fermée déposée devant moi. Ce n’est jamais que la sixième fois que je la regarde en attendant (espérant ?) … certes, mais en attendant quoi ? Qu’elle me réponde ? Qu’elle me tire la langue ? Qu’elle s’envole après qu’un client ait ouvert la porte pour créer un courant d’air ? Ou que la personne à laquelle elle est destinée daigne pointer le bout de son joli minou ?
Je déporte mon regard vers l’horloge murale. Vingt heures et des poussières. Ça en fait presque deux complètes que je squatte ici. Permettez-moi donc d’être dubitative à l’idée que la dernière question trouve chaussure à son pied. Des talons si possible. Mais comme rien n’est moins sûr …

Je lâche un soupire discret tandis que je reviens à ma contemplation morne et pas très coopérative. Then again, qu’est-ce que j’aurais bien pu attendre de la part d’un bout de papier vulgairement (non je suis trop pointilleuse pour ça voyons) enfermé dans sa petite chemise blanche ? Je sors mon téléphone portable et, pour la trente-troisième fois de la soirée je vérifie si je n’ai pas écopé d’un message pour m’informer d’un quelconque retard ou même d’un appel manqué. Ce qui m’aurait étonné, vu que j’ai monté le volume dans l’éventualité où cela venait à sonner et que je n’ai pas quitté la bestiole une seule minute depuis. Mais ne sait-on jamais …
Forcément, je fais chou blanc. En faisant abstraction de la demi-douzaine de mails professionnels qui ont réussi à trouver leur chemin jusqu’à moi (non mais les gens, vous n’avez pas une vie en dehors des heures de bureau ou quoi ?!!), c’est le blanc sidéral. Rien. Que dalle. Même pas un texto vide se terminant par un petit X. Oui bon, c’est cliché comme pas possible, mais au moins cela aurait eu le chiche de me faire sourire. D’ailleurs rien qu’à la pensée qu’elle aurait pu m’envoyer une connerie pareille … eh bien, bingo, je souris. Je suis certaine qu’elle trouvera une excuse bidon à me balancer pour justifier son retard. Ou son lapin. Car à la vitesse des événements (ou plutôt des non-événements) ce n’est pas aujourd’hui qu’on passera la soirée ensemble. Peut-être que j’ai dit ou fait quelque chose. Ou peut-être pas, justement.

Du bout de mon majeur de la main droite, je viens effleurer l’enveloppe scellée. Qu’est-ce qui m’a pris d’écrire cette daube ? Ça tombe c’est juste l’univers qui a envoyé des bâtons dans nos roues pour m’empêcher de faire une bêtise monumentale en la lui faisant lire. C’est un peu gnangnan comme approche, j’en conviens. Ça date même clairement d’une autre époque. Une époque révolue. De nos jours ça ne se fait plus d’écrire, et encore moins à la main. Ne me demandez pas ce qui m’est passé par la tête, je me verrais dans l’incapacité de vous répondre. Sur le coup, ça me semblait bien. Sur le coup, ça me semblait nécessaire. Au lieu de ressasser encore et encore, juste prendre un stylo et évacuer par l’encre. Ça s’est révélé assez efficace. J’ai réussi à gribouiller sur deux pages recto verso en moins de temps qu’il ne me faut généralement pour rédiger un rapport.
Je ferme à peine les paupières et secoue légèrement la tête. Non, c’était carrément la pire idée du siècle. Elle ne comprendrait même pas. Enfin, pas ce que j’ai écrit en soi (ce serait quand même gros) ; mais tout le processus de rédaction derrière. Ce n’est pas de son âge. Et cette constatation me fait prendre une nouvelle gifle.

Je sens mes dents jouer avec l’intérieur de mes lèvres tandis que je pèse (pour la beaucoup-trop-tième de fois ce soir) les arguments du rester versus du partir. Plus de deux heures à me tourner les pouces (bon j’ai bossé entre-temps, ne soyons pas défaitistes à ce point) dans un endroit pas désagréable (ne prétendons pas le contraire, sans quoi on ne passerait pas autant de temps ici elle et moi ; bon surtout elle, mais chut) sans consommer. Enfin si, j’ai quand même pris un truc à boire ; même si j’en conviens que je l’ai à peine touché ce dit truc. Je n’avais pas spécialement envie qu’on m’aborde pour me demander ce que je foutais là à prendre la poussière. C’est exactement l’impression que cela me donne. C’est exactement l’impression que je me donne.
Non décidément, c’était vraiment une mauvaise idée ce rencard-qui-n’en-est-pas-un.

Je pose une dernière fois mon regard sur l’écran noir de mon smartphone. La reconnaissance d’empreinte réveille le morceau de technologie. Rien ne s’affiche (je ne m’attendais plus vraiment à l’inverse) si ce n’est l’icône de ma boite mail (non vraiment, vous croyez ?) et les quatre chiffres qui annoncent la couleur de ma soirée, j’ai nommé : deux – zéro – un – cinq. Huit heure quart. C’est bon, j’ai assez donné. Il ne me reste plus qu’à rentrer à l’appart. Là où m’attendent le trolley et la pantoufle poilue qui aura fort probablement élu domicile dessus. Ou du moins à côté. Vu la taille de ses petites pattes et la gaucherie qu’il semble avoir hérité de moi, il ne serait pas étonnant qu’il a essuyé un cuisant échec. Au moins nous sommes deux dans le bateau. Que demande le peuple de plus ? Oh je ne sais pas moi, un petit signe de vie peut-être ?

- « Merci pour le verre. Á bientôt. »

Petite pointe de politesse à l’encontre du personnel. Même si je n’y crois pas trop. Du bientôt je parle. Mais il faut tenir les apparences. Mais il ne faut pas montrer que tout ceci m’affecte bien plus que je ne suis prête à le concéder.

En quelques pas je passe la porte d’entrée, mon sac sous le bras. Une bourrasque vient se jouer de mon long manteau. Je ne le ferme pas pour autant. Je prends un moment pour observer le ciel. Les nuages commencent à bien s’amasser. Je me demande vaguement si j’arriverai à rentrer avant que ça n’éclate. Et Bob qui voudra sortir.
Il y a des journées comme ça, on ferait mieux de ne pas se lever.


Dernière édition par Mickaëla Andersonn le Mer 5 Avr - 11:47, édité 1 fois
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Andrea Espinoza
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyJeu 13 Oct - 20:16

Je me suis remise à fumer. Oui, c’est débile, je sais. C’est pas bon pour ma santé, et c’est pas bon pour mon porte-monnaie non plus. La clope, ça coûte cher, et ça coûte surtout un argent que j’ai pas. C’est pour cette raison que chaque fois que j’allume le briquet, et embrase l’extrémité de l’un de ces petits tubes blancs, j’y pense vraiment avec beaucoup d’attention. Est-ce que c’est nécessaire et indispensable ? Est-ce que je peux pas compenser cette envie avec autre chose ? Est-ce que je suis sûre de moi ? La flamme finit souvent par jaillir à ce moment-là. Il existe sans doute des tas de façons de gérer un stress et une angoisse durable. Le sport ? Pas le temps. Les loisirs ? Pas davantage de temps. Le sexe, comme me l’ont suggéré aimablement mes collègues après que j’ai poussé un énième coup de gueule ? Personne sous la main. Je pourrais compenser en bouffant, y’a pas mal de personnes qui gèrent comme ça leurs déboires quotidiens, mais pour ça, faudrait que la bouffe me paraisse pas aussi immonde en ce moment. La clope s’est imposée comme étant cette main tendue dont j’ai besoin ces temps-ci, et en plus, elle pose aucune question. Ça me fait du bien, le temps que ça dure, soit pas assez longtemps au vu de la situation, mais franchement…c’est mieux que rien, alors je prends.

Voilà ce qu’on récolte à voler un cartel, et à tenir tête au putain dedit cartel. Des insomnies à répétition. Un sentiment angoissant et plus que présent d’insécurité. Des pertes d’appétit. Des excès de paranoïa. De l'agressivité à en revendre. Le plus beau dans tout ça ? Je suis la seule fautive, la seule à blâmer. Mais…c’était prévisible, non ? Y’a pas une expression qui dit qu’à force de jouer avec le feu, on finit par se brûler ? Et encore…j’ai eu pas mal l’occasion de réfléchir aux paroles de Barbie Prayer, et je sais pas si c’était une façon de me faire peur, et de jouer avec mes nerfs, mais…possible que j’ai pas mal ressassé tout ça. J’en reviens pas du manque total de jugeote dont j’ai fait preuve en me montrant aussi stupide. En plus…Tattooman m’a laissé plus d’une fois l’occasion de revenir sur ma décision, sur cet acte stupide de bravoure, mais j’ai continué, tête baissée. Pourtant, au fond de moi, je crois toujours dur comme fer à mes convictions. Les gangs, j’aime pas ça. Ils sont violents, ils sèment le chaos, ils détruisent. Y’a jamais rien de bon qui en ressort. Et pourtant…je suis toujours vivante. Un peu esquintée dans ma caboche, mais j’ai toujours tous mes doigts, tous mes membres, tous mes organes. Et à priori, d’après la blondasse, c’est pas franchement monnaie courante avec les gens qui doivent de l’argent aux Prayers.

Quoiqu’il en soit, depuis la visite de ce Kenny à ma tante, le blond tatoué a pas donné signe de vie, et j’ai pas eu l’occasion de pouvoir lui donner le fond de ma pensée. Parce qu’au-delà de l’angoisse que je ressens, et qui m’empêche parfois de respirer tranquillement, quand je suis seule chez moi, en pleine nuit, y’a un autre sentiment qui prédomine, et menace de prendre le contrôle de mon être à chaque fois que je fais pas attention. La colère est devenue une fidèle compagne. Toujours là. Toujours prompte à me faire sortir les griffes, et frapper à tout va. Je l’entends bien, la petite voix qui me souffle que quand je reverrais Kenny -et je dis pas si parce que je sais que ce moment arrivera- faudra que je fasse profil bas, et que je finisse par obtempérer. En réalité ? Je sais que je vais devoir me faire violence pour pas lui arracher les yeux. S’approcher de ma famille c’était le truc à pas faire…et le moyen infaillible aussi d’obtenir ma coopération, ma docilité même, bien que ça je le sache pas encore. Les miens, c’est mon point faible. Ma kryptonite. Et la savoir menacée par ma faute, me rend dingue. Littéralement. Je sais que quand je vais le revoir, ça sera violent. Physiquement, j’aurai pas l’opportunité de faire grand-chose. Il est plus grand, plus costaud, accompagné de ses chiens de garde, et à priori, c’est toujours lui qui a le flingue. Ouais, sa frangine a eu l’extrême amabilité de me faire une petite leçon sur la différence entre celui qui détient l’arme et celui qui se retrouve sans moyen de se défendre. Ultra sympa la nana. Mais quoiqu’il en soit, la violence physique, ça a jamais été mon truc. Ça fait trop gang.

Par contre…oh, par contre, je sais que je pourrais pas retenir mes mots. Ils auront sans doute aucun impact, mais je sais que ça me libérera, et que je me sentirais sans doute mieux sur le coup. Oh ouais…j’imagine déjà très bien tout ce que je voudrais lui dire. Claquement de doigts devant mon visage. “-Hé oh, Andrea, ici la Terre, tu nous reçois ?” Merde…je les avais oublié, les deux là. Tic et Tac se marrent, alors que je vais spontanément vers la caisse pour procéder à l’encaissement du client en train d’attendre. Comme si l’une ou l’autre pouvait pas se bouger, au lieu de faire ce qu’elles font de mieux : commérer. Enfin, au moins, ça m’occupe. Maintenant que j’ai repris pied dans la réalité, j’en profite pour regarder un peu plus attentivement les tables du Diner, et les clients qui sont présents. Sans me presser, je vais débarrasser celle qui vient d’être libérée, m’arrêtant auprès d’un petit couple quand le gars m’interpelle pour avoir des frites en rab. Les périodes de creux, c’est vraiment pas ce que je préfère, mais elles font partie de la restauration, comme le reste. Et comme un peu plus tôt, je rejoins mon poste d’observation au comptoir, à l’autre bout de là où se trouvent mes deux collègues. Un observateur extérieur pourrait en déduire qu’on peut pas se saquer, mais au fond, c’est juste qu’on a pas les mêmes centres d’intérêts. Perso, j’ai rien contre elles.

Depuis mon petit coin, j’ai une vue imprenable sur la salle, et je pourrais remarquer rapidement les demandes des clients, s’il y en a. Je peux aussi remarquer assez facilement ceux qui risquent de pas en faire, parce que trop enfermés dans leur petite bulle, comme moi tout à l’heure. Et cette nana, assise depuis un bon moment devant sa boisson pas consommée et son enveloppe fermée en fait partie. C’est pas la première fois qu’elle vient, même si je crois que c’est la première fois que je la vois seule. Je sais pas si elle attend la brune de d’habitude, ou quelqu'un d’autre, mais la personne semble se faire désirer, alors que les minutes deviennent des heures, et qu’elle, elle a toujours pas bougé. Oh, elle s’est bien occupée, avec du travail, je crois, mais plus le temps passait, plus j’avais cette impression qu’elle était en train de se renfrogner sur elle-même. Je crois qu’elle doit moyennement apprécier de se faire poser un lapin, et en même temps…je la comprends plutôt pas mal. Je vais quand même lui demander si elle a besoin d’autre chose, plus parce que mon job l’exige que par réel désir de venir l’enquiquiner, et quand elle me répond que non, sans grande surprise, je nous permets à toutes les deux de continuer de vaquer à nos occupations, chacune dans notre coin.

Finalement, je sais pas si elle attendait quelqu’un, ou si elle est juste venue bosser ici pour une sombre raison qui me dépasse, mais quoi qu’il en soit, la nana finit par récupérer ses affaires et partir, alors qu’en me rapprochant, je me rends compte que sa boisson est intacte. J’encaisse rapidement, nettoie la place, et remarque à cet instant une enveloppe vraisemblablement tombée sur le tabouret sur lequel elle était assise, un peu plus tôt. Je récupère le paquet, et sans réfléchir, je m’élance à la poursuite de la quarantenaire, poussant les portes du diner pour tenter de la rattraper. Et bordel, elle marche vite ! Elle a quasiment déjà quitté le parking. “-Hé ! Excusez-moi ! Hé !” Elle se retourne enfin, en s’arrêtant, me laissant l’occasion de la rattraper en quelques pas : “-Vous avez oublié ça !” Et je lui tends l’enveloppe, une espèce de moue sur le visage, alors qu’elle récupère son bien. Je fais ce truc débile de regarder l’enveloppe, de la regarder elle, puis de regarder de nouveau le rectangle blanc, comme si les mots -ceux intelligents quant à faire- me manquaient. “-Bon bah…bonne soirée.” Et je vais même jusqu’à lever la main dans un semblant de petit au revoir, sans trop savoir pourquoi.

Sauf que j’ai à peine le temps de me détourner pour retourner à l’intérieur du Diner que toute mon attention est focalisée sur ce qui se passe, à quelques mètres de nous. De loin…de loin, ça ressemble juste à une accolade, entre deux potes. Une accolade un peu brusque, mais franchement, c’est pas si exceptionnel entre potes surexcités, que ça se chamaille et que ça se bouscule. Ça aurait pu rester que ça, deux amis qui se disent au revoir après avoir passé un moment au Diner. Mais y’a vite plusieurs trucs qui collent pas dans cette histoire, et qui s’imposent à moi. Déjà, je me souviens pas avoir vu dans le Diner le bonhomme qui me fait face, et j’ai une très bonne mémoire des visages. Ensuite, y’a cette expression sur sa tronche, qui exprime des tas de choses, mais pas la joie d’avoir passé un bon moment avec une personne proche. Surprise, douleur, peur, incompréhension, c’est un mélange pas très beau à voir, en tout cas. Y’a aussi cette tâche sombre qui s’étend de plus en plus sur le haut blanc du gars, et qui s’étend même au-délà de la main que le gars a posé dessus, comme s’il voulait pas qu’on voit qu’il s’est tâché. Et enfin, y’a le départ précipité du pseudo pote, sa montée dans une voiture côté passager, les pneus qui crissent sur le bitume alors que la bagnole s’éloigne, tandis que lentement, celui qui reste sur le parking s'effondre, comme au ralenti, alors qu’il s’accroche comme il peut à la carrosserie de son véhicule pour essayer de freiner l’impact de son corps sur le bitume.

Ouais…je crois que y’a qu’une petite poignée de secondes qui viennent de s’écouler, et pourtant, trop d’informations parviennent jusqu’à mon cerveau, à tel point que j’arrive pas toutes à les analyser. Y’a quand même une alarme qui s’allume au fin fond de ma tête, pour me hurler que c’est grave, qu’il faut faire quelque chose. Je crois que c’est comme ça que je me retrouver à courir vers le type désormais avachi contre sa voiture, sans même me souvenir d’avoir ordonné à mes jambes de se mettre en mouvement. A cet instant, je suis plus trop certaine d’être encore aux commandes de mon corps. La tâche, il s’avère que c’est du sang. Beaucoup de sang. Trop de sang. ”-Aide-moi.” Sa voix est paniquée, et déjà si faible en même temps, et pendant deux secondes de plus, je fais rien d’autre que le surplomber de ma taille, comme si j’assistais de loin à la scène, et que y’avait pas un gars en train de se vider de son sang à mes pieds.

Il me faut un gémissement de sa part pour reprendre pied, partiellement du moins, alors que je me laisse tomber à genoux à côté de lui, les yeux fouillant le parking, avisant rapidement la nana de tout à l’heure : “-Appelez une ambulance !” Parce que faut faire quelque chose là. Ce sang…tout ce sang…Y’en a de plus en plus, la tâche s’étend, encore et encore, et encore. Arrêter le sang, oui. Il faut faire ça. Mais comment ? Réfléchis Andrea, réfléchis… Je pourrais me taper le front du plat de la main en sentant qu’il se passe rien dans mon crâne, que mes neurones -tout comme moi- sont paralysés par la peur. Le type attrape mon tablier dans sa main rouge écarlate pour me demander de nouveau de l’aide, et ça fait enfin tilt. Je mets une éternité pour réussir à défaire le nœud de mon tablier tellement j’ai les doigts qui tremblent, et quand c’est enfin fait, je mets encore deux secondes pour trouver le courage de soulever son haut. Là, la plaie d’où sort tout ce sang m’arrache un haut-le-cœur, alors que je m’empresse de cacher tout ça avec le tissu, pressant le tablier contre la blessure. Quand les petits se font mal, en général, c’est trois fois rien. Un bisou sur le front, un pansement Iron Man sur le bobo, et le tour est joué. Là…là, bordel, même toute une boîte de pansements Avengers pourra rien pour ce bonhomme, et je suis clairement dépassée.

___________

All we have to decide is what to do with the time that is given us.
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Mickaëla Andersonn
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyJeu 13 Oct - 23:03

Je contemple le nuage. Je cherche des étoiles qui n’en ont fichtrement rien à foutre de moi. Comme la première fois. Comme toutes les fois. Car soyons honnêtes, qu’est-ce que nos pauvres petits états d’âme pourraient bien représenter face à la mortalité qui les a frappés bien avant nous ? Un peu glauque ? Pas vraiment. J’appellerais plutôt ça un bon retour à la réalité. Nous voilà à observer des entités mortes et explosées depuis perpette-lez-bains et qui continuent à nous faire rêver. N’est-ce pas un peu … pathétique ?
À bien y regarder, on pourrait même le superposer à notre vision de la vie éternelle. L’anthropomorphisme interstellaire. Après les animaux, on envoie nos sentiments de merde hors orbite. Oh pardon, excusez mon vocabulaire. Mais, voyez-vous, je viens de me faire vulgairement jeter comme une mal propre. Et encore, cette dernière citée a au moins eu la décence d’un licenciement en bonne et due forme. Moi je dois me contenter de suppositions tout droit sorties d’on-ne-sait-où car il n’y a rien à la base qui justifie quoi que ce soit. Tout ça pour dire … ben moi aussi j’aurais préféré imploser de l’intérieur il y a quelques années-slash-heures de cela pour éviter le lapin et le retour de karma qui va avec.

Ça et le fait qu’il n’y a aucune étoile à l’horizon. Enfin, pas qu’on perçoit l’horizon de là où je me trouve. Y’a plutôt une forêt de bâtiments et d’immeubles en tout genre. Et au-dessus de ma tête, un beau gros nuage bien menaçant qui me nargue avec ces petites dents pointues invisibles, mais assurément bien ricanantes. Une imagination débordante ? Moi ? Je ne sais fichtrement pas ce qui vous fait dire ça. La seule chose que je peux affirmer avec certitude c’est que j’ai commencé à m’éloigner du resto (pour autant qu’on puisse appeler cette endroit ainsi) sans pour autant quitter le ciel du regard. Avec la chance que j’ai, je vais me choper un réverbère d’un instant à l’autre. Ce serait peut-être un mal pour un bien. Sauf si mon nez le touche en premier. Évitons voulez-vous. Pas qu’il ne s’est pas complètement remis depuis le coup de coude, mais c’est tout comme. Si encore un cri de ma part pourrait réveiller l’univers quant à ma détresse. Mais autant se faire à l’évidence que l’univers il en a autant à faire que les étoiles mortes … c’est-à-dire, pas grand-chose. À part peut-être l’étoile de Star Wars. Mais on est d’accord de dire que je suis en train de changer de sujet dans le but, seul et unique, de replonger dans la facilité de la phase de déni. Et ce tête première. Réverbère ou non.
Amen.

Hé ? Comment ça hé ? Qui ça hé?
C’est plutôt dans un réflexe que j’arrête d’avancer et que je lâche ma contemplation diurne pour redescendre sur terre. Enfin, façon de parler. Vu que je n’ai jamais vraiment décollé. On aurait dû être deux pour ça. Et comme quelqu’un dont je ne citerai pas le nom ne s’est jamais pointée …
Hé donc !
Et tout en atterrissant je me retourne en partie vers l’arrière pour voir débouler une petite tornade à la chevelure flamboyante en ma direction. Bon peut-être pas flamboyante, mais tout du moins rebelle. Comme le dessin animé oui. Celle-là même. Je reconnais la serveuse qui m’a abordée plus tôt dans la soirée, sans vraiment réussir à lui coller un nom. Dans mes souvenirs elle n’avait pas épinglé son badge. Ce que je peux comprendre. Ça fait un peu ringard. Et vieux film d’une autre époque. Il n’aurait plus manqué que l’uniforme d’un Kentucky et hop la boucle était bouclée. Comme ses cheveux. Oui, j’arrête d’en parler promis. C’est juste que je suis certaine qu’elle doit faire des envieuses.

Je cligne plusieurs fois des paupières avant de me rendre compte que mon bras droit s’est naturellement tendu vers l’avant pour récupérer mon . Quel traitre celui-là !! Il n’a donc pas pigé que j’avais VOLONTAIREMENT laissé cette chose dans mon sillage ? Et pourquoi il (mon bras donc, et par extension mon corps) tient à ce point à la récupérer ? Et pourquoi elle (la fille sans nom car elle ne porte pas son badge has-been) a jugé utile de me la ramener ? L’enveloppe hein, qu’on s’entend bien. Parce que ça fait beaucoup de pronoms en très peu de temps. Et pour résumer je me retrouver à récupérer la chose que j’avais décidé de rayer de mon historique personnel au profit d’une négation nickel en bonne et due forme. Il faut croire que l’univers n’était pas vraiment d’accord avec ça. Pourtant ce n’est pas faute de lui avoir promis les étoiles …

Je ne sais pas vraiment combien de temps passe. Je me contente de la regarder. Comme emprisonnée dans un corps étranger qui peine à se mouvoir. Je suis loin. Très loin. Comme si cette scène ne me concernait même pas. Pourtant je vois tout. Mais d’un point de vue de spectateur lambda. Elle regarde l’enveloppe. Puis moi. Puis rebelote l’enveloppe. Et en absence de réaction de ma part, elle se sent un peu con. Alors elle balance quelques mots appris par coeur et m’octroie un petit geste de la main avant de déguerpir. Non en fait elle ne part pas vraiment. C’est juste moi qui reste coincée sur pause. L’information n’arrive pas vraiment jusqu’aux neurones. Même si on peut se demander s’il en reste encore là-haut.

Mes yeux suivent son mouvement. Je le sais. Je le sens. Sauf que mon esprit reste dans le passé. Ou plutôt le présent. Mais pas le même que le sien. Enfin, je me comprends. Et c’est déjà pas mal. Quand je vous dis que c’était la pire idée du siècle d’écrire cette foutue lettre. J’aurais mieux fait de me fouler le pied ou de glisser sur la table quand j’ai attrapé mon stylo. Même si mon nez contre la table, ça m’aurait méchamment fait rager. Sur le coup, au moins, j’aurais perdu toute envie (ou même pensée) quand à une écriture quelconque. Et Bob aurait trouvé ça amusant. Tiens, en parlant du loup, n’avais-je pas émis l’hypothèse (si pas la certitude) que je devais encore le sortir ce soir ? Si possible avant que le ciel se décide que j’ai assez abusé de son hospitalité et déverse sur moi les torrents de Noé ? Non non, je vous assure que je ne suis toujours pas dans l’exagération quelconque !

Je m’apprête à me remettre en marche (je pense avoir trouvé le bouton pour reprendre le contrôle car ça bouge) quand tout à coup, cette même voix d’il y a quelques secondes (voire minutes, si pas plus – contorsion temporelle quand tu nous tiens) m’interpelle. Et quand je dis interpeller, il faut comprendre qu’elle gueule un truc que je peine à comprendre vu la distance, mais qui m’est clairement destinée. Probablement parce que je suis la seule à me balader sur un parking abandonné à cette heure-ci de la soirée. Trop tard pour certains, trop tôt pour d’autres. Le moment par excellence où une connerie a le plus de chance de me percuter. Et tandis que je m’approche de la demoiselle à terre à genoux, je sens gros comme un camion cette prémonition de pacotille se réaliser.

Je la devine qui panique vu comment elle s’acharne sur le tablier qui lui enserre la taille. Mon corps me hurle de rebrousser chemin, mais mon mental pro me dit de presser le pas. J’arrive à leur hauteur au moment précis où notre inconnue soulève le vêtement du monsieur. Un geyser carmin gicle en sa direction. Elle n’a que le temps du réflexe pour lui appuyer le tablier en boule dessus. Je sens qu’elle déporte le regard. Soit pour éviter de le regarder en face. Soit pour éviter de lui dégueuler dessus. Les deux sont aussi possibles que probables. Pour ma part j’ai repris le contrôle total de mon corps (il était temps). Je laisse glisser mon sac de mon épaule (et l’enveloppe je présume, vu qu’elle n’existe temporairement plus dans l’équation) et m’installe à mon tour à même le sol. Machinalement j’ai sorti mon téléphone (que j’avais encore à proximité en fait) et déverrouillé l’écran que je tends à l’improvisée secouriste. D’une voix calme et posée je lui indique comme ça va se passer :

- « Essuyez-vous les mains. C’est vous qui aller appeler. Je vais prendre le relais. »

Et sans attendre mon reste, j’appuie sur le dernier numéro composé qui renvoie vers l’accueil des urgences (taf quand tu nous tiens). Je lui glisse l’appareil entre l’oreille et l’épaule (toujours sans vraiment lui demander son avis) avant de poser à mon tour mes mains sur la victime.

- « Tout va bien se passer, regardez-moi. »

Et j’entends une première sonnerie résonner depuis le combiné qui j’ai lâchement abandonné.

- « Dites-leur que vous appelez de la part du docteur Andersonn. Que la situation est critique. Qu’une assistance médicale est requise prioritairement. Et vous leur communiquer l’adresse. »

Je lui balance tout cela comme si c’était le plus naturel du monde. Toujours sans quitter l’homme agonisant des yeux. En premier lieu c’est lui que ma voix est censée rassurer. Le fait d’avoir glissé le mot docteur dans les consignes n’est pas un pur fruit du hasard. Il a besoin de s’y accrocher. Il a besoin de s’y projeter. Il n’a pas pour autant besoin de savoir dans quelle branche j’excelle. En tant cas aucune qui ne lui sera d’une grande aide. Pas avant un certain temps. Pour autant qu’il passe la suite. Ce qui ne semble pas gagné. Pas vu l’amas de rouge qui est en train de se déverser sur le trottoir.

- « Respirez. »

Les deux sont concernés. Le premier pour rester en vie. La deuxième pour rester consciente. On parlera du traumatisme plus tard. Tentons d’abord de limiter la casse. Je n’y crois pas trop. Ce dont je ne peux clairement pas me permettre. Je devrais regarder encore une fois. Essayons d’évaluer les dégâts. Même si mes cours de premiers secours sont à des années lumières d’ici. Mortes et enterrées comme les étoiles absentes ce soir. Mais inutile de déverser mes pensées dépressives sur ceux qui peuvent bien s’en passer.

- « Comment vous appelez-vous ? »

Jeremy qu’il bafouille et que je peine à comprendre. Donc je vais présumer que c’est ça. Je vais pour lui expliquer ce qui va suivre quand il attrape (on-ne-sait-trop-comment, probablement l’adrénaline) le haut de mon chemisier d’un poing serré (et ensanglanté) et se perd dans mes yeux avec le désespoir d’un forcené.

- Sauvez-moi docteur.

Je n’ai pas le cœur à lui mentir. Mais je ne peux pas pour autant lui raconter la vérité. Je me contente donc de lui sourire légèrement. Mes propres mains commencent à être détrempées. Ils n’arriveront jamais à temps. Je ne suis pas défaitiste. Croyez-moi. Ceci est juste la pétasse de réalité. Et ce soir, j’ai bien envie de l’emmerder. Alors je tourne un peu mon attention vers mon assistance improvisée :

- « Il va me falloir des linges secs et si possible une couverture. Vous vous sentez de nous trouver ça ? »

Autant la mettre à profit. Autant lui occuper l’esprit.
Si je ne veux pas qu’elle flanche avant lui.
Sinon ça ne va faire que s’aggraver. Même si on n’est plus vraiment à ça près … n’est-ce pas ?
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Andrea Espinoza
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyDim 16 Oct - 11:28

Pourquoi est-ce qu’il a fallu que ça arrive ce soir ? Pourquoi ici ? Pourquoi pas un autre soir, ailleurs, loin, bien loin de chez Pop’s, et bien loin de moi ? Y’a qu’une toute petite part de moi qui se rend compte d’à quel point ce raisonnement est égoïste, le reste de moi est trop occupé à flipper, et à se concentrer pour pas me barrer en courant. J’ai absolument aucune idée de ce que je suis censée faire, et en même temps, je me rends bien compte que me contenter d’appuyer sur son abdomen avec mon tablier va jamais arrêter l’hémorragie, il lui faut…du nouveau sang, pour compenser tout celui qui coule sur le bitume, et des chirurgiens, pour réparer ce trou immonde dans son corps, pas une petite serveuse terrorisée qui sait pas quoi faire. M’enfin…qu’est ce que j’en sais, à près tout, de ce qu’il lui faut ?

Je sens son regard qui me quitte pas, mais j’arrive pas à le soutenir plus de deux secondes, sans détourner la tête. Il est tout blanc, le genre de blanc qui fait froid dans le dos, qui laisse penser que ce mec est vraiment en train de passer la pire soirée de sa vie. Et potentiellement la dernière, aussi. Je sens mon tablier devenir tout mouillé sous mes doigts, et même si j’essaye de pas y penser, mon cerveau me balance un mot en boucle, l’hurlant aussi fort que possible “sang, sang, sang, sang”. Mes mains en sont rapidement couvertes, et je dois détourner une nouvelle fois le regard pour pas finir par vomir mon repas sur les cuisses de ce pauvre gars.

J’avais oublié jusqu’à la présence de l’inconnue quand elle s’agenouille à son tour à côté du type, alors que je relève un regard perdu sur elle. Comment elle fait pour être aussi calme ? Elle a pas vu le mec en train de se vider de son sang, juste là, devant nous ? Si mes mains étaient pas occupées à tenir mon tablier qui ressemble plus du tout à mon tablier, j’aurai pu la saisir par les épaules pour la secouer, et l’aider à prendre conscience de la réalité. Elle bidouille sur son écran, et me le coince entre l’épaule et l’oreille, annonçant que c’est à moi de passer ce coup de fil. De toutes façons, c’est pas comme si elle me laissait vraiment le choix, maintenant que ça sonne dans mon oreille.

Je retire mes mains peut-être un peu trop vivement dès que celles de l’inconnue se sont posées sur le gars, comme si je ressentais une brûlure, ou un truc aussi désagréable que ça. La voix d’une femme se fait entendre depuis l’autre bout du téléphone, mais j’ai une, peut être deux secondes de latence, trop occupée à fixer mes paumes rougies par le sang. Je les essuie rapidement sur mon pantalon, attrapant le téléphone alors que je commence déjà à parler : “-Il faut…il faut une ambulance, chez Pop’s, dans…dans le Skid Row.” Je reconnais pas ma voix, qui part dans les aigus, et tremble comme jamais. Comme cette femme qui dit être un docteur, la personne au téléphone est calme quand elle elle me pose des questions et cherche à en savoir plus, tellement calme, alors que j’ai l’impression que tout mon corps est électrisé, et que j’ai qu’une envie : hurler jusqu’à plus avoir de voix. Même si…un docteur, c’est bien non ? Elle va pouvoir faire quelque chose pour le sauver…pas vrai ?

La fille du téléphone me parle de choses qui me semblent complètement futiles, là, tout de suite. Pourquoi elle envoie pas d’abord l’ambulance, et pose les questions après ?! “-Mais…je sais pas…il…il a été poignardé je crois. Andersonn…le docteur Andersonn est là. Elle s’occupe de lui.” J’essaye de me concentrer sur les paroles de la personne au téléphone, mais impossible de garder la tête froide, ça part dans tous les sens dans mes pensées. “-D’accord, attendez…attendez…” J’essaye de bidouiller sur le téléphone, laissant des empreintes ensanglantées sur l’écran, alors que je finis par mettre le haut parleur. “-Elle veut…elle a dit qu’elle resterait en ligne le temps que les secours arrivent.” que j’explique, posant le téléphone à côté de ce médecin, pour qu’elle puisse l’entendre.

Et déjà, elle commence à parler avec la femme docteur, alors que je me rends compte en même temps que le sang a imbibé mon pantalon, au niveau des genoux, des tibias, et je me recule précipitamment, essayant d’essayer ça, en vain, évidemment. Je vais vomir, c’est sûr et certain. “-Je peux faire quelque chose ?” Autre chose que rester juste là, agenouillée dans les fluides vitaux d’un mec sur le parking de mon lieu de travail, à le regarder mourir petit à petit. Cette Andersonn me demande alors d’aller chercher du linge, et si je comprends ce que je dois faire, pendant ce que j’ai l’impression d’être de trop longues secondes, mon corps sait plus comment faire pour obéir. Par je sais quel miracle, l’information parvient enfin jusqu’à mes neurones, et je me relève en chancelant, titubant pendant quelques mètres, comme si ça aussi, j’avais oublié comment on fait.

Je déboule comme une tarée dans le Diner, sans entendre les commentaires des deux nanas toujours accoudées au comptoir. Je vois à peine leurs têtes épouvantées quand elles voient le sang sur mes vêtements, mais je m’arrête pas pour leur expliquer la situation, même quand elles se mettent à poser des tas de questions. “-Quelqu’un est docteur ? Quelqu’un est docteur ici ?” Je crie sans même m’en rendre compte, mais je crois pas que j’aurai réussi à contenir ma voix si j’avais essayé. Les clients ont la même expression sur le visage que mes collègues, mais personne se manifeste. C’est con, deux médecins, ça aurait sans doute été mieux qu’un médecin et une serveuse dépassée. Puisque personne peut aider, je disparais dans l’arrière cuisine sans m’attarder plus que nécessaire. Là, j’attrape ce que m’a demandé Andersonn, tous les linges secs que j’arrive à porter, et ce qui nous fait office de trousse de secours. Elle devrait bien trouver ce qu’il faut là-dedans, non ? Si c’est là, ça doit quand même avoir un peu d’utilité…

Je ressors aussi vite que je suis rentrée, manquant de me casser la tronche, et de laisser tomber mon précieux chargement. “Y’avait que ça. Mais…mais on a pas de couverture. Alors j’ai pris ma veste, je sais pas si c’est bien.” Et je pose la veste à côté de moi, sans trop savoir quoi faire, sans pouvoir non plus passer à côté de la situation. Pourquoi y’a encore plus de sang que tout à l’heure ? Combien on peut perdre de sang, avant de mourir ? Et d’ailleurs, ça contient combien de litres de sang, un corps humain ? “-J’ai pris ça aussi…des fois y'a des couvertures de survie dedans. Et y’a des compresses, ou…des choses. J’ai pensé que peut-être, ça pouvait aider.” Mais maintenant…maintenant que je vois comme il est faible, j’ai comme un doute sur le fait que la trousse de secours soit vraiment utile. J’ai comme un doute sur le fait que quoi que ce soit puisse être utile.

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Mickaëla Andersonn
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyJeu 27 Oct - 21:30

Bon, toute cette histoire n’est clairement pas gagnée. D’un côté j’ai un poing ensanglanté qui est en train de ruiner mon chemisier (c’est un détail j’en conviens, mais sur le moment il faut savoir s’accrocher à des futilités pareilles pour ne pas perdre le contrôle – du moins chez moi ça fonctionne très bien ainsi) et de l’autre (côté) j’ai mon autoproclamée assistance qui vit sa plus belle crise d’angoisse – slash – attaque de panique. Probablement un peu des deux, sinon ce serait moins drôle. Je la devine aisément penser que c’est la pire sensation au monde. Que son cœur va lâcher. À moins que ses poumons y passent en premier. Elle doit se faire violence pour ne pas oublier de respirer. Pour rappeler à son corps que ça fait partie du package de base. Elle bafouille des trucs que les urgentistes ont heureusement appris à décoder. Et moi aussi, par la force des choses. Bah oui, vu l’actuelle fréquence avec laquelle je me trimballer aux urgences à toute heure du jour et de la nuit ; agrémenté de mon quota de chiche à me trouver systématiquement au mauvais endroit au mauvais moment. Même si, j’en conviens, certains diront que je me trouvais exactement là où ma présence avait le plus de probabilités d’être propice à quelqu’un. Ce soir il reste à déterminer si cela se reporte au mourant ou à l’hyperventilatrice. J’ai comme mon idée. Mais qui sait ce que l’univers, le karma et toute cette sadique petite famille de manitous peut bien avoir en tête pour moi ce soir.

Ma voix est douce. Ou plutôt : calme et posée. C’est du moins comme ça qu’elle est censée apparaître au grand public. En vrai, ça me renvoie plusieurs dizaines d’années en arrière. Là où je n’ai pas vraiment envie d’être. Là où tout a commencé. Ou du moins pas mal de choses. Je refoule le souvenir. Je n’ai ni l’envie ni le besoin de m’y plonger et encore moins en cet instant bien précis. Dans l’immédiat il faut que j’éloigne la jeune fille de la scène de crime. Je sais comment ça va se terminer. Lui probablement aussi. Et si ce n’est pas le cas, je me verrai dans l’obligation de lui renvoyer cette réalité dans la face (pour ne pas dire autre chose). Non pas que la prévision me tente particulièrement. Mais encore une fois, je ne suis pas là pour lui mentir. À lui de décider s’il veut y croire ou pas.

Donc ! Éloignez pour mieux régner. Non non, ce n’est pas ce que j’ai dit! Éloignez pour mieux protéger. Même si elle ne le verra assurément pas de cet œil là. Et lui encore moins. Mais il faut faire des choix dans la vie. Et j’ai posé le mien. Ce n’est pas à prendre ou à laisser, c’est imposé.
Elle dépose un peu gauchement mon portable à terre avant de décamper à la vitesse v-v-prime en direction du Pop’s. Je la regarde cavaler quelques instants, mais c’est plutôt pour m’assurer qu’elle ne va pas se vautrer en s’emmêlant les jambes ou se prendre le nez dans la baie vitrée (encore une fois ce nez, vous avez déjà remarqué comment il a tendance à se trouver pil poil là où ça fait le plus de potentiels dégâts ?!). Bref, je finis par la relâcher et pose mon regard sur mon téléphone. Tout dégueulassé par ses empreintes ensanglantées. Elle a essuyé ses mains vraiment n’importe comment. Alors en soit sur le portable ça ne me dérange pas trop. Au pire, j’en ai plusieurs de rechange à l’appartement (inutile de demander, ce n’est pas le moment) ; c’est juste qu’il y avait une raison à mes consignes. Merde quoi, elle veut se choper une saloperie ou quoi ? Qu’est-ce qu’on en sait exactement de ce mec qui est en train de se vider sous et sur nous ? J’espère qu’elle n’aura pas la malencontreuse idée de s’en mettre là où il ne faut pas … mais c’est une inquiétude pour plus tard. Concentrons-nous plutôt sur notre patient. Que j’ai négligé depuis près d’une minute complète là. Je le sens. Il sert plus fort le poing encore, ce qui manque de resserrer le col de mon vêtement sur ma gorge. Pas le visage bordel !

Je lui attrape la main d’une des miennes tout en appuyant d’autant plus avec l’autre. Non pas que ça pourrait encore faire quelque chose, mais c’est le geste qui compte. Enfin l’illusion de. Je ne suis pas urgentiste. Je ne suis pas chirurgienne. Mes cours de premiers secours datent d’une autre vie. Je connais les gestes de base car c’est imprégné (et que j’en ai eu besoin par le passé, mais encore une fois – je ne veux PAS y penser d’accord !). Car c’est inné. Un peu comme la serveuse qui a naturellement défait son tablier (non sans mal, on en convient) pour appuyer le tissu sur la plaie. Tissu dont il ne reste plus grand-chose à vrai dire. Mais là n’est pas l’important.

- « Calmez-vous. Je ne vais nulle part. »

C’est cliché. C’est prémâché. C’est beaucoup de trucs et d’aucun à la fois. Mais c’est vrai. De toute façon, il voudrait que j’aille où ? Et pour faire quoi ? Sortir Bob ? Y’a de l’idée. Mais je suis certaine qu’il nous pardonnera (Bob je parle). Je peux même le lui promettre, à notre inconnu qui s’accroche et s’accroche encore. Je vais d’ailleurs pour lui décoller les phalanges, car à force il arriverait encore à m’entrainer dans sa chute. Et ça nous arrangerait tous les deux que ça n’arrive pas.

Une voix lointaine et à la fois bien distincte attire mon attention. Ah c’est vrai le téléphone, je l’avais oublié celui-là. Je perçois clairement l’infirmière en chef qui demande s’il y a toujours quelqu’un de l’autre côté du fil. Elle a dû se répéter plusieurs fois à en juger par son intonation. Ce qui implique que j’ai zoné un moment. Bon, on me pardonnera à moi aussi.

- « Claudia, tu m’entends? »

Elle acquiesce et me bombarde de questions auxquelles notre petite miss panique n’a pas pu répondre. Ou plutôt dans le désordre. Je répète donc les bases tout en rajoutant quelques détails plus techniques du genre :

- « Il semblerait qu’on lui a enfoncé une lame au moins à mi-bras. Non ça ne semblait pas être un coup d’essai. Oui quelqu’un qui savait ce qu’il faisait. Ou qui a une chance de cocu. Le résultat reste sensiblement pareil. Au moins la rate. Oui, je sais. Non, ça n’arrête pas. Oui, j’ai vérifié. Non, je n’ai pas de gants. »

Bref, une succession de oui par-ci et de non par-là sans (je l’avoue) vraiment prendre en compte l’avis du patient. Ses doigts ont beau ne plus resserrer leur emprise sur ma gorge, je les sens fichtrement bien s’enfoncer dans ma chair au fur et à mesure des réponses les mains plaisantes. Oui, il va mourir. Non, je ne peux rien faire. Mais oui, je vais éviter que ça se passe ici et maintenant. Si pour lui cela rime avec un semblant d’espoir, grand bien lui fasse.

- « Claudia, elle est où mon ambulance ?! Il faut à tout prix éviter que ça se passe ici. Je n’ai pas envie de me ramasser des post-traumato sur les bras ! »

C’est égoïste de ma part ? Well sue me !

- « Elle revient. »

Je dis ça autant pour l’infirmière que pour le mourant. Oui je sais, je ne devrais probablement pas l’appeler ainsi. Après tout, peut-être qu’il ne l’est pas. Peut-être qu’ils vont arriver à temps. Peut-être que cette fois-ci ils arriveront à la, pardon le, sauver. Vous savez, ça fait beaucoup de peut-être. Et au final, ça fait encore plus mal …

L’inconnue (il me faudrait vraiment son nom, ça va nous faciliter certaines choses mais bon) nous rejoint non sans manquer de se vautrer. Heureusement elle n’a pas glissé dans la flaque de sang, c’est elle qui aurait atterri sur notre John Doe, enfin Jeremy Doe plutôt. Et pas certaine qu’elle s’en serait remise. Pas plus que de la situation actuelle. Mais actuellement il y a encore moyen de limiter la casse. Elle balance cinquante mille mots à la seconde. Un réflexe d’auto-défense comme un autre. Je la laisse terminer sans l’interrompre. Elle se justifie. Ou essaie de. Comme pour combler les trois minutes (à tout va) où elle n’était pas aux côtés de cet homme. Cela pourrait être attendrissant, sauf qu’elle est clairement en train de se faire du mal pour rien. À cette allure-là, elle va finir par se mettre la mort du mec sur le dos. Et les épaules. Et les reins. Et j’en passe. Mais cela ne va pas être beau à voir. Et extrêmement difficile à cicatriser. Je ne lui souhaite pas ça. Elle peut me croire.

- « Pliez votre veste en quatre et mettez-lui sous la tête. Nous allons le surélever un peu. »

Et évitons au mieux de saloper ce qui lui appartient car elle pourrait vouloir le récupérer. Et s’il y a la moindre pétéchie de carmin sur le vêtement … non, on va éviter.

- « Videz la trousse de secours sur un tissu, on va voir ce qu’elle contient. »

Je me retiens de lui dire que les compresses ne vont pas nous aider grand-chose, mais ce serait méchant de ma part. Réaliste certes, mais pas le moment le plus propice de la soirée. Plus tard peut-être. Pour l’aider à dé-compresser un peu. Haha. Non donc.

- « Vous voyez quelque chose qui pourrait soulager sa douleur ? »

Parce que là c’est vraiment la seule chose que je peux encore faire pour lui en attendant les secours. Je n’ai moi-même rien dans mon sac. C’est proscrit dans mon cas de figure. Quelle douce ironie n’est-ce pas ? Enfin, peut-on seulement parler de douceur dans un moment pareil ?

- « Claudia, et cette ambulance ?! »

Je l’entends qui se renseigne, ou plutôt je le devine, sans quoi elle aurait répondu du tac-au-tac tandis que la serveuse fouille dans les affaires. Quelques secondes plus tard elle annonce qu’ils ont eu un souci et qu’ils sont coincés à quelques rues de notre emplacement ? Un barrage ou une bagarre, je n’ai pas trop bien compris. Le mec s’est redressé un peu pour me tousser dessus. Du rouge lui coule le long de la bouche. Et mon manteau est foutu. Mais c’est le moindre de nos soucis là. Il va falloir y aller encore plus à l’impro là.

- « Trouvez-moi quelque chose pour suturer. »

J’entends comme un blanc dans le téléphone.
je répète : je ne suis PAS urgentiste. Je ne suis PAS chirurgienne. Mais si on pouvait éviter de cautériser à vif, c’est quand même mieux non.
Puis je ne fume plus.
Affaire classée.

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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptySam 29 Oct - 21:05

Sans surprise, ils sont encore tous les deux sur le parking où je les ai laissés quand je reviens, alors que la mare du précieux liquide vital s’est encore élargie. Tout ce sang partout…olala, ce que c’est dégueu. J’en doutais pas une seule seconde, mais j’ai maintenant la conviction que j’aurai jamais pu travailler dans le corps médical, tout ça, ça me fout la trouille, et c’est à deux doigts de me faire vomir mon repas. Je sais pas comment font ces gens dont c’est le quotidien, d’avoir la vie d’une autre personne entre les mains. Genre comment elle fait, elle, pour rester aussi calme à cet instant. Je suis partie…je sais pas, peut-être…trois, quatre minutes ? Et pourtant, j’ai l’impression que si je me fies à la tronche du gars, y’a beaucoup plus longtemps que ça qui s’est passé. On dirait que le peu de sang qui doit rester en lui est bien trop pressé de le quitter, et franchement, pas besoin d’être médecin pour savoir que c’est pas bon signe.

Après avoir failli me casser la gueule, et risquer de compromettre tout ce que j’ai dans les mains -enfin j’imagine- je me retrouve de nouveau à genoux à côté du médecin et de son patient qui en mène vraiment pas large. J’explique en quelques mots ce que j’ai trouvé, et ce que j’ai pas trouvé pour le coup, alors que je hoche la tête quand elle me parle de plier ma veste, et de la mettre sous la tête du pauvre gars. Chaque fois que je touche le vêtement, j’y laisse une empreinte rouge, me convainquant que y’a genre aucune chance que je puisse reporter un jour cette veste. Le type lâche un gémissement quand je lui soulève la tête avec ce que je pensais pourtant être beaucoup de douceur, et je peux pas retenir une grimace : “-Je suis désolée…” que je lui chuchote, avant de relever le nez vers la docteur quand elle me parle de vider le contenu de la trousse de secours, pour voir si quelque chose peut s’avérer utile. Ça me démange de lui répondre qu’elle contient ni poche de sang, ni bloc chirurgical, mais je ravale mes paroles en même temps que ma salive acide pour m’exécuter.

Avec des doigts tremblants et tâchés ici et là de larges marques rouges, je fais comme elle a dit, et vide tout ce que contient la petite trousse de secours sur une serviette étendue par terre. C’est un peu la dèche, cette trousse de secours, et je suis même pas certaine que s’il existe une norme, on coche beaucoup de cases. Je glisse les compresses et bandages d’un côté, avant de froncer les sourcils à la question de cette Andersonn, mes doigts trifouillant encore plus frénétiquement dans ce que j’ai sous le nez. “-Y’a…y’a du paracétamol ! Mais j’ai pas pris d’eau quand je suis rentrée…” Et de toutes façons…on est pas censés éviter de donner quoi que ce soit à un blessé ? Est-ce que c’est à ce moment-là que mon cerveau me suggère qu’il faudrait vraiment que je me renseigne sur les gestes de premiers secours, au cas où il arrive quelque chose aux Minimoys ? Ouais…possible. Mais je suis quasi certaine que dans ces cours-là, on trouve pas de tutoriel sur comment gérer une attaque au couteau et les blessures qui s’ensuivent.

Ma bouche s’entrouvre d’horreur quand Jérémy se redresse un peu, et qu’une gerbe rouge quitte ses lèvres…comme s’il perdait déjà pas assez de sang par le bide, il pourrait avoir la présence d’esprit d’en garder un peu, non ? Mon regard horrifié se pose sur le rouge qui macule désormais le manteau de la femme, puis passe au menton du mec, qui pourrait clamser d’une seconde à l’autre. Je crois que j’ai jamais eu le cœur qui bat aussi vite, et pourtant, Bennie nous a déjà filé de sacrées frayeurs avec son rein qui fonctionne mal. J’ai de nouveau les oreilles qui sifflent, comme tout à l’heure, et qui occultent tout le reste, les gémissements du blessé, les paroles de la docteur, la voix de la nana des urgences, toujours au téléphone, et même celle des quelques personnes qui sont visiblement sorties à ma suite du diner, pour venir voir ce qui se passe. Comme si j’étais soudainement coupée du monde, ou qu’on m’avait plongé la tête sous l’eau.

Je remarque que la nana a dû s’adresser à moi juste parce qu’elle me regarde avec insistance, comme si elle attendait quelque chose de ma part, que j’ai pas compris. “-Quoi ?” que je demande bêtement, en reposant mes yeux sur elle. J’arrive pas à décrypter son expression quand elle me dit -redit ?- qu’il faut que je trouve quelque chose pour suturer, et j’hoche une nouvelle fois la tête pour dire que cette fois j’ai compris, alors que je me remets à tourner et retourner les affaires de la trousse de secours. Sauf que…y’en a pas des masses, et forcément, j’en ai vite fait le tour. “-Y’a rien…y’a rien du tout là-dedans. Y’a rien du tout…” Je me rends même pas compte comme ma propre voix à l’air désespérée, ce qui doit pas beaucoup aider ce pauvre Jérémy à garder la moindre once d’espoir. Enfin, franchement, si le gars se dit encore qu’il va s’en sortir…

Je repose un regard paniqué sur elle, en répétant encore une fois qu’il y a pas ce qu’il faut dans la trousse de secours, au cas où elle ai pas déjà capté les premières fois où j’ai dit ça. Et tout à coup, sans que je sache vraiment d’où ça me vient, je me souviens d’un truc tout con, que j’ai fait, pas plus tard que ce matin. “-J’ai des épingles…attendez…des épingles à la taille. J’ai perdu du poids, à cause d’un foutu garçon, alors mon pantalon est trop grand, et j’ai pas les moyens de m’en racheter un, alors j’ai mis des épingles…des épingles à nourrice, et fait comme une pince de chaque côté, pour éviter de le perdre quand je marche…” Pourquoi je lui raconte tout ça ? Franchement, j’en ai pas la moindre foutue idée. Je crois qu’au fond, je me rends même pas compte de tout ce que j’ai débité. Je sais juste que je me suis redressée, et qu’il m’a fallu au moins le triple de mes gestes habituels pour réussir à ouvrir lesdites épingles, et à les faire glisser à travers le tissu pour les retirer. Merci Kenny pour les sueurs froides que tu me donnes, ça va peut-être sauver la vie d’un type ce soir. Ou…au moins l’aider. Enfin…je l’espère sincèrement.

Les mains peu assurées, je finis par tendre mes épingles à la femme aux côtés de Jérémy, qui semble avoir de plus en plus de mal à garder les yeux ouverts, et à respirer. “-Comptez pas sur moi pour les mettre dans sa peau…” Les mots m’échappent, mais en même temps, fallait que ce soit dit. Hors de question que je fasse glisser des bouts de métal dans le corps d’un mec, même si c’est pour lui sauver la vie. J’en serais incapable, j’y arriverai pas du tout. Et puis…après tout, c’est elle le médecin, non ? Elle devrait pouvoir réussir à le faire sans souci, de mettre les épingles où il faut, pour que le gars arrête de saigner partout. “-Allez-y…faites-le, vous…” Et vu l’état du pauvre gars…le plus tôt sera le mieux !

Le docteur récupère donc les épingles dans ma paume, et je préfère éviter d’affronter son regard, pour pas voir s’il est désapprobateur ou je sais quoi. C’est elle le docteur, point barre. C’est pas moi, pauvre petite serveuse d’un Diner pas très classe qui vais suturer quoi que ce soit sur qui que ce soit. Ni ce soir. Ni jamais. Je me rends quand même disponible comme je peux, remettant mes mains sur le tissu imbibé de sang pendant qu’elle se prépare…et quand elle le dit, je le retire vivement, exposant la plaie noyée sous le liquide rouge. J’essaye de pas regarder…et en même temps, mon regard est irrémédiablement attiré vers ce truc ultra gore, comme si y’avait un espèce d’aimant, et que c’était plus fort que moi. Je voudrais détourner le regard quand Andersonn approche l’épingle du bide de Jérémy, mais y’a comme une certaine fascination morbide qui me pousse à regarder…au moins jusqu’au moment où la pointe en métal transperce la peau, et traverse les chairs. Là, je suis obligée de détourner la tête, alors qu’un haut les cœurs me crispe le ventre, et que je m’oblige à respirer par la bouche pour essayer de calmer les soubresauts de mon estomac dérangé. Dégueu, dégueu, dégueu. J’ai beau essayer de la repousser, l’image de l’épingle qui entre dans le corps de ce gars reste gravée sur ma rétine. Sûre que j’en rêverais cette nuit.

Je me force à conserver une respiration plus ou moins normale, et reprends pied avec ce qui se passe sous mes yeux quand j’ai la sensation d’avoir repris un minimum de contrôle, et que je vais pas vider mes tripes sur ce pauvre mourant. D’ailleurs, si j’arrive à avoir une certaine maîtrise sur ma respiration, je me rends vite compte que la sienne est quasi inexistante maintenant…et que ses yeux sont bien plus souvent fermés qu’ouverts. “-Jérémy ? Jérémy, faut tenir bon, d’accord ? Vous pouvez pas laisser tomber ! Jérémy…” Je voudrais le secouer par les épaules, ou lui foutre une bonne baffe pour le faire revenir à lui, mais à la place, je lève vers la médecin un regard où doivent habilement se mêler horreur et inquiétude, comme si j’attendais qu’elle fasse un truc magique, n’importe quoi, pour que le mec revienne à lui, se lève, se mette à marcher, et rentre chez lui. Tout, vraiment tout, plutôt que de l’entendre dire que c’est fini, et qu’il est mort.

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Mickaëla Andersonn
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyJeu 10 Nov - 22:25

Je regarde ma voisine (changeons un peu son appellation pour le coup) éteindre le contenu de cette minuscule trousse de secours sur un tissu qu’elle a ramené du Pop’s. Ça ressemble vaguement à un carré de nappe en tissu. Mais ce n’est qu’un détail. Un détail qui fait du bien. Comme précité, j’ai besoin de m’accrocher à des broutilles pour ne pas me ramasser la réalité trop violemment dans la face. C’est aussi pour cela que je clame haut et fort n’être ni urgentiste ni chirurgienne. Pour moi le patient n’est pas un numéro. N’est pas un bout de viande. Je ne suis pas le docteur qui cache le visage de son interlocuteur pour ne récupérer que le morceau de peau qui se cache en-dessous. Remarquez, cela aurait quelque chose de coquet pour un rencard avec sa psy. Mais je m’égare !

J’observe donc le contenu ridiculement insultant de la boite de secours. Ça vient d’où ça, de l’arrière d’une voiture ? Trois petits paquets de compresses, une paire de petits ciseaux, un rouleau qui ressemble de loin à un bandage (mais qui doit à peine faire deux fois le tour d’un poignet d’enfant), deux sparadraps (sans dessin aucun, au moins ce n’est pas une trousse de gamin – même si on aurait pu le croire) et … eh bien c’est tout. Je n’ai pu empêcher un sourcil de se hausser. Même si tout à coup, eurêka, elle (la serveuse/slash/assistante improvisée/slash/paniqueuse compulsive) trouve un truc dont elle se persuade de l’utilité immédiate. Oui bon d’accord c’est un cachet magique pour les règles douloureuses, les rages de dents et les maux de tête … autant je peux parfaitement concevoir que Jérémy ci-présent se chope une vilaine migraine, je parie qu’il s’en fout royalement de sa troisième carie de gauche et qu’il n’a pas d’ovaire qui traverse sa sale période du mois. La rate je ne dis pas, mais pas certaine que le cachet de paracétamol va apprécier sa déchirure (pour rester polie, car celui – ou celle – qui a fait ça a très probablement tourné un bon coup à droite ou à gauche pour infliger un maximum de douleur (au moins). Bref, sauf si elle s’imagine qu’en enfonçant ce cacheton dans le trou béant caché sous les vêtements rouges, on va pouvoir arrêter l’hémorragie – je ne vois pas bien ce qu’on pourrait en faire. Pour ma part elle peut le garder. Elle en aura besoin. Même si je lui conseillerais quand même de regarder la date de péremption. On ne sait jamais.

Je dois m’y reprendre à deux fois (trois pour être exacte, mais je n’ai pas envie de la froisser) pour les bricoles de sutures. Je ne suis pas dupe, je ne m’attends pas à ce qu’elle sorte un outil magique de la poche arrière de son jeans. Limite peut-être un couteau suisse, mais là encore je reste sceptique. Surtout vu sa gaucherie un peu plus tôt. Elle aurait eu tôt fait de s’embrocher sur son ustensile de cuisine. Ce qui expliquerait qu’elle n’en porte prestement aucun sur elle. Quand bien même, il ne me serait d’aucune utilité. Vous voulez que je ferme une plaie avec un tire-bouchon rouillé peut-être ? Non non, inutile de répondre.

Elle en vient rapidement à la même conclusion que moi : cette trousse de secours a dû être gagnée à une fête foraine ou a dû se retrouver comme surprise dans un Kinder. Non il n’y a rien. Bien vu l’aveugle ! Je m’apprête à m’adresser aux quelques touristes qui sont venus nous rejoindre (et sortent déjà leur téléphone pour filmer la scène … je vous ai déjà dit à quel point ce côté-ci du mur ressemblait à l’autre ?) ; mais voilà que la demoiselle sans nom est prise d’une soudaine vague inspirationnelle. Ni une ni deux, la revoilà à déblatérer trente-cinq mille mots à la minute. Et je n’ai que mes yeux pour regarder vu que ma bouche est à court de réplique. Des épingles à nourrice ? Franchement ? Mais elle me prend pour qui là? MacGyver? Même pas certaine qu’elle le connaisse en plus …
Je veux bien qu’on se retrouve à Downfall, mais faut pas exagérer non plus … si ? Suis-je donc si utopiste que de croire qu’on aurait pu avoir une surprise dans le public ? Ou un deus ex machina ou que sais-je de plus spiritual encore? Non ? Vraiment personne ?

Mon regard implorant aura au moins eu le chiche de récupérer un briquet tempête … heureusement, vu ma position, mes yeux étaient déjà levés au ciel car là, franchement. Mais ils ont été chercher où cette bande de péquenauds ? Il semblerait que d’aucun n’ait fait la moindre étude ici et que le bon sens n’a clairement pas été distribué équitablement. Enfin si, dans le sens où personne n’a écopé de quoi que ce soit. Le père Noël devait être à court quand il a finalement débarqué ici. Pas certaine qu’il s’en soit réchappé. Bien possible qu’il est séquestré dans une cave humide quelque part. Mais ce n’est pas lui qu’on est venues sauver n’est-ce pas !

J’attrape donc la zippette et m’applique à passer au moins quelques secondes chaque épingle sous la flamme. Ça ne fera pas grand-chose, on est d’accord. Idéalement je devrais laisser au métal le temps de bien chauffer et de changer de couleur. Mais (celui-là même !), par où commencer ? Le nombre d’épingles ? L’état déplorable et allant en s’empirant du patient? Les regards curieux, mais peu concernés, qui se posent sur mes moindres faits et gestes? Le fait que je n’ai toujours pas obtenu mon brevet de secouriste entre tout à l’heure et maintenant ? Pick one.

Je n’arrive pas à croire que je suis en train de faire ce que je fais. Si un jour je racontais ça à … ouais mais je raconterais ça à qui ? À Claudia ? Je l’entends pouffer de rire jusqu’ici. À Love? Aurait-il encore fallu qu’elle soit ici pour assister à la scène. Elle n’aurait certes pas été plus débrouillarde que notre charmante inconnue … bien que, en y réfléchissant bien, elle aurait allumé une clope (voire plusieurs) pour me proposer de cautériser à l’aide des embouts. Pas faux. Puis elle n’aurait pas paniqué non plus. Une personne de moins de laquelle s’occuper. Mais bon, lapin-lapin tout ça. Passons !

Tant qu’à faire dans le show … ne dit-on pas qu’il must go on ? Eh bien go !
Et lorsque je remonte le tissu pour découvrir l’étendue des dégâts (que j’ai supposé jusqu’à présent, sans plus), je le redépose quasi aussitôt sur la plaie béante … dont s’est extirpé un bout d’intestin. Bon, je vais soigneusement éviter que miss angoisse ait à poser son regard là-dessus auquel cas je ne suis pas certaine qu’elle trouve encore un jour le sommeil. Du moins pas sans somnifères. Auquel cas elle n’arrivera plus à s’extirper de son pays des rêves. Et elle devra venir consulter. On va finir par penser que mes actes étaient calculés et prémédités … Jolie réputation que voilà. Déjà que là je m’apprête à recoudre (si on peut vraiment appeler cela ainsi) notre Jérémy Doe avec les serres-pantalon de la demoiselle qui s’est faite larguer. Remarquez, si elle n’avait pas eu ce connard (oui je me permets !) dans sa vie, monsieur Doe n’aurait pas pu prétendre se faire épingler ce soir …

Bon, on y va ! Entre-temps j’ai réussi (tant bien que mal) à repousser l’intestin là où devrait être (enfin sans vue direct sur son anatomie, on va dire qu’il y est) et je peux donc tenter une nouvelle fois de retirer le tissu pour voir où je vais opérer. Wow, quel grand mot …
Car on est vraiment loin d’y être là. Avec mes six épingles et que dalle comme fil pour relier le tout, je suis vraiment juste en train de traiter son ventre comme une couche de gosse. La pointe a un peu de mal à rentrer dans la peau. Je dois y mettre un peu de force. Ce qui fait que la première épingle se plie méchamment et devient inutilisable. Il ne m’en reste plus que cinq. Ce n’est pas ça qui va faire une grande différence. Mais comme tous ceux autour de moi semblent y croire et que Jérémy a perdu connaissance. Qu’est-ce qu’il me reste à perdre ?

Les cinq autres épingles de sureté me donnent moins de fil à retordre (… no comment). Du moins pour pénétrer les deux couches de peau. C’est juste que ça glisse horriblement à la fermeture. Et comme je ne peux pas compter sur mon assistante pour prendre le relais (je pense qu’elle risque de gerber dans la plaie … et si on évitait ?), eh bien c’est Bibi qui s’y colle pour toute la ribambelle. Je sens de la sueur perler sur mon front et je suis presque tentée de l’essuyer avec ma manche. Presque. Vu le carmin qui m’a quasi complètement retapissée de la tête aux pieds. Si je pouvais juste éviter d’en avoir dans les cheveux. Enfin, plutôt dans les yeux et la bouche, mais ça ne risque pas d’arriver. Pas dans son état. S’il me tousse encore une fois dessus, il mourra par exsanguination et times. Toute cette énergie et cette improvisation de terrain pour rien. Enfin, y’en a qui filment toujours et se permettent même de commenter. Pourvu que ça n’atterrisse pas sur les réseaux sociaux …

- « C’est bien, continuez à lui parler. »

Même inconscient, il peut entendre ce qui se passe aux alentours. Si je lui sifflais le fin fond de mes pensées, il n’aimerait assurément pas. Mais notre petite chevelure rebelle par contre. Surtout s’il a bien retenu qu’elle était actuellement célibataire. Oui, on est d’accord, on s’en fout royalement, mais Jérémy reste un homme malgré tout. Et ce genre de pensées lui est naturelle. On le pardonnera. Pour cette fois.

- « Claudia, fais-moi le topo trafic ! »

Elle est toujours là aussi. Je le sais. Même si aucun mot ne sort du téléphone. Elle doit être en train d’enguirlander quelqu’un à l’heure qui l’est. Si elle a entendu ne serait-ce que la moitié de la discussion précédente, elle doit également être en train de visualiser la scène. Ce qui fait qu’elle a tout fait en son pouvoir pour m’envoyer des renforts. Car tôt ou tard ça va se savoir que je suis en mode totale impro et qu’en fait je n’ai de docteur que le nom en bas d’un bout de papier.

J’entends le début d’une phrase … puis le téléphone s’étend. L’espace d’un quart de seconde, j’ai vu la petite batterie à droite en haut de l’écran clignoter. Merde.

- « On va devoir se débrouiller. »

C’était déjà le cas jusqu’à présent, on est d’accord. Mais là on vient de passer à l’étape au-dessus. Certes quelqu’un pourrait me prêter son téléphone pour recommencer l’opération, mais ça ne servira pas à grand-chose si ce n’est perdre de précieuses minutes. Qu’on n’a pas donc.

- « Vous savez conduire? Vous avez une voiture ? »

Et non, les deux ne vont pas nécessairement de pair. Ni dans l’un sens, ni dans l’autre. Limite ça m’arrangerait mieux de trouver une bagnole. Et quelqu’un de pas trop regardant sur les potentiels dégâts sur la moquette. Là on peut encore aviser. Dans une autre vie j’ai passé mon permis théorique. Ça ne devrait pas être folichon d’arriver au moins jusqu’à l’hosto. Note à moi-m-même : deuxième cours du soir.
D’un autre côté, si elle sait conduire, on finira bien par trouver un véhicule qui n’a pas été fermé à clé … non ? On est toujours à Downfall, vous n’allez pas me faire gober qu’aucun des fidèles membres de notre public muet n’est capable de forcer une serrure et démarrer un moteur ?

- « Ce sera plus facile si on finit par coller un nom sur nos visages mutuels. »

Ce que je répète depuis un petit moment maintenant.

- « Je m’appelle Mickaëla. Enchantée n’est peut-être pas le mot le plus adéquat, mais c’est tout comme. »

Ceci étant fait, on démarre ou t’as encore besoin de mon numéro de sécu avec ça ?

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Andrea Espinoza
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyLun 21 Nov - 22:30

Jusqu’à ce soir, j’ai toujours eu l’impression que j’étais le genre de nanas qu’on pouvait dire courageuse, et que je pouvais résister face à n’importe quelle situation. Il aura rien fallu d’autre qu’un inconnu en train de se vider de son sang sur le parking de mon lieu de travail pour comprendre que je m’étais toujours plantée. Pas de WonderAndrea ou de SuperAndy, je suis juste une pauvre nana flippée par la vue du sang, les plaies bien dégueulasses, et la perspective plus que déplaisante d’être en train d’assister aux dernières minutes de vie d’un pauvre mec. Si on me laissait le choix, je troquerais ma place contre celle de n’importe lequel de ces spectateurs à la con, sans même avoir besoin d’y réfléchir. Voilà où j’en suis, les genoux couverts du liquide vital de ce type, les mains rougies et tremblantes, incapable d’aligner plus de deux pensées cohérentes à la fois.

La docteure récupère les épingles à nourrice tout juste retirées de mon pantalon, celles supposées aider Jérémy à tenir jusqu’à ce que l’ambulance arrive, et qu’on puisse refourguer le blessé à des secouristes qui sauront quoi faire. Là, s’il arrive quoi que ce soit à ce type, on pourra plus être tenues pour responsables, pas vrai ? Sans compter que les ambulanciers auront normalement tout le matos nécessaire pour aider ce gaillard, sans avoir à faire les fonds de tiroir du Pop’s, ou à récupérer ce qui empêche mon froc de tomber sur mes chevilles. Là…là, bon sang, c’est même plus du système D tellement la situation est foireuse, c’est vraiment du rafistolage à la va-vite, histoire de dire qu’on a fait quelque chose, et qu’on est pas simplement restées aux côtés du blessé, à attendre de voir combien de temps il allait mettre pour finir par se vider entièrement de son sang.

Quoiqu’il en soit, je me planque bien vite derrière mon étiquette de serveuse pour pas me retrouver à endosser la tâche délicate et difficile de suturer Jérémy avec mes propres épingles. Hors de question. Je pourrais jamais faire ça. La simple idée de devoir l’embrocher avec les bouts pointus me donne la sensation que mon repas va pas rester à sa place bien longtemps. Non, vraiment, c’est…inenvisageable. Et puis ça tombe plutôt bien, vu que la nana à mes côtés est censée être médecin. Elle doit bien savoir quoi faire, et comment le faire pour aider notre victime ensanglantée. Pressant bravement mes paumes contre le tissu imbibé de sang, je les retire quand j’ai le feu vert d’Andersonn, détournant les yeux dès que la pointe en métal traverse les chairs, m’obligeant à un contrôle strict de ma respiration pour pas gerber dans la seconde. Je m’en étais toujours doutée jusqu’à maintenant, mais j’ai désormais la certitude que j’aurai jamais pu travailler dans le médical, ou avec des animaux. J’ai pas ce qu’il faut dans le bide pour ce genre de situation, c’est officiel.

Pendant que la couturière poursuit son œuvre, et que moi je me concentre pour garder le contenu de mon estomac à sa place, je remarque que Jérémy a les yeux fermés. Genre…fermés pour de bon, pas ces espèces de papillonnements qu’il lui arrivait d’avoir jusqu’à maintenant. Alors, je fais le premier truc qui me passe par la tête, lui parler, lui dire de s’accrocher, de tenir bon, que ça va aller. Il peut pas mourir, hein ? Pas juste comme ça, pas après que la docteure se soit occupée de refermer sa blessure, tant bien que mal. Je relève d’ailleurs le visage vers elle quand elle s’adresse à moi, sans avoir le réflexe de masquer mon expression perdue, et angoissée à souhait. Que je lui parle ? Mais pour raconter quoi, bon sang ? “-D’accord, d’accord…je vais lui parler.” Et pourtant, alors même que je lui dis ça, je me retrouve à court de mots, sans savoir quoi raconter au type en train de clamser, juste là, devant mes yeux. “-Quand vous serez rétabli, j’espère que vous reviendrez. Vous demanderez à mes collègues qu’elle vous adresse à moi si jamais je vous vois pas arriver, je vous offrirai un milkshake. Je connais pas des masses de Jérémy, alors je devrais savoir facilement qui vous êtes. Surtout si vous vous présentez comme Jérémy, le gars qui a ruiné mon jean et mon tablier.” J’ai un rire nerveux qui m’échappe, sans que je sache trop comment, et qui me noue la gorge en même temps. En vrai, je pourrais même lui offrir deux ou trois milkshakes s’il survit, même si c’est pas du tout le genre de trucs que j’ai le loisir de me permettre en temps normal.

Par réflexe, mon regard se pose sur le téléphone quand Andersonn reprend contact avec la personne qui a répondu aux urgences, et je prie très fort pour que cette Claudia, qui qu’elle soit, nous annonce que le véhicule est à deux rues d’ici, et que notre cauchemar est sur le point de prendre fin. Sauf qu’au lieu d’entendre ces douces paroles réconfortantes, l’écran vire au noir, et la voix de Claudia s’éteint, sans doute en même temps que le téléphone. J’ai les yeux qui s’arrondissent, et la peur qui me donne un coup sourd au ventre, alors que je jette un regard angoissé vers la docteure : “-Se débrouiller ?! On parle d’un type qui se vide de son sang depuis plusieurs minutes et d’une ambulance qui arrive pas. Se débrouiller c’est pas vraiment une option envisageable !” Et en même temps, une part de moi à douloureusement conscience que c’est pourtant la seule qui est encore à portée de nos mains barbouillées de rouge.

La docteure a l’air plutôt sérieuse et j’admets bien vite que tout ça, c’est pas une blague du tout. Se débrouiller…se débrouiller !! Mais c’est déjà ce qu’on fait depuis que Jérémy s’est fait planter, improviser ! J’ai le regard qui se pose une nouvelle fois sur Andersonn quand elle me m’adresser ses questions, alors que j’hoche la tête, négativement, puis positivement. Merde, c’est l’inverse. “-J’ai une voiture…mais j’ai pas de pneus parce qu’une Barbie petite frappe me les a volés, alors on peut pas l’utiliser.” Une fois encore, je sais pas pourquoi je raconte tout ça. J’aurai pu juste dire oui, j’ai le permis, et je sais conduire, mais non, j’ai pas de voiture. Ça aurait été plus simple. Et ça nous aurait fait gagner de précieuses secondes qu’on a pas. J’en suis encore à me demander pourquoi je me retrouve à causer autant quand elle finit par se présenter. Ah ouais…la docteure Andersonn a un prénom. Mickaëla. C’est…d’accord, Mickaëla. “-Andy.” Et étrangement, je m’arrête là, alors que je pourrais sans doute ajouter un milliard de trucs en plus…mais rien me vient. Andy la trouillarde. Andy qui va gerber d’une seconde à l’autre. Andy qui est pas faite pour être médecin/infirmière/véto/bouchère, au choix.

Je finis par me lever d’un bond, pour me rapprocher des gens qui sont sortis du Diner, et en train d’assister à la scène, comme s’ils étaient au cinéma. Je m’étonne d’ailleurs de pas voir de paquet de pop-corn entre les mains de certains d’entre eux, puisqu’ils ont l’air de se croire au ciné, ou face à un spectacle. “-Quelqu’un a une voiture ?” Ils se regardent entre eux, ces idiots, alors que je sens le peu de self-control que j’ai s’envoler de seconde en seconde. Sérieusement ? “-Je vous cause, les abrutis ! Vous êtes quand même pas tous venus à pieds, ou sur le dos les uns des autres, si ?!” J’ai la voix qui s’élève un peu trop, alors qu’elle part dans des aigus que je connais pas. Je marche vers les clients, passe entre certains, avant de voir un truc briller sous les lampadaires. “-C’est des clés ça, non ?! Mais oui, c’est des clés !” Et je les arrache des mains du type hébété, qui se met à protester vainement. Autant dire que je suis pas des plus réceptives à ses arguments, alors que j’appuie déjà sur la clé pour ouvrir à distance la voiture, et tenter de repérer les phares allumés qui m’indiqueraient de quelle bagnole il s’agit. Il m’attrape par le bras, et je me dégage avec une hargne que je pensais pas avoir en moi à cet instant, alors que je lui fais face : "-Écoute bonhomme…tu veux être celui qui avait une voiture, et qui a refusé de ramener un type mourant à l’hôpital ?” Lourd silence, regard fuyant, nouveaux bégaiements que je fais mine de pas comprendre. “-C’est bien ce que je pensais. Merci pour le prêt.”

Et avant que Monsieur aie le temps de protester, je suis déjà de retour auprès de Micka et Jérémy, agitant les clés devant le nez de la docteure. “-J’ai des clés…et la voiture qui va avec.” Et son propriétaire est presque consentant sur le fait de nous la prêter. Glissant les clés dans la poche arrière de mon jean de nouveau trop grand, je me baisse pour attraper Jérémy sous les bras, avant de me faire un peu bousculer par une armoire à glace, que je pardonne volontiers de pas m’adresser le moindre sourire. “-Je m’en occupe ma petite.” En d’autres circonstances, je me serai peut-être offusquée qu’il m’appelle comme ça…ce soir, je me dépêche juste de lui laisser la place quand il porte Jérémy façon demoiselle en détresse, alors que j’ouvre la portière arrière du véhicule, le blessé s’y retrouvant allongé en quelques secondes. “-Je peux vous conduire à l’hôpital si vous voulez.” L'armoire à glace me jette un coup d'œil, avant de fixer Mickaëla. Il a sans doute compris que le cerveau ici, c’est elle.

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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyMar 20 Déc - 21:52

Quand je l’ai invitée à continuer à lui parler, je ne pensais vraiment pas qu’elle allait littéralement lui gerber un dictionnaire dessus. C’est fou combien de mots elle arrive à lâcher à la seconde. À la place de notre Jérémy national, j’aurais également opté pour l’inconscience à ce stade des préliminaires. Plus encore quand elle commence à s’exciter comme une puce épileptique quand je lui apprends la couleur du reste de la soirée. Autant elle lui a vendu un milkshake for free, et peut-être même un rencard à la clé ; là elle vient de lui assener le coup de grâce (de graisse aurait été plus de circonstances, mais à défaut hein on fait avec ce qu’on a ; c’est-à-dire trois fois rien et cinq épingles à nourrice).

Je la regarde déverser sa hargne, sa rage et (surtout) sa frustration à travers une expression des plus neutres. J’ai connu pire patient. J’ai vécu pire drame. Au moins elle ne se trimballe pas avec un scalpel à la main et elle évite les grands mouvements brusques des bras. Certes, le scalpel ça aurait encore pu nous aider (en partant du principe qu’il y avait la trousse qui va avec) ; mais les mouvements je peux bien m’en passer. Il n’aurait fallu que ça : qu’elle m’éborgne en plus de déverser ses craintes sur notre patient X. Là depuis son fin fond rêve d’ignorance et de quiétude, pour une fois j’espère très fort que tous les scientifiques se trompent en prétendant que les comateux entendent quand même ce qui se trame tout autour. Je n’ose même pas imaginer l’état de stress et d’angoisse dans lequel il doit se trouver lui-même. Car malgré tout, je sens toujours une faible pulsation parcourir son abdomen. Il est fortiche le gars en tout cas, je ne lui aurais jamais donné un tel délai vu la balafre d’origine. Mais mon degré de scepticisme n’a pas dû aider dans la balance.

Tout à coup elle semble se calmer un peu. Probablement l’effet de l’adrénaline qui va et qui vient (entre ses reins, badum tss – non mais quand je dis que je m’accroche à un rien pour décompresser, il faut vraiment le prendre à la lettre hein !), mais ça me va. On va pouvoir communiquer elle et moi. Du moins, autant que faire se peut. Car quand je parle (et accessoirement pose une question) il n’y a que son visage qui réagit. De droite à gauche et de gauche à droite. Puis de haut en bas. Cligner une fois de yeux pour oui, deux fois pour non. On en est presque là en fait. Dommage que Jérémy a fermé les yeux, cela aurait pu nous aider. Même si je comprends encore et toujours sa préférence pour la fuite. Puis il ne faut pas oublier l’indice de douleur. Celui-là même que ni mon apprentie (tant qu’à faire) ni moi-même n’avons à subir. Pour le moment. Car vu comme la soirée évolue, pas certaine qu’on va arriver entière à l’entrée des urgences. Mais ne projetons pas (trop) à l’avance. Gardons un peu de suspense pour la suite, voulez-vous. Bah, même si vous ne voulez pas hein …

DONC ! Conduire : non. La voiture : oui. Ah non, elle s’est gourée. Ou j’ai mal interprété ses signaux. Qui semblaient pourtant clairs. Bref, on s’en fout ! Une bagnole donc, mais callée sur ses quatre jantes. Alors je ne suis pas mécano dans l’air (pas plus que toubib urgentistes, couturière ou autre ; donc on n’est plus vraiment à ça près), mais quelque chose me dit qu’on pourrait essayer … et que ça va faire mal. À elle, à moi, à Jérémy, à la carrosserie, à la route … mouais, j’ai beau être suicidaire, ce n’est pas vraiment ça mon kiff. Surtout qu’on risque d’aller encore plus vite en le portant tout simplement. Même avec nos cinquante kilos toutes mouillées et nos bras gringalets. Façon de parler.

Je m’apprête à proposer la solution de secours à Andy donc lorsque celle-ci se lève d’un bon et plonge en direction du public. Voilà-t-il pas qu’elle va mendier pour une voiture et les clés qui vont avec. Là encore, je reste sceptique par rapport à son approche. Si une âme ô combien charitable avait eu le chiche de nous venir en aide, est-ce qu’elle ne se serait pas manifesté plus tôt dans la débandade tu penses ? Là, très chère, nous sommes juste deux actrices amateur dans un spectacle de rue. Limite tu leur aurais demandé une pièce et quelques applaudissements, d’accord – mais la BM et le bipbip qui va avec, non mais tu … ah ben, tu as réussi. Bravo. Franchement. Si j’avais un chapeau, je te l’aurais retiré. Mais comme je n’en ai pas. Et que mes doigts sont tellement détrempés de viscosité humaine … eh bien tu comprendras ma réticence à ne serait-ce que mimer le geste. Mais qu’à cela ne tienne, nous avons une bagnole que diable ! Y’a peut-être bien encore un semblant d’espoir dans ce trou paumé de l’Amérique ! Trump serait tellement fier de nous !

Et tandis que notre petite Andy nationale revient avec son trésor (qu’elle agite sous mon nez comme pour me faire baver de sa réussite, pourtant je n’ai rien à lui envier je viens de recoudre un macchabé en devenir avec une poignée d’épingles de pantalon de lendemain de rupture – excusez du peu) et se baisse pour ramasser notre Jérémy tout aussi nationale (d’ailleurs je me demande bien ce qui lui passe par la tête pour croire que c’est comme ça qu’on va s’y prendre) ; eh bien nous nous faisons interrompre dans notre joute silencieuse par un homme qui fait deux fois sa taille et au moins trois fois sa carrure. Pas étonnant qu’elle lui pardonne plus que volontiers la petite bousculade qui n’est passée inaperçue de personne. D’ailleurs ce qui ne m’échappe pas non plus c’est le fait que notre public a commencé à se disperser à l’approche de ce nouveau protagoniste. À commencer par le mec à la bagnole. Moi on me pique mes clés, je ne suis pas certaine de réagir ainsi. Bon certes, je ne les ai pas les clés (sans quoi on n’en serait pas arrivées là), mais c’est tout comme. Au moins j’aurais insisté pour rouler. Après tout c’est MA voiture. Ce sont MES sièges qui vont devoir passer au pressing après. Mais là n’est, de toute évidence, pas la question.

Je n’ai pas le temps de répliquer ou de protester ou de quoi que ce soit que le gorille s’éprend de monsieur Doe à l’image d’un jeune marié (sous amphet’). En trois pas à peine il a atteint la voiture dont Andy lui tient la portière ouverte. À voir l’aisance de ses mouvements, on pourrait croire qu’il n’en est pas à son premier essai.
À mon tour je me lève, en chopant mon téléphone portable au passage que je glisse dans une de mes poches. Je le mettrai en charge aux urgences pour récupérer assez de jus pour passer la frontière. Parce que forcément tout ce bouzouff ne pouvait BIEN SÛR pas tomber un autre jour !

Je m’approche de mes deux compagnons d’infortune et me fais reluquer par le plus grand des deux. Je lui rends son regard. Même si ça ne doit pas forcément transpirer le même degré de persuasion.

- « Y’a moyen de faire plus louche encore vous pensez ? »

C’est sorti tout seul. Je n’aurais probablement pas dû. Pas vu sa carrure. Pas vu la circonférence de ses biceps. Pas vu la réaction du public. Mais je m’en fous pas mal là. Déjà que la soirée avait mal commencé, tout indique que ça ne peut qu’empirer. À chaque fois qu’on trouve une parade, y’a le karma qui vient s’en mêler. À croire que la morale de l’histoire est que la prochaine fois on laisse le blessé se démerder tout seul. Ouais ben fallait y penser avant de glisser un toubib dans les PNJ. Maintenant l’univers n’a qu’à assumer !

- « C’est fort aimable à vous de proposer, mais je connais le chemin. »

Et je le dépasse comme si de rien n’était.

- « Andy, vous conduisez. »

Oui parce que moi avec mon petit bout de papier qui a plus de vingt ans et qui n’a jamais servi … j’ouvre la portière, histoire de prendre place aux côtés de notre patient et m’assurer que ça sert encore à quelque chose de démarrer, quand une énorme paluche vient se poser sur le cadran de ladite porte.

- J’ai dit que je pouvais conduire.

Je me retourne une nouvelle fois vers lui, recherchant à nouveau son regard faussement autoritaire. Non mais il croit me faire peur le singe en costume ? Ce n’est vraiment pas la soirée, je dois le dire en quelle langue ?!!

- « Vous avez dit que vous pouviez rouler, si on voulait. Et je ne veux pas. »

C’est un coup à se faire kidnapper et arriver partout sauf là où on doit être. À savoir, devant mon appart dans exactement une heure pour récupérer mon trolley et mon clébard pour aller cracher mon venin sur cet avocat véreux qui n’est bon qu’à me coûter un rein sans transfusion gratuite pour autant !

- « Andy, oui ou merde non? »

Tu montes ou tu descends?
Tu marches ou tu crèves ?
Non je déconne, t’as toujours ton libre arbitre.
Le mec est recousu (pour ainsi dire), sa carcasse est dans la bagnole. On peut dire que tu as faire ta part du taf. Personne ne pourra rien te reprocher, promis. À toi de voir si on s’arrête là et que je change de coéquipier ou que tu vas pour la totale ? Je ne te force à rien. J’espère que tu en es au moins consciente. Sinon je vais encore devoir me justifier auprès de la hiérarchie. Et si on pouvait éviter …

- J’insiste.

Je sais.
Et voyez-vous, c’est bien ça le problème.
Reste à savoir si c’est uniquement le mien, ou si on partage encore un peu notre galère de la soirée.
Car perdue pour perdue …

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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyLun 26 Déc - 22:59

Je crois qu’après une soirée comme celle-ci, je vais plus jamais me plaindre qu’il s’est rien passé d’intéressant dans mes journées. Le sang de Jérémy sur mes mains, le cerveau en plein bordel, l’estomac sur le point de se répandre sur le bitume fissuré du parking de chez Pop’s, je crois que je suis en train de revoir mon acceptation de la banalité, et du fait que chaque jour à tendance à se répéter, presque à la minute près. Il est sans doute encore trop tôt pour ça, mais dans les jours qui viennent, je manquerai sans doute pas de constater à quel point certains trucs qui vous arrivent se résument à…rien. A une simple décision, prise l’espace d’une fraction de seconde, un truc insignifiant dont on imaginerait pas qu’il pourrait avoir autant de conséquences. Genre, ramener à une cliente l’enveloppe qu’elle a oublié à sa place avant de sortir. J’aurai pu m’en foutre. J’aurai dû m’en foutre. La garder pour moi, histoire de voir si je pouvais récupérer un billet ou deux. Au lieu de ça, je me suis précipitée après cette inconnue, alors qu’un type se faisait saigner devant nous. Sérieux, quelle idée à la con.

Voilà comment on se retrouve à faire de la couture sur ce pauvre Jérémy, lui au bout de sa vie -littéralement, pour le coup- moi à lui raconter des trucs sans queue ni tête pour essayer de détourner son attention de la douleur qu’il doit ressentir, et la doctoresse, à lui enfoncer des épingles à nourrice dans le bide. J’avais rien prévu de particulier pour ce soir, mais j’aurai pu me contenter de rentrer tranquillement chez moi, et d’errer dans mon appartement vide, jusqu’à ce que vienne l’heure de me coucher. Au lieu de ça…au lieu de ça, je patauge dans le sang de ce pauvre gars, et essaye de mobiliser chaque once de bonne volonté que j’ai en moi pour pas lui vomir dessus. Et oui, c’est compliqué. Les mésaventures de Jérémy finissent par attirer quelques curieux sur le parking, et je me retrouve à racketter des clés de voiture, puisque notre ambulance s’est perdue Dieu seul sait où. Y’a pas beaucoup de volontaires pour nous aider à emmener le blessé jusqu’à l’hôpital, alors je me décide à prendre les choses en main, et par “choses”, je veux dire à arracher presque des paluches d’un client son trousseau de clés de voiture.

Jérémy a pas l’air bien lourd, et avec tout le sang qu’il a perdu, il doit l’être encore moins. Alors, bravement, je me penche pour le choper sous les bras, me doutant que sans j’ai besoin de lui demander, mon acolyte d’infortune le prendra par les jambes, et on le portera jusqu’à la voiture dont les phares se sont allumés quand j’ai appuyé sur les clés. Sauf qu’au lieu de voir Micka aider notre pauvre passoire humaine, c’est un gros costaud qui s’impose, et soulève Jérémy du sol aussi facilement que s’il était une brindille. Pas le temps de s’extasier sur les gros bras de l’inconnu, pas davantage de le recadrer pour son manque de politesse, que je me retrouve à devoir lui tenir la porte de la voiture, alors qu’il dépose l’évanoui sur la banquette arrière. D’un coup d’oeil, j’essaye de trouver le gars à qui j’ai chipé les clés, m’attendant à ce qu’il veuille s’incruster dans notre road-trip du désespoir, mais au lieu de quoi, il s’adresse à moi, paumes en avant, en me disant que j’aurai qu’à rapporter la voiture ici, après notre petite course. Mais…quoi ?! Qui laisse sa voiture à deux nanas qu’il connaît pas ? On pourrait…l’accidenter, la revendre, la cramer…même si on va juste la dégueulasser de pas mal de sang. Celui de Jérémy, pas le nôtre. Enfin…j’espère.

Sauf que j’ai pas le temps de comprendre pourquoi le proprio de la voiture se montre si frileux à nous accompagner, ni pourquoi la foule de curieux s’est clairsemée, que le tête à tête entre Micka et l’inconnu me fait froncer les sourcils. Pourquoi ils se regardent comme ça, tous les deux ? Est-ce que c’est un de ces moments, où ils entendent chacun une musique romantique dans leurs têtes, que leurs pulsations cardiaques accélèrent subitement, que leurs hormones se mettent à grimper en flèche dans leur cœur au doux son de l’amour ?! Ah…nan…Micka le trouve juste chelou. C’est vrai que cette façon qu’il a de la regarder, le Gorille, c’est un peu flippant. Mais elle se laisse pas impressionner, et après m’avoir dit que c’est moi qui roule, la doctoresse se dirige vers la banquette arrière…sur laquelle elle a pas l’occasion de s'asseoir.

Mais sérieusement, c’est quoi son problème, à lui ? Il a l’air aussi commode qu’un pitbull qu’on aurait oublié de nourrir depuis un peu trop longtemps. Et c’est quoi, cette insistance à vouloir à tout prix nous conduire à l’hôpital. Ça va y’en a pas trente six à Downfall, on devrait pouvoir le trouver assez facilement, ce foutu hôpital ! Sauf que…il se passe un truc, là. Un truc que je pige pas vraiment, mais pour ma défense, je comprends pas grand-chose à ce qui se passe depuis que je suis sortie rendre à Micka sa foutue enveloppe. J’espère qu’elle était importante, au moins, son enveloppe. Elle me fait atterrir en s’adressant à moi, alors que je sors le trousseau de clé de ma poche arrière, en hochant la tête. Elle va pas pouvoir surveiller l’état de santé du blessé et conduire en même temps. “-Je conduis.” Enfin…je crois ? Parce que l’armoire à glace a pas l’air trop décidée à nous laisser partir, et alors qu’il dit qu’il insiste -au cas où on avait pas déjà remarqué- il s’avance d’un pas vers la doctoresse, la surplombant de toute sa taille, la coinçant entre lui et la bagnole. Ouais…louche au possible.

Un infime gémissement s’échappe des lèvres de Jérémy, et je finis par ouvrir la portière pour m’installer derrière le volant, et décoller une bonne fois pour toutes. “-Dites, Hercule, c’est bien gentil à vous, mais on est un peu pressées. Ce gars-là, il doit plus avoir beaucoup de sang dans le corps…” Le Gorille rive son regard vers moi, et sans que ça m’étonne pour autant, c’est pas le regard le plus sympathique ou amical qui soit. J’ai l’impression qu’il se passe une éternité entre le moment où il plonge la main vers l’arrière de son froc pour en ressortir une putain d’arme à feu, qu’il pose à plat sur le toit de la voiture entre nous, et celui où il finit par ouvrir sa bouche. [colorblue]“-Tu veux rouler ? Ok, tu vas rouler. Mais si tu vas ailleurs que là où je te dis d’aller, je la plombe. Et t’es la suivante. Pigé ?”[/color] Mais…c’est quoi cette soirée de merde ? Je vais éviter de me demander si la situation pourrait être encore pire, parce que le destin pourrait vouloir me prouver que oui, et nous faire tomber le ciel sur la tête.

Je crois que j’ai dû rester trop silencieuse au goût de Monsieur Muscles, qui récupère le flingue pour le faire disparaître de ma vue, alors que j’entends ce bruit indiquant que d’une simple pression de son doigt, la balle partira. Je vois pas la scène, la carrosserie m’en empêche, mais je peux que supposer que l'arme est désormais un peu trop proche des côtes de Micka, et le tas de muscles finit par répéter : “-Pigé ?” Je sens ma tête qui s’agite de bas en haut d’elle-même, sans qu’aucun mot quitte mes lèvres pour autant. “-File moi les clés. Je veux être sûr que tu vas pas faire de conneries.” Même moi je sais quand il est plus l’heure de faire la forte tête, et juste de coopérer en fermant sa gueule, alors, par dessus le toit de la voiture, je lui tends les clés qu’il m’arrache des mains, tentant au passage d’accrocher le regard de la doctoresse, sans succès. Elle…elle est coincée entre la montagne d’emmerdes qui vient de nous tomber dessus, et la voiture. C’est sûr qu’elle va pas pouvoir tenter de se sauver. Moi…? Je pourrais. Je cours vite. Je le sais de toutes ces fois où je me suis barrée en courant en entendant les sirènes d’une voiture de flics alors que j’étais en train de taguer un mur. Je pourrais ouais…mais la perspective de me prendre une balle en plein dos me tente moyennement. Je finis donc par me glisser derrière le volant, attache même ma ceinture, alors que l’enfoiré qui menace Micka lui montre la banquette arrière, juste à côté de Jérémy du canon de son arme. “-Tu tentes un truc, et c’est la petite qui y passe.” Décidément. Il aime bien menacer les gens, ce con. Et m’appeler petite, pour une raison que j’ignore. Je me retiens de lui dire que je fais 1m65, et que je suis donc largement dans la moyenne. Ce serait pas productif…et j’arrive de toutes façons pas à faire la moindre phrase cohérente. Mon cerveau fonctionne pourtant parfaitement bien, peut-être même un peu trop, imaginant déjà mille scénarios catastrophe de comment pourrait finir la soirée. Une balle dans la tête, la mort. Un accident de voiture, la mort. Découpées en petits morceaux par Hercule et ses potes, la mort. Y’a quand même une certaine constante qui se dégage de tout ça.

Et alors que la porte arrière claque, me faisant sursauter au passage, le Gorille ouvre à la volée la portière passager, alors qu’il braque l’habitacle de son arme. Si le moteur était allumé, j’aurais peut-être pu accélérer d’un coup, et on se serait sauvées. Mais ce con a pensé à tout, et après s’être laissé tomber sur la place à mes côtés, il me tend les clés, alors que son arme se rive de nouveau vers Micka, installée derrière. “-Démarre, et quitte le parking. Roule normalement, et fais rien de suspect.” Oui, je sais. Sinon, boum, boum, plus de Micka, plus d’Andrea. Comme si c’était déjà pas suspect qu’il grimpe avec nous en voiture. Je dois m’y reprendre à trois fois pour réussir à démarrer la voiture, alors que j’en suis pourtant pas à mon coup d’essai. A croire que la présente de Musclor et de son arme à feu me rend nerveuse. D’un coup d’oeil, je capte enfin le regard de la doctoresse dans le rétroviseur, même si je suis incapable de l’interpréter, et bientôt, c’est chez Pop’s qui apparait dans le petit miroir, de plus en plus petit à mesure qu’on s’éloigne.

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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyMar 24 Jan - 20:04

J’insiste.
Tu insistes.
Il insiste.
Eh bien qu’il insiste donc ! Qu’est-ce que ça peut bien me faire bordel ?!

Bon, c’est clairement un autre mot qui m’a traversé l’esprit là, mais j’ai encore réussi à le retenir. La preuve, incontestée et incontestable, que nous n’en sommes pas encore là où on aurait pu être (rien que ça). Traduction : il y a encore un peu de marge. Pas beaucoup, mais il en reste. Ce qui est un exploit en soi. Après le lapin, le blessé surprise (comme dans un kinder de sous-marque), l’assistante véto sans diplôme ni expérience (elle aurait dû ouvrir un kinder elle aussi tiens), l’ambulance qui se perd (enfin, on ne sait pas vraiment ce qui lui est arrivée à la donzelle), le téléphone qui meurt d’un infarctus … ma foi, le gorille manquait cruellement à l’appel. Et pourtant, oui pourtant, j’arrive à me retenir de lui cracher ses quatre vérités (et les miennes par extension) à la tronche (voyons, là aussi il m’aurait été aisé d’utiliser un autre mot pour dépeindre ce qui lui tient lieu de visage – voyez quelle âme charitable je fais ce soir). Ce qui implique plusieurs choses : petit un, je peux encore en encaisser un peu (autant l’avouer d’entrée de jeux, on sait quand même que ça VA arriver) ; petit deux, je suis blasée. De cette scène absurde. De cette soirée de chiottes. De cette satanée ville maudite. Et, probablement, un peu de la vie herself aussi. Mais juste un peu hein. Faudrait pas non plus que quelqu’un se sente visé et culpabilise d’avoir foiré son jet de dés.

Parce qu’à bien y réfléchir, c’est bien là qu’on a atterri elle et moi. Enfin, je ne peux jamais parler que pour moi. Ça tombe Andy c’est juste le familier que le MJ m’a accordé en bonus-pitié car mes statistiques étaient tellement pouraves en début de partie. Pas certaine que ça passe pour une aubaine pour elle. Un guérisseur, certes, mais pas celui qu’on espère quand on entend sa présence ô-combien-rassurante dans le jeu. Désolée miss, moi je soigne les bobos dans la tête. À comprendre : je peux consoler le troll qui s’est pris un coup critique par un nain ou un elfe imbu de sa personne pour lui faire gagner assez de confiance en soi pour remettre ça (ou par s’allier à notre camp, oui c’est une meilleure option, mais j’ai bien envie qu’il foute la misère à Legolas là pour le coup). Bref ! Nous voilà donc devant le boss final du niveau. Grand. Gros. Et … ah ben tiens, je ne l’avais pas vu venir celle-là (du-uh) armé. Quelle tournure imprévisible. Ouhlala ! Vous la sentez l’exaspération là ? Et mon amour profond pour les parties de jeux de rôle sur table ?

Déjà il me calle contre la carrosserie de la bagnole avec son cou et ses biceps à la John Cena (pour ne citer que lui). Je ne recule même pas (et non, pas parce que la voiture m’en empêche). À quoi bon le ferais-je ? Pour, en plus, lui faire le plaisir de se sentir davantage encore supérieur dans cette lutte silencieuse ? Coco, tu fais au moins vingt-deux centimètres de plus que moi. Je m’envole si tu venais à me souffler dessus (bon pas vraiment, et tu peux toujours essayer, mais rien que par esprit de contradiction je resterais bien ancrée sur le sol). J’arriverai à me faufiler derrière tes épaules si on venait à improviser un jeu de cache-cache. Mais cela ne m’oblige en rien (niks, noppes, nada, que-dalle) à trembler de tout mon être quand tu essaies (oui ESSAIES) de me foutre la flippe avec un regard un peu mauvais. Déjà, je suis psy. J’ai vu des yeux bien plus dérangés que ça, tellement même que toi aussi tu aurais fini par reculer à force. Et crois-moi, y’en a quelques-uns qui m’aiment plutôt bien dans le centre – je dis ça, je ne dis rien. Accessoirement j’ai vécu des années et plus d’années encore avec quelqu’un de vachement moins grand, de beaucoup moins large et devant lequel je me sentais bien plus petite que la sensation que toi (Hercules, donc) tu m’inspires prestement. Certes ce n’est pas la plus agréable, mais j’ai vu pire. Et j’ai assurément connu mieux. Alors OUI, je te tiens tête. OUI, je continue à te fixer dans le blanc des yeux, même si on déconseille en règle générale d’éviter de faire ça avec les animaux sauvages (que les félins, car avec les canidés ça n’a clairement pas le même effet – et NON je ne viens pas de te comparer à un loup, arrête de prendre tes rêves pour des réalités !). OUI je te pousse ouvertement à mettre à exécution les menaces que tu ne juges même pas utiles de vociférer. Tu penses sincèrement me faire peur à pointer ainsi ton flingue contre mes côtes ? Mais mon gars, s’il n’y avait que ça pour te faire plaisir ; je veux même bien appuyer personnellement sur la gâchette. Alors qu’est-ce que tu attends ? Tu nous épargnerais à tous la honte de ce qui va suivre. Crois-moi quand je te dis que tu viens de rater ta chance.

Mais non. Encore toujours des jolis mots qui sonnent tellement creux quand on en arrive à la partie action. Paroles, paroles, paroles – sur la petite note de musique je vous prie bien. Je lève les yeux au ciel. Je ne me retiens pas. Plus. Quand je vous dis que je suis blasée de chez blasée.
Quelques mots s’échangent entre Ducon et notre chauffeur attitré, dont il réclame les clés. Son surnom lui va comme un gant. Et elle démarre comment la machine coco? T’as peur qu’elle se barre avec la bagnole et le macchabé en devenir en te laissant seul avec moi? À bien y réfléchir, tu as raison : chope lui les clés, vaut mieux pour toi.
Car oui, je lui tiens toujours tête. Je le fixe toujours comme si tout ceci ne m’impressionnait pas le moins du monde. Ce qui est faux bien sûr. Après tout, même si les apparences ne le montrent pas comme tel : je suis et reste un être humain, avec ses réflexes, ses instincts et ses angoisses. C’est juste que les circonstances étant ce qu’elles sont … eh bien le chasseur il pourrait bien se faire le lapin. Le truc c’est que s’il lui tire dessus entre les deux yeux et depuis une si courte distance, ça risque juste d’en foutre partout. Et ça n’en vaudrait clairement pas la chandelle. Ni pour lui, et encore moins pour moi.

Il me grogne un truc pour m’inciter à monter à l’arrière. C’était un peu le plan oui, merci bien beaucoup monsieur la lumière. Et une petite menace gratos en plus, une ! Je secoue un peu la tête tout en laissant échapper un soupire par le nez tandis que je prends place (si gentiment demandé en plus). Il claque la porte à ma suite, manquant de peu de me l’envoyer dans la colonne vertébrale. Ce qui était sûrement son intention première. Eh bien dites donc, quelqu’un ici est susceptible …
Je me glisse de telle sorte à lever doucement la tête de Jérémy pour la poser sur ma cuisse gauche tandis que notre escorte prend ses aises à l’avant. Quelques ordres par-ci. Plus de menaces par-là. Le disque commence à se rayer. Je ne l’écoute même pas, me concentrant plutôt sur notre agonisant qui n’a toujours pas passé l’arme à gauche. Haha, quel lapsus révélateur. C’est qu’il tient à la vie ce petit gars. Bien plus que certains autres passagers de ce road trip improvisé.

Andy a du mal à se reprendre en main. C’est vrai que la soirée n’a pas été de tout repos. Vu son âge, l’expérience doit lui faire un peu défaut. Pourtant, en habitant Downfall. En bossant ici. On pourrait croire que … même si, et j’en conviens, ce n’est pas tous les soirs qu’on se fait braquer un flingue sur la tempe (ou ailleurs hein, ne faisons pas les difficiles) sous prétexte qu’on a eu à cœur de sauver un total inconnu d’une exsanguination assurée. Ça fera une sympathique petite anecdote à partager entre amis. Un jour. Peut-être. C’est du moins ce qu’elle doit se dire. Parmi trouze mille autres choses qui doivent actuellement se disputer la suprématie de ses neurones. T’inquiète fillette, ça va aller. Le karma n’en a pas encore fini avec moi. En parlant de ça. À mon tour d’attacher ma ceinture, tout en laissant un petit sourire se dessiner sur mes lèvres. Inside joke. Ce que l’armoire à glace ne manque pas de remarquer car déjà il se retourne vers moi, le regard mauvais (pas certain qu’il puisse en avoir un autre, mais soit), le goulot de son pistolet à sa suite :

- Ça vaut pour toi aussi.

- « Il en va de soi. »

Que je réponds du tac-au-tac tout en reprenant la tête du blessé sur moi. Je pose la paume de ma main gauche sur son front. De l’autre main, je tente de stabiliser son crâne. Je ne regarde toujours pas notre détraqueur. Je sais que ça le stitche. Et pas qu’un peu. Il ne comprend pas. Il commence à être moins attentif à ce qui se passe tout autour. Il se tourne davantage encore, allant même jusqu’à passer son arme entre les deux sièges. Il grogne un truc. Je n’écoute pas, me contentant d’humer une petite mélodie qui me traverse la tête (tiens salut toi, c’est sympa de nous rejoindre). Il le prend mal. C’est vraiment trop facile. Il gigote plus encore dans son siège. Pire qu’un gosse.

- Putain, qu’est-ce que tu …

BANG !
Ça, mes amis, c’est le bruit de l’ambulance qui vient de nous percuter de plein fouet.
Enfin, qui vient de percuter la porte côté passager.
Inutile de vous faire un petit dessin.
Disons juste que les airbags sautent. Et que ça ne fait pas grand-chose quand on n’est pas attaché. Encore moins quand on n’est pas installé dans le bon sens de la circulation. Ou de l’impact. Alors les deux …

Par miracle j’ai réussi à garder la tête de notre patient stable. Comme si je savais ce qui allait suivre. Bien sûr ( !) que je le savais. Enfin, pas nécessairement que ce serait une ambulance (NOTRE ambulance !). Ni à quel moment cela arriver. Et pour le même prix, c’est ma portière qui se prenait le choc.
Mais je ne vais pas me plaindre.
KARMA : la seule certitude imparable de ma life.

- « Andy, vous allez bien? »

Physiquement je parle.
On s’entend bien.

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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyDim 29 Jan - 21:53

Est-ce qu’il vous est déjà arrivé de vous interroger sur le sens de la vie ? Pas les trucs métaphysiques incompréhensibles à base de pourquoi on nait, pourquoi on meurt, pourquoi c’est autant la merde entre les deux, ou quel est notre but sur Terre, nan, rien de tout ça. Plutôt…pourquoi il vous arrive ce qui vous arrive. Qui vous avez pu froisser, là-bas en haut ? Enfin, en supposant qu’il s’y trouve quelqu’un, évidemment. Alors que j’attache la ceinture de cette bagnole qui est même pas la mienne, je me pose ce genre de questions. Est-ce que l’arrivée de ce gros balèze est la conséquence d’une décision que j’ai pu prendre y’a déjà un moment, d’un truc que j’ai pu dire, d’une chose que j’ai pu faire ? Est-ce qu’on provoque tout ce qui nous arrive dans la vie ? Ou est-ce que c’est juste le hasard ? Le fait d’être au mauvais endroit au mauvais moment ? A priori, l’arrivée de types louches armés aurait tendance à me rendre plus philosophe que je l’ai jamais été dans toute ma vie. J’en sais rien, si j’ai pu faire quelque chose qui aurait amené Hercule à se trouver sur le parking de chez Pop’s ce soir, mais il est là. Avec ses kilos de muscles. Sa sympathie à revendre. Et son arme à feu donc.

J’entends plus vraiment ce qui se dit encore à l’extérieur de la voiture, si notre charmant ami donne à Mickaëla plus d’explications qu’il m’en a filé à moi, ou s’il se contente des bonnes vieilles menaces dont il semble avoir le secret. Ce serait quand même bien qu’on sache…où on doit aller, par exemple. Ouais, ça a l’air de rien comme ça, mais ça pourrait être utile comme infos. Je tourne un peu la tête au moment où le docteur entre enfin dans la voiture avec moi, même si je sais pas si c’est vraiment rassurant que je sois plus seule avec notre tailladé, ou si j’aurais préféré qu’elle réussisse à se sauver. Le regard planté dans le rétroviseur pour essayer de choper le regard de mon acolyte d’infortune, j’ai l’impression de le fixer avec tellement d’intensité que je serais même pas étonné qu’il se fissure soudainement. Sauf que Micka relève pas la tête, et on a pas l’occasion d’échanger la moindre parole. Non pas que j’aurais voulu qu’elle me dise que je devais pas paniquer, et que tout allait bien se passer. J’y aurais cru moyennement. Quoiqu’il en soit, maintenant elle est là, installée aux côtés de Jérémy, et quelques instants plus tard, Hercule s’installe à côté de moi, côté passager, avec cette tronche de bouledogue qui serait prêt à mordre à la gorge le premier à le contrarier. Enfin…je sais pas si mordre, c’est vraiment son truc. J’ai l’impression qu’il préfère tirer d’abord et discuter ensuite.

Maintenant que j’ai de nouveau les clés, je démarre la voiture laborieusement après plusieurs essais, rendue nerveuse par notre ami l’excité de la gâchette. Enfin…non…j’espère qu’il sera pas si excité que ça par ladite gâchette, et qu’il lui viendra pas à l’idée de tirer sur qui que ce soit. Ou au pire…sur Jérémy, hein. C’est le seul de nous qui est déjà bien amoché. D’ailleurs, est-ce qu’il le sentirait encore, s’il écopait d’une nouvelle blessure ? J’essaye de rouler aussi normalement que possible, même si j’ai l’impression que pour n’importe qui se trouvant en dehors de la voiture, je dois avoir l’air suspecte, rien que dans ma façon de mettre mon clignotant. Bien sûr, que j’exagère ! Je fais que conduire ! Mais je conduis vers une destination inconnue, guidée par les directives d’un Gorille peu aimable qui pointe son arme tour à tour sur Micka ou sur moi, avec un inconnu en train de se vider de son sang sur la banquette arrière. Alors oui, j’imagine que dans ces conditions-là, je peux bien me sentir pas tout à fait comme d’habitude ! Vous avez déjà essayé de rouler sous la contrainte d’une armoire à glace, vous ? Ben essayez, vous verrez que c’est vraiment pas une partie de plaisir !

Je suis bravement -pour ne pas dire bêtement- les instructions d’Hercule. Tourne ici, puis là, prends telle rue. Il a vraiment une voix charmante celui-là. Si nous on ignore tout de notre destination, lui a l’air de savoir très exactement où il nous emmène…et sans grande surprise, c’est pas du tout en direction de l’hôpital. On vient de s’engager dans une rue pas très fréquentée à cette heure-ci, et qui est bordée de plusieurs intersections, à droite ou à gauche. Je sais pas si c’est moi qui ai pas vérifié mes priorités, ou l’autre conducteur qui roulait un peu trop vite, mais je capte pas la présence d’une autre voiture avant le choc, qui me secoue, et projette notre véhicule vers la gauche, dans un bruit effroyable. Mes yeux se ferment, alors que je crispe fort mes mains sur le volant, comme si ça pouvait me préserver de ce qui est en train de se passer. L’accident, ou notre rencontre avec Hercule, je vous laisse juger de quoi je parle exactement.

C’est la voix de Micka qui me sort de cette espèce de paralysie, et qui dissipe le brouillard bourdonnant autour de ma tête. “-Si je vais bien ? Si je vais bien ? Vous êtes docteure, ou humoriste ?” Ma voix me semble étrangère à mes propres oreilles, rendue tremblante par le choc de l’autre véhicule…dont je perçois les gyrophares quand je me décide à ouvrir les yeux. Sérieux, une ambulance ? Sauf que j’arrive pas à me réjouir, pas alors que mon regard tombe sur l’armoire à glace, le corps plié dans une posture qui a strictement rien de naturel. Merde, il est où son flingue. Et…pourquoi est-ce qu’il bouge plus ? “-Il est…?” Je sais pas pourquoi je suis incapable de terminer ma phrase. Mort. Clamsé. Crevé. Si ça se trouve, c’est exactement le sort que nous réservait le Gorille, et pourtant, les mots arrivent pas à franchir mes lèvres. De deux doigts tout aussi peu assurés que ma voix précédemment, je cherche le pouls de l’armoire à glace sur son cou de taureau, ne trouvant aucune trace d’un quelconque battement, même en insistant. Comment est-ce qu’il a pu mourir, juste comme ça ? On roulait pas si vite en plus, si ?

Sans même prendre la peine de vérifier l’état physique de mon corps, si j’ai la moindre blessure ou quoi que ce soit -faut dire que ça m’effleure même pas l’esprit- je me détache en vitesse, et sors de la voiture comme si quelqu’un avait foutu le feu à mon siège. Putain de soirée de merde. Je suis plus certaine d’être encore en mesure de réfléchir, c’est comme si les choses se faisaient par réflexe, comme si quelqu’un d’autre était aux commandes. Je me découvre une force presque surhumaine quand j’ouvre la portière de Micka avec une brusquerie qui m’est pas habituelle, remarquant vaguement du coin de l’oeil les ambulanciers qui descendent à leur tour de leur véhicule…enfin, de ce qu’il en reste. Fais chier quoi ! On a attendu désespérément une ambulance pendant une éternité, et là…là, elle nous a carrément foncé dedans ! Comment ils vont faire pour transporter notre blessé jusqu’à l’hôpital maintenant ? Je sais pas qui a préparé le scénario de cette soirée pourrie, mais il a un sens de l’humour qui m’échappe. “-Vous êtes pas blessée ? Et Jérémy, il…il respire encore ?” Rien est moins sûr. En tout cas, s’il s’en remet, il aura un tas de choses dont il pourra se vanter ce brave type. Et finalement, vu la montagne d’emmerdes qu’on a par sa faute, pas sûr que j’aurais envie de lui offrir le moindre milkshake s’il repasse Chez Pop’s un jour.

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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptySam 25 Mar - 20:47

Karma,that bitch.
Sauf qu’avec le temps, on apprend que la bitch en question elle n’aime pas particulièrement partager. C’est un peu comme les disputes en famille, avec un focus plus trois sur les relations entre frères et sœurs. Généralement ils adorent se mettre des bâtons dans les roues mutuellement, se traiter de tous les noms, enchaîner les coups bas et j’en passe (parce que c’est bien beau sur papier toutes ces théories, je n’en ai jamais été personnellement témoin – il faut dire que la différence d’âge entre moi et le reste de la fratrie n’a pas dû aider, mais soit). Mais toujours, TOUJOURS, entre eux. Si une partie externe venait à s’immiscer dans cette histoire, c’était à coup sûr la pire idée du siècle. Et vas-y que je rajoute les dommages et intérêts à l’affront subi !

Ma foi, autant mes sœurs et mon frère n’ont jamais eu ce genre de comportement à mon égard (et vice versa), fait est de constater que karma si. Ça tombe c’est un peu ma grande sœur cachée. Il ne faudrait pas en rire vu les parents que je me paie et l’enfance merdique qui en a découlé. Mais je m’égare (et cette histoire-là sera pour une autre fois … ou pas).

Karma donc. Jamais bien loin. Toujours fidèle au poste. Notre relation se situe même à un tel degré que j’arrive presque à prédire quand elle va pointer le bout de son joli petit museau (et là j’hésite entre lui attribuer une silhouette de fouine ou de limier – à voir ce qui la vexera le moins). Et j’avais vu juste – à quelques minutes près. Ce qui n’est pas mal, même pas mal du tout. J’aurais peut-être dû prévenir Hercule que mon jimini cricket à moi avait des allures peu conventionnelles et la rancune tenace. Et qu’elle n’aime pas trop se faire voler la vedette. Mais cela aurait assurément été moins drôle. Enfin, là encore ça dépend pour qui.

Je grimace un peu tandis que je bouge ma nuque et le haut de mon corps en général pour un premier diagnostic. Bon diagnostic est peut-être un peu (hum) exagéré. Disons plutôt un rapide état des lieux. Je me rappelle être partie vers l’avant malgré l’impact venant de droite. Ma tête a cogné le siège passager qui n’était pas pistonné par des airbags. Cela ne m’étonne que moyennement. On va dire que Downfall et les avancées technologiques modernes, ce n’est peut-être pas le mariage du siècle. Au moins il y en avait à l’avant. Au moins Andy était attachée. En parlant du loup. Ou plutôt de la brebis effarée (pour ne pas dire autre chose). Je reporte mon attention vers elle tandis que de sa voix tremblante elle essaie de me faire culpabiliser de ne pas mieux choisir les mots précédents mes points d’interrogation. Cela m’arrache, bien malgré la situation, un semblant de rictus. Si elle arrive à avoir de la repartie, c’est que le pire a pu être évitée. Heureusement. Je n’aurais pas voulu avoir sa mort sur ma conscience. Vous savez, il ne faut pas surestimer le pouvoir des airbags. Notre ami gorille ci-présent peut en témoigner. Enfin, il aurait pu. M’est avis qu’il est entre-temps dans l’ascenseur direction enfer là. Pour autant que l’enfer existe. Et qu’il est pire que tout ce qui se trame ici-même. Mais passons. Ce n’est ni le lieu ni le moment de se prendre d’une quelconque affection religieuse. Du moins en ce qui me concerne. Et ce n’est pas plus mal ainsi.

Sur ce, voilà que Andy déboule vers l’extérieur comme si elle venait de découvrir un cadavre dans le placard. Ce qui est, en quelque sorte, le cas. J’ai parfois tendance à oublier que toute la population de Downfall n’a pas nécessairement eu cette chance (hum-hum) auparavant. Moi perso, vu où se situe ma jauge de blasage (oui oui celui-là même qui découle de mon état blasé), je ne suis ni surprise, ni choquée, ni quoi que ce soit d’autre qui pourrait se justifier dans pareille situation. De là à déterminer si c’est une aubaine ou non … gardons cela en dehors de la conversation, accessoirement du monologue interne que je me tape.

Sauvée par le gong ! Ou plutôt par ma partenaire d’infortune qui ouvre ma portière avec l’impression de vouloir l’arracher de ses gonds. Désolée Andy, l’adrénaline va commencer à retomber et ça va faire mal. Si encore cela avait été un gosse coincé sous les décombres de la bagnole, je ne dis pas que vous n’auriez pas réussi (et encore, ça ne fonctionne que moyennant un lien de parenté suffisamment établi) ; mais là y’a pas mort d’homme. Enfin si, mais pas la mienne. Et le risque d’explosion imminente est largement exagéré dans les films, je vous rassure. Je suis une rabat-joie de première. Ne vous inquiétez pas, je le sais.

- « Non. »

Bien que je sens un peu de liquide me couler sur le front. Mais ça ne doit être rien de plus qu’une éraflure. Puis ce n’est pas comme si j’avais le temps pour plus. Pas maintenant. Pas ce soir. Je dois passer le mur d’ici quelques heures sans quoi mon laisser-passer va expirer et je n’arriverai pas à temps au tribunal. Ce que je ne peux clairement pas me permettre !

Au nom de Jérémy (tiens c’est vrai, je l’avais presque jarté de l’équation) mes mains prennent le relais et le mécanisme de la gestuelle s’active. Je soulève légèrement sa tête de ma cuisse (en me rendant tout à coup compte que mes mains n’ont pas décollé de là pendant toute la durée du choc, j’applaudis intérieurement mes réflexes de toubib-secouriste), me glisse vers l’extérieur et repose son crâne sur le siège. Un léger soupire s’échappe de ses lèvres. Ce qui répond par la même occasion à la question posée. J’en suis la première étonnée et je ne me prive pas de l’exprimer :

- « Eh bien figurez-vous que oui. »

Et je finis de m’extirper de l’habitacle tout en faisant signe aux deux ambulanciers de nous rejoindre. De vue leur véhicule semble joliment embouti à l’avant, mais pas pour autant non-opérationnel. D’ailleurs ils n’ont pas vraiment le choix. C’est ici que mon job s’arrête (haha, la bonne blague) et qu’eux prennent le relais. Je connais d’ailleurs un des deux bonhommes, ce qui m’arrange plutôt bien – ça va faciliter les choses. Je l’interromps avant qu’il n’ait eu le moindre mot à exprimer. Désolée Charlie, mais je suis pressée.

- « Il s’est pris un vilain coup à l’arme blanche. Il a perdu beaucoup trop de sang et pourtant il respire toujours. On l’a refermé à l’arrache. Ce n’est probablement pas très beau à voir. Pas besoin de vous préoccuper de celui à l’avant. Ce sera pour les collègues. »

Je rajoute encore quelques formalités que la jeune femme à mes côtés ne pourra soit pas comprendre, soit ne même pas entendre. En toute logique je devrais rester à ses côtés. Peser le pour et le contre du post-trauma. Sauf que voilà, le temps étant ce qu’il est, je n’ai tout simplement pas la possibilité de m’attarder davantage. Ce n’est pas faute de vouloir. Alors à moins qu’elle m’accompagne sur le retour ?

- « Je suis navrée Andy, je suis attendue ailleurs. Vous pouvez m’accompagner si nous partons dans la même direction ou accompagner mes collègues jusqu’à l’hôpital. Vous serez entre de bonnes mains. »

Lesdits collègues qui prennent leur rôle tellement à cœur malgré les circonstances et tandis que le premier s’applique à prendre les constantes de notre Jérémy Doe, l’autre trottine en direction de son bolide de la rescousse improvisée pour récupérer un nécessaire de secours. Cette fameuse trousse qui m’aurait été d’une bien grande aide il y a encore une demi-heure de cela. Fichtre, que le temps passe vite quand on s’amuse !

Tandis que Andy pèse le pour et le contre de ma proposition (en était-ce vraiment une ?) l’ambulancier numéro deux revient à ma hauteur et m’indique la plaie à hauteur de mon front.

- « Non ça ira merci. Jérémy en a bien plus besoin que moi. »

Pour ce que ça vaut, car je reste plus que sceptique quant à ses chances de survie. Mais inutile d’alarmer la serveuse pour autant. Sans quoi je ne suis pas prête de décamper. En parlant de cela, je commence déjà à m’éloigner du cadavre de la voiture (et pas que).
J’adresse une dernière parole à Andy – qui ne semble toujours pas avoir terminé d’analyser sa liste des pour et des contre de me suivre (après, je ne lui donne pas tort, vu comme notre premier échange de mots a fini …).

- « Demandez après Claudia aux urgences. Dites-lui que c’est moi qui vous envoie. Tout va bien se passer Andy. »

Je sais que ça sonne cliché.
Je sais que vous n’en croyez pas un mot.
Mais croyez-moi.
Ou pas.
Après tout, qui suis-je seulement dans toute cette saloperie de réalité ?

___________
~You were lying in the bathroom
We almost thought we lost you ~
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Andrea Espinoza
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MessageSujet: Re: [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy]   [TERMINÉ] L’enveloppe [PV Andy] EmptyMar 4 Avr - 21:36

Pourquoi je suis pas au Diner, à juste servir des putains de hamburgers et des milkshakes à des gens qui en ont rien à foutre de moi, et qui sont incapables de se souvenir de mon foutu prénom ? Pourquoi la soirée est partie en vrilles à ce point ? Nan, la vraie question, c’est…comment ? Comment j’ai fait pour me retrouver dans cette caisse qui m’appartient pas, obligée de rouler sous la menace d’un sale type qui nous conduit certainement pas à l’hôpital pour aider ce pauvre Jérémy. Je suis pas le couteau le plus aiguisé du tiroir, la truite la plus oxygénée de la rivière, le crayon le plus affûté de la trousse, le lampadaire le plus éclairé de la rue…bref, tout ça pour dire que je suis pas la nana la plus intelligente de la terre, mais je comprends bien que si notre blessé aux portes de la mort est en train de pisser le sang sur la banquette arrière, Hercule y est pas pour rien. Ce sale enfoiré de Musclor à la con, et son foutu flingue à la con. Ouais, je deviens vulgaire quand je suis sur les nerfs. Et là, autant dire que je suis pas loin de réviser l'entièreté de mon dico des gros mots.

J’ai beau avoir grandi dans ce quartier, et le connaître plutôt comme ma poche, j’ai aucune idée de l’endroit où nous emmène la montagne de muscles. Je sais où on est, là est pas la question, ce que je me demande surtout, c’est quelle est notre destination. Est-ce qu’il nous emmène dans un coin encore plus craignos pour finir le travail sur Jérémy, et éliminer les témoins gênants dans la foulée ? Tout ça parce qu’une nana a oublié une simple petite enveloppe de rien du tout en partant du Diner, et que j’ai voulu faire une bonne action. La prochaine fois, je m’occuperai de mon cul, et basta. Rien à carrer des enveloppes qui se perdent. Après tout, si on a une boîte à objets trouvés, c’est pas pour rien, non ? La sympathie, c’est surfait. La prochaine fois, je m’abstiendrais, et basta. Ca évitera de me retrouver dans une bagnole à pas savoir si je verrai le soleil se lever demain. Oui, je me la joue mélodramatique, mais bordel…le gars a un flingue !!

Alors que je passe les vitesses, que j’essaie de garder un oeil sur la route, sur Hercule, sur le rétro en même temps, je peux pas m’empêcher de penser à tout ce qui pourrait mal tourner dans les minutes qui vont suivre. Et autant dire que les scénarios qui finissent bien se comptent sur les doigts d’une main. Sur un doigt, plutôt. L’angoisse. J’ai un regard en biais vers le gros musclé à mes côtés, et pendant l’espace d’une seconde, je me demande si on peut discuter avec un gars comme ça, s’il existe des mots capables de le faire changer d’avis, de lui faire entendre qu’on a rien à faire là, de le convaincre de nous laisser partir. Je suis pourtant persuadée qu’aucun discours arriverait à le faire changer d’avis. On a rien à voir dans toute cette histoire en plus de ça. On était juste au mauvais endroit, au mauvais moment. On a juste fait le truc le plus humain du monde, non ? Un type avait besoin d’aide, et on a foncé, sans réfléchir une seule seconde, parce que c’est ce qu’aurait fait n’importe qui, non ? Comme quoi, faire preuve d’humanité, parfois, ça craint.

Sauf qu’une ambulance sortie de nulle part coupe court à notre escapade, et après une légère embardée, la voiture s’arrête net. Il me faut plusieurs secondes pour comprendre ce qu’il s’est passé, pour essayer de reconnecter mes neurones, pour remplir les blancs. Un accident. Après avoir vu un gars se faire planter, puis avoir été menacée par une arme à feu, on vient maintenant d’avoir un foutu accident de voiture. Ca existe, le karma ? S’il existe, j’aimerai bien lui causer deux secondes, parce que là, ça sent le foutage de gueule. C’est la voix du docteur Anderson qui me ramène à la réalité toute pourrie de cette soirée. Il me suffit de poser le regard sur Hercules pour deviner que ça s’est pas très bien fini pour lui. Hé ouais, ça craint de faire partie des méchants. Deux doigts dans son cou me confirment ce que l’angle douteux de son corps m’a déjà appris, et me donnent envie de sortir de la voiture aussi vite que si elle était en feu. C’est un putain de cauchemar. J’ai pas d’autres explications, un simple cauchemar, et je vais me réveiller.

Sauf que Micka m’a l’air sacrément réelle, la plaie sur son front aussi, Jérémyjemarreteplusdepisserlesang également, tout comme l’ambulance qui éclaire la ruelle de ses gyrophares. Je me recule -pour pas dire simplement titube- de plusieurs pas en arrière pour laisser les ambulanciers faire leur boulot. Mais bordel, ils étaient où, une éternité plus tôt, quand on les a appelés ?! J’écoute vaguement Micka faire un topo au secouriste, j’imagine qu’elle doit le connaître, et je me dis que Jérémy encore en vie, ça doit relever du miracle. J’y connais rien en médecine hein, mais bon, tout ce sang quand même…y’a pas besoin d’avoir fait des études pour se douter qu’il était bien mieux à l’intérieur du corps de ce pauvre gars. “-Vous pouvez garder les épingles, hein.” La secouriste partie chercher la trousse de secours me lance un regard interloqué, puis à Micka, mais elle devrait comprendre par elle-même dès qu’elle aura posé les yeux sur le bide de son patient.

Me sentant d’un coup incroyablement lasse, je finis par m'asseoir à même le trottoir, posant les mains sur chacune de mes épaules, les bras croisés au niveau de la poitrine. C’est con hein, mais je m’étais jamais dit qu’à vingt huit ans passés, tout ce que je voudrais un jour, c’est que ma mère me serre dans ses bras pour m’apporter son réconfort. Je lève les yeux vers la toubib quand elle s’adresse à moi,alors que d’instinct je fronce les sourcils, surprise par cette nana un peu perchée débarquée de nulle part. Je me demande quel genre de médecin elle peut être. Alors ouais, j’imagine qu’elle côtoie la mort beaucoup plus souvent que moi, mais quand même…elle a pas montré une once de peur, rien que…qu’un visage blasé, profondément ennuyé. A croire qu’on la menace avec un flingue tous les jours. De mon côté, je crois qu’il va me falloir un moment pour réussir à oublier cette soirée, pour me convaincre, si la situation venait à se répéter, qu’en aidant un inconnu, je vais pas de nouveau me mettre dans une situation compliquée. “-Vous savez…vous devriez parler à quelqu’un. Ça doit bien exister des psys, dans cette ville. Parce que repartir comme si de rien était après qu’un mec se soit vidé de son sang devant vous, alors qu’on était menacées par une arme à feu, c’est pas très normal. Vraiment pas normal.” M’enfin, pour ce que j’en sais.

Je resserre l’étreinte autour de mes épaules et fixe la silhouette de docteur Blasée pendant qu’elle s’éloigne, essayant de me répéter ce qu’elle vient de dire, que tout va bien se passer, même si j’y crois pas vraiment. Sérieusement, qu’est-ce qui peut être si important que ça, pour qu’elle prenne la poudre d’escampette comme ça ? Les ambulanciers sont encore en train de rafistoler Jérémy, jetant des compresses rougies sur le bitume, prononçant entre eux des tas de mots hyper compliqués que j’essaie même pas de piger, quand une voiture de flics arrive, et se gare un peu plus loin. Merde. Tain, j’aurai pu y penser de moi-même qu’ils allaient débarquer, pour savoir ce qui c’était passé, pourquoi un type s’est fait poignarder, et pourquoi un autre est mort dans l’habitacle de la voiture d’un inconnu. Beaucoup trop de questions, et ma seule réponse c’est : je suis juste une serveuse. Je manque pourtant de sauter de joie quand je vois que le deuxième flic n’est autre que Stanichou, et je bondis du trottoir direct dans ses bras, dans un élan de spontanéité mal maîtrisé que je tente de réfréner au plus vite. Mais c’est un besoin humain, non ? De vouloir éprouver un peu de réconfort après une soirée aussi merdique, et il est le seul visage que je connais ici.

Alors, après une micro étreinte d’à peine une seconde, j’essaie de lui expliquer la situation, la présence de Micka, la lettre qu’elle a oublié et que j’ai été lui apporter sur le parking, Jérémy qui s’est fait poignarder et qui s’est accroché à la vie, bref, tout, avec des tas de détails inutiles. C’est con, mais voir un visage connu dans cette ruelle, autour de ces étrangers, de leurs questions oppressantes, ben ça me fait un bien insoupçonné, même si je me retrouve à devoir revivre un peu cette soirée. Du coup, je suis un peu plus rassurée quand je m’assois dans la voiture de patrouille, après m’être engagée à passer au poste de police le lendemain pour faire ma déclaration. Et puis…le plus âgé des gars en uniforme voit bien que je connais son collègue, ça doit le conforter dans l’idée qu’il peut me laisser filer pour ce soir, après avoir pris quelques infos et une adresse où venir toquer si j’oublie notre rendez-vous. Ce soir-là, je troque la solitude de mon appartement pour la maison de mes parents, et fonce droit dans les bras de ma petite mamita, bientôt rejointe par Bennie.

___________

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